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Santé physique, mentale, décrochage.. l'aidance chez les jeunes de 16 à 25 ans décryptée (CREDOC et MACIF)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le vendredi 06 octobre 2023.

“Je suis arrivé plusieurs fois en retard en cours, environ trois fois par mois. Les profs m'ont dit de ne plus l'être. Ils ont essayé de savoir pourquoi. J'ai expliqué, ils se sont préoccupés d'eux“ explique Marc, aidant de ses parents diabétiques. En tout, 18 % des élèves ou étudiants dans cette situation sont arrivés en retard en cours l'an dernier, contre 10 % pour les non-aidants, indiquent le Crédoc et la Macif dans un enquête centrée sur le phénomène.

La rapport souligne “la diversité de l’aide apportée, allant du soutien moral à la pratique de soins“ ainsi que l’impact sur la vie sociale et affective “de ces adolescents en construction et de ces jeunes adultes aux prises avec les études et l’insertion professionnelle“. Les jeunes proches aidants de 16 à 25 ans, catégorie “méconnue et quasi invisible de l’action publique“ seraient entre 700 000 et 1 million (soit 13 %) à être investis dans l’accompagnement d’un proche fragilisé par une perte d’autonomie liée à l’âge, à la maladie ou au handicap.

Parmi eux, 22 % sont âgés de 16 à 18 ans, 29 % de 19 à 21 ans et 49 % ont entre 22 à 25 ans. L'enquête fait valoir une “surreprésentation des élèves boursiers (qui) laisse entrevoir des conditions financières plus défavorables“, 57 % des jeunes aidants étant bénéficiaires d’une bourse sur critères sociaux de l’Education nationale, du Crous ou d’une bourse régionale, soit 19 points de plus comparativement aux jeunes non-aidants.

Près de la moitié (48 %) des jeunes aidants résident avec la personne aidée, comme Dina, “qui a endossé le rôle d’aidant, alors qu’elle était au lycée, (..) en soutien pour toute la famille, sa mère atteinte d’un cancer n’étant plus en mesure d’assurer les tâches du quotidien“ : “Je faisais les tâches du quotidien, il fallait aider à la maison, l’organisation pour que ma mère aille suivre son traitement sur Paris, prendre soin de mon petit frère et de ma sœur à ce moment-là à la maison, trouver les billets de train, voir qui va emmener mon frère faire des activités, ça m’est arrivé de prendre des RDV. (…) Les tâches ménagères, vider le lave-vaisselle, faire à manger, s’occuper du linge de tout le monde, apporter à boire, à manger à ma mère, m’assurer qu’elle avait tout ce qu’elle avait besoin. (…) Il fallait suppléer : mon père n’était pas trop à la maison, il rentrait tard le soir vers 20h, 21h.“

Sont comptés un jeune aidant sur quatre (24 %) qui apporte une aide quasi-quotidienne, tandis que 38 % interviennent plusieurs fois par semaine. Pour les personnes interrogées dans cette étude à la fois qualitative et quantitative, “bien souvent, l’aide est perçue comme une source de satisfaction au quotidien“, et au-delà des tâches accomplies, “les jeunes aidants insistent sur la qualité des relations qui s’établissent avec la personne aidée (confiance, liens intimes, …) et tirent de cette situation de multiples rétributions : sentiment d’utilité, fierté..“

Si la majorité les aidants évoquent en effet la spontanéité et l’évidence de l’aide apportée compte tenu des liens le plus souvent familiaux avec la personne aidée, 84 % voyant comme “évident“ de s’engager, de répondre aux besoins de la personne aidée, il n'en reste pas moins qu'une “part sensible“ d'entre eux “laisse entendre le caractère contraint de cette aide“ : 54 % déclarent ainsi s’être investis à la demande de la personne aidée, 52 % étaient les seuls à accepter d’intervenir et 47 % considèrent ne pas avoir eu le choix et qu’il fallait bien le faire. Dès lors, la relation avec l’aidé peut-être bouleversée “pour le meilleur“ avec 42 % des aidants actuels qui estiment que l’aide apportée a également permis un rapprochement avec la personne aidée. Cependant “une part non négligeable de jeunes aidants (22 %) déclarent que leur relation avec l’aidé est devenue plus conflictuelle.“

Au-delà, être aidant peut avoir des conséquences sur les jeunes, notamment sur la santé. L’aidance génère selon l'enquête, “une fatigue physique chez 49 % d’entre eux, des problèmes de sommeil pour 42 %, une perte ou une prise de poids dans 40% des cas“, et aux symptômes physiques s’ajoutent toute une série de conséquences physiologiques : 43 % des aidants interrogés s’estiment fatigués moralement, 42 % se disent anxieux, surmenés et stressés, 29 % présentent des signes dépressifs et 27% souffrent d’isolement (contre 15 % des non-aidants interrogés).

Les jeunes aidants sont par ailleurs “deux fois plus nombreux que les non-aidants à avoir décroché, 4 fois plus nombreux à ne pas avoir pu se présenter à un examen et près d’un quart d’entre eux ont déjà redoublé une année“. Seulement 14 % d’entre eux ont pu bénéficier d’un accompagnement dans leurs rattrapages des cours. L'aidance génère également de l’anxiété à aller en cours chez 27 % des aidants interrogés et suscite une inquiétude pour la suite du parcours scolaire.“

“Certains camarades de classe m’ont aidé, c’était pas facile pour moi, ils me soutenaient moralement, ils m’aidaient à rattraper des cours“ déclare ainsi Samba, 23 ans, ancien aidant de son oncle en perte d’autonomie, lorsqu'il était étudiant. A contrario, il semble qu'en dehors de ces cercles d’amitié et d’entraide, “l’aidance demeure un tabou ou un sujet particulièrement sensible“, 61 % des aidants sondés éprouvant une gêne à faire connaître ou à évoquer leur situation.

Interrogés sur les services ou les actions qui pourraient leur être utiles en plus d’une offre de répit, deux tiers des aidants souhaiteraient rendre visibles les jeunes aidants dans la sphère publique, sur la réalité d’un phénomène “qui ne concerne pas que des adultes ou des seniors et ce, par un relais médiatique, des actions de communication fortes.“

Le rapport ici

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