Départements et Education nationale responsables “de nombreux obstacles institutionnels“ à la scolarisation des mineurs isolés (CIMADE)
Paru dans Scolaire, Justice le mardi 07 février 2023.
La Cimade “constate des délais trop longs pour obtenir une évaluation du niveau scolaire puis une affectation dans un établissement“, peut-on lire dans un rapport consacré à la prise en charge et à l'accompagnement des mineurs isolés publié lundi 6 février.
Selon l'ONG, ces délais se cumulent et “peuvent parfois retarder de plusieurs mois, voire reporter d’une année la scolarisation de jeunes dont la majorité arrive à grand pas“. L'association décrit également “un manque cruel de places dans les dispositifs adaptés aux allophones de type “Unité pédagogique pour élèves allophones nouvellement arrivés“ (UPE2A).
Obstacles institutionnels à l'éducation
Surtout, le rapport fait état “de nombreux obstacles institutionnels à leur scolarisation qui peuvent être le fait soit des départements soit des services de l’éducation nationale“.
Ainsi, les départements “ne scolarisent que très rarement les mineur.es isolé.es durant la phase d’accueil provisoire et d’évaluation“, tandis que “la situation est encore plus critique pour les jeunes qui font l’objet d’un refus de prise en charge“ car “la plupart des services des rectorats refusent d’évaluer leur niveau scolaire, préalable nécessaire à leur affectation dans un établissement“, des décisions pourtant “régulièrement condamné(e)s par les tribunaux“.
En outre, est constaté que les jeunes admis.es à l’aide sociale à l’enfance (ASE) “ne bénéficient pas toujours d’une scolarisation en raison de la négligence, voire de l’opposition de certains départements qui les accueillent“, d'une part “lorsque les jeunes les plus âgé.es sont laissé.es sans formation en raison de la proximité de leur majorité“, et d'autre part “lorsqu’un jeune a été confié au département par décision judiciaire mais que celui-ci refuse d’exécuter cette décision“.
Orientation négligée
Le Comité inter-mouvements auprès des évacués s'inquiète encore de la “tendance des départements à orienter les jeunes vers des dispositifs non diplômants, hors Éducation Nationale, qui compromettent la poursuite des études ou l’accès à un titre de séjour“.
D'ailleurs, la Cimade déplore qu'en raison de “contraintes extérieures au choix des jeunes ou à leurs capacités“, trop souvent, “les orientations vers l’enseignement professionnel soient privilégiées, y compris pour les jeunes isolé.es pouvant prétendre à des études longues“. Ces effets interviennent à la fois par “la volonté des départements de ne pas avoir à financer des études longues“, ainsi que par “la législation qui impose aux jeunes pris.es en charge à l’ASE après 16 ans de justifier suivre une formation professionnelle pour accéder au séjour.“ Dès lors, “l’application de ces critères génère de nombreuses situations de ruptures de droits et de parcours ayant de graves conséquences pour les jeunes majeur.es.“
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Co-écrit par 7 associations (l'AADJAM, le Gisti, InfoMIE, Médecins du Monde, le Secours Catholique-Caritas France, l’UNICEF France et la Cimade), le rapport met en avant 90 propositions “pour améliorer la situation et les droits de ces enfants, (..) en passant par la santé, la scolarisation ou le droit d’asile.“
Sont notamment soulignés “de graves dysfonctionnements dès les premiers contacts des mineur.es isolé.es avec le dispositif de protection de l’enfance qui peuvent perdurer jusqu’à leur sortie de celui-ci“, et qui “conduisent au maintien ou au retour à la rue de beaucoup d’entre eux et elles (..)“. Pour améliorer leur prise en charge, il faudrait supprimer “les dispositions à l’origine des violations les plus graves des droits de ces enfants“, c'est à dire interdire “leur refoulement aux frontières, la remise en cause généralisée de leurs documents d’état civil, leur enfermement administratif ou encore l’usage des tests osseux et les retours forcés“.
Le rapport “En finir avec les violations des droits des mineurs isolés. 90 propositions pour une meilleure protection“ ici