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“Cette rentrée est un moment charnière pour l'école publique“ (SNUIPP-FSU)

Paru dans Scolaire le mardi 23 août 2022.

“C'est de la poudre aux yeux“ a estimé ce mardi 23 août le SNUIPP-FSU lors de sa conférence de presse annuelle à propos des “cellules de rentrée“ (voir ToutEduc ici). Alors qu'elles ont été mises en place depuis hier dans les rectorats pour veiller à ce qu'un enseignant soit présent devant chaque classe, comme l'avait assuré le ministre de l'Education nationale cet été, le syndicat majoritaire des enseignants du 1er degré s'interroge : “à quoi vont-elles servir ?“ Il pense qu'elles sont surtout destinées à “rassurer la population“. Car “non“ assure sa co-secrétaire générale Guislaine David, il n'y aura pas un enseignant devant chaque classe à la rentrée, rentrée qui s'annonce “difficile“ pour une profession “éprouvée“.

Dans le 1er degré en effet, 1 177 postes n'ont pas été pourvus suite au concours 2022 du CRPE externe (professeurs des écoles, PE), ce qui a incité plusieurs académies, en particulier Versailles et Créteil, très déficitaires, à recourir à des “job dating“ pour recruter des contractuels destinés à pallier ce manque de personnels (voir ToutEduc ici). Guislaine David constate un nombre de contractuels qui augmente (821 en 2013, 3 445 en 2019) et décrit un système de recrutement, autrefois concentré en quelques points, qui se met désormais en place dans toutes les académies. Le syndicat des enseignants du 1er degré souhaiterait plutôt que soient ouvertes dès à présent les listes complémentaires (soit 1 100 personnes cette année), ce que refuserait le ministère pour des raisons budgétaires.

Il y aura peut-être suffisamment d'“adultes“ dans chaque classe, maisil n'y aura pas d'“enseignants compétents“ car ceux-ci sont recrutés au niveau licence (contre bac +5 pour les détenteurs d'un master MEEF qui passent le CRPE) et parce que “ce n'est pas la formation prévue en 4 jours qui sera assez solide pour gérer une classe“. A cela s'ajoute le manque de remplaçants. Le taux de remplacement, en baisse (78,9 % en 2020 contre 83 % en 2019), a pour conséquence des élèves répartis dans d'autres classes et une dégradation des conditions d'enseignement. Le SNUIPP-FSU plaide pour que le vivier, correspondant à 8,1 % de remplaçants, passe à 10 %.

Les conditions de travail dégradrées (surcharge de classes, droits refusés) que pointe le syndicat donnent ainsi de plus en plus lieu à des démissions, elles aussi en nette hausse depuis 10 ans (de 364 en 2008 à 2 286 en 2020), et qui sont également la conséquence d'une “désaffection“ pour un métier dont le manque d'attractivité est régulièrement souligné.

Au centre des débats, le salaire des enseignants est un “élément-clé de la crise d'attractivité que nous traversons actuellement“, ajoute Nicolas Wallet, également co-secrétaire général du SNUIPP-FSU. Il considère que le dégel du point d'indice (hausse de 3,5 % des salaires des fonctionnaires) est “très en deça de ce qui est nécessaire“, tout comme est “insatisfaisante“ la proposition de Pap Ndiaye d'accroître les salaires en début de carrière pour arriver à 2000 euros net par mois. Alors que les salaires des PE sont “inférieurs en moyenne de 18,7 % par rapport aux autres pays européens“, le SNUIPP-FSU demande une hausse de 15 % du point d'indice et de 300 euros net pour l'ensemble des carrières, avec une refonte entière de la grille salariale.

Une autre piste du gouvernement consisterait à une hausse du salaire de l'enseignant en contrepartie de nouvelles missions, évoquée dans le cadre de la généralisation annoncée de l'expérimentation des “écoles du futur“ à Marseille. “On ne peut pas rentrer dans une logique qui reviendrait à travailler plus pour gagner plus“, estime Nicolas Wallet, tandis que pour Guislaine David, la revalorisation au mérite témoigne de "la volonté aussi de diviser pour mieux régner“, ce qui d'ailleurs “peut être un élément qui ferait bouger les collègues sur les questions salariales“.

Marseille, continue-t-elle, “c'est la mise en concurrence des écoles“, mais cela signifie surtout que 40 000 euros sont utilisés pour des moyens de décharge, des postes supplémentaires (une quinzaine) qui sont prélevés sur les moyens de remplacement, alors que cela “n'est pas une demande de la profession“. C'est aussi pour elle la possibilité pour les directeurs de choisir les professeurs, ce qui “a déjà été fait et à aucun moment n'a fonctionné“, un principe “complètement déconnecté de la réalité du terrain“.

Plus encore, “cela veut dire que les écoles manquent de moyens humains et financiers“ alors que le syndicat revendique pour l'éducation prioritaire (EP) “des moyens bien plus conséquents“. Est d'ailleurs constaté un “creusement des inégalités, qui perdure et s'est accentué ces dernières années“ mais pour Guislaine David, resserrer les apprentissages sur les fondamentaux, comme le fait le gouvernement (42,5 % du temps serait dédié aux autres disciplines que les Mathématiques et le Français, contre 63 % dans les autres pays de l'UE“), nous savons que ce n'est pas comme ça que nous pouvons les réduire“. Et de conclure : “ce qui s'annonce en matière de politique éducative ne nous donne pas beaucoup d'espoir pour enrayer les inégalités scolaires, on empile les dispositifs, on expérimente mais on n'agit pas en profondeur“.

Blandine Turki, co-secrétaire générale du syndicat ajoute à cela que “l'EP n'est pas la priorité de ce gouvrenement à cette rentrée“ et explique que les dispositifs qui sont mis en place actuellement (contrats locaux d'accompagnement, cités éducatives) se substituent à l'éducation prioritaire, induisant une “rupture d'équité“ par la dilution du critère social dans les critères territoriaux.

“La discussion est plus simple mais ça ne fait pas tout“, a enfin déclaré Guislaine David à propos du nouveau ministre de l'Education nationale. Là où Jean-Michel Blanquer “faisait de sa communication quelque chose d'important“ mais avec lequel il n'y avait “pas de dialogue“ et “plus de discussion possible“, le syndicat constate qu'il obtient des audiences auprès d'un ministre qui “consulte énormément, et pas que des syndicats“, qui a “une capacité d'écoute, qui prend en note ce que l'on dit“ même si “ce n'est pas pour autant qu'il y a un changement de politique, il a la feuille de route de Macron“. Sur la question des postes d'enseignants par exemple, Pap Ndiaye aurait expliqué au syndicat qu' “il y a Bercy derrière“, ce qui fait dire à Guislaine David : “On sent bien qu'il a pas les coudées franches."

Le SNUIPP-FSU en revanche ddit vouloir “creuser“ avec le ministre l'idée d'un passage du concours de PE à bac +3 (au lieu de bac +5 actuellement) sans remettre en cause la mastérisation et baisser le niveau de qualification.

A noter enfin que sur le plan sanitaire, le niveau “socle“ de gestion de l'épidémie serait celui retenu par le ministère de l'Education nationale pour la rentrée (voir ici). En outre, il aurait informé le syndicat que 50 % des communes auraient équipé leurs écoles en capteurs de CO2.

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