La FSU sent monter le niveau d'exaspération des personnels
Paru dans Scolaire le jeudi 07 septembre 2023.
C'est un “état esprit assez combatif“ que la FSU constate chez les personnels de l'éducation nationale, selon les mots de son secrétaire général jeudi 7 septembre.
En effet pour Benoit Teste, dont la fédération organisait sa conférence de presse de rentrée à Bagnolet, le mouvement de contestation de la réforme des retraites (sujet qu'il refuse de clore) a permis aux personnels de se poser des questions sur les conditions réelles d'exercice de leur métier. De même, le refus du pacte par un certain nombre d'enseignants (difficile à quantifier mais qui serait fort selon le syndicat, ndlr) témoignerait d'un renouvellement de confiance dans la force collective avec un “potentiel de mobilisation important“, estime le secrétaire général de la fédération.
D'ailleurs, face à l' “instrumentalisation“ de l'éducation par le gouvernement, dont le pacte enseignant représente “l'élément central de communication et de politique ministérielle“, Sophie Vénétitay, du SNES (2nd degré), note une certaine “fébrilité“ dès lors que “les besoins qui doivent être couverts ne le sont pas“. Car malgré une “volonté d'afficher un chiffre de professeurs pactés quel qu'en soit le prix“, elle estime que les enseignants “ont compris qu'il s'agit d'une tromperie sur la revalorisation et l'acte pédagogique même“. Avec les remplacements courte durée (RCD), une forme d'ubérisation de la profession serait même en vue, seulement pour Frédéric Chassagnète du SNETAP (enseignement agricole) “les personnels ne sont pas amenés à devenir des chasseurs de briques“. Et si le pacte devrait aggraver les inégalités Hommes/Femmes au sein de la profession (surtout au 1er degré qui compte 84 % de femmes), pour Sophie Vénétitay connaître le profil de ceux qui le prendront donnera des indications sur les attentes en termes de rémunération.
Déployée à “coups de pacte“ elle aussi, la réforme de la voie pro est pour Sigrid Gérardin du SNUEP (enseignement professionnel) un “passage en force“, brutal, et surtout “assez mensonger“. Entre autres, elle dénonce la dureté qu'impose le calendrier et le calibrage en ce qui concerne la modification de la carte des formations, avec 15 % des filières qui devraient fermer. Il s'agit encore de “l'arnaque“ des futurs certificats de spécialisations à bac+1 qui avant étaient financés par des moyens dédiés et qui se feront désormais par adhésion des personnels au pacte. Ce dont elle s'indigne, c'est le souhait du gouvernement de “formater les élèves de la voie pro sur les emplois précaires et mal payés“, tandis que “beaucoup de personnels vont devoir concéder à des reconversions forcées“.
Outre le pacte, au 1er degré la pédagogie est majoritairement abordée en cette rentrée sous le prisme des savoirs fondamentaux, ce que Guislaine David, du SNUIPP (1er degré) fustige au regard de la distribution d'un flyer énumérant leurs activités à distribuer aux familles, et par l'évocation des 2 heures de lecture quotidiennes au CP : “Non, notre travail ne consiste pas à enfiler des perles et à coller des gommettes“. Elle fait par ailleurs valoir que “la France est le pays en Europe qui pratique le plus de fondamentaux sur la totalité des enseignements, or pendant ce temps-là on ne dispense pas une quantité d'autres choses qui permettent d'obtenir une culture commune“, ajoutant que les “savoirs fondamentaux“ correspondent à “des compétences de bas niveau“ comme la fluence en lecture qui se focalise sur le décodage, alors que “la compréhension est ce qui est le plus important dans l'exercice de la lecture“.
Au final pour la FSU, l'éducation nécessite avant tout davantage de moyens, notamment concernant les salaires, Julie Robert du SNASUB citant en particulier les personnels administratifs qui ne sont pas revalorisés malgré leur “travail invisible mais essentiel“. Dans une rentrée qui fonctionne en “sous-administration“, elle demande des “salaires dignes“ ainsi que des créations d'emploi dans le budget 2024, d'autant que celles-ci affectent également la mobilité.
Mais bien que l'objectif “devrait être d'améliorer les carrières“, Benoît Teste constate qu'au niveau du gouvernement “l'EN est très souvent reléguée au second plan car il y a beaucoup de personnels à revaloriser d'un coup“. Raison pour laquelle Stanislas Guérini (ministre de la transformation et de la fonction publiques) ne s'inscrit “pas dans des logiques de corps“, et au contraire procède à un alignement par le bas, en créant “toujours davantage de primes“, et en faisant “stagner tout ce qui est carrière“. Le problème, pour Frédéric Chassagnète du SNETAP (enseignement agricole), c'est que le projet que porte le syndicat “est à rebours de la vision de l'école d'Emmanuel Macron“, indique-t-il, “une école mise en marché“ alors que “ce qui fait sa force, c'est une éducation nationale avec des programmes auxquels on s'adosse“.