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L'attractivité des métiers de l'enseignement est-elle "bafouée" par les conditions d'entrée dans le métier ? (article)

Paru dans Scolaire le vendredi 10 juin 2022.

Pourquoi un nombre croissant de jeunes enseignants démissionnent-ils ? Notre confrère du Café pédagogique signale un article de la revue "Recherches en éducation" qui donne des éléments de réponse, correspondant à tout ce qui est souvent reproché à l'administration de l'Education nationale et à son "indifférence aux situations personnelles", mais les auteurs, Richard Étienne et Céline Avenel donnent une série de vignettes, de courts récits de vie qui illustrent la difficulté de l'entrée dans le métier.

Marianne, âgée de 35 ans, deux enfants, est éducatrice spécialisée, elle réussit le CRPE, elle est affectée à 250 kilomètres de chez elle et n'a aucun interlocuteur avec qui évoquer sa situation. Elle perd le bénéfice de l’admission au concours.

Aurélie est également en quête d'une seconde carrière dans l'enseignement. Elle réussit le CRPE, fait son stage avec deux mi-temps, s'entend parfaitement bien avec ses élèves, avec leurs parents et avec l'une de ses deux tutrices, pas avec l'autre. L'institution donne raison à l'enseignante titulaire, elle démissionne.

Suzanne réussit le concours de CPE, veut prolonger son travail en master avec une thèse, "obtient un contrat doctoral, donc un salaire à plein temps pendant trois ans", demande le report du stage, ce qui n'est pas prévu par les textes. Elle obtient in extremis des dérogations.

Bernard réussit le CAPES d’éducation musicale. Il est envoyé pour ses stages dans deux collèges REP+, se trouve en difficulté face à des élèves difficiles, ne trouve pas d'aide et démissionne. "Il vient d’être recruté comme professeur par un conservatoire."

Juliette a été inscrite sur liste complémentaire au CRPE, elle est nommée, un mois après la rentrée, en zone d’intervention locale comme remplaçante à temps plein à soixante kilomètres de chez elle, sans formation. L'année suivante, elle est déçue par la formation qui lui est accordée. "Elle envisage de démissionner pour créer sa propre structure alternative."

Les auteurs partagent encore d'autres récits de parcours marqués par une grande solitude, des conflits entre enseignants et les revirements de l'institution. C'est ainsi qu'Élodie hésite à "quitter un métier qui la passionne". Elle devra sinon "se résigner à la 'souffrance' engendrée par ses conditions d’exercice".

Ils estiment que "le choix du métier est encore trop laissé au hasard de vocations tardives ou récentes (...). Le projet professionnel n’est jamais interrogé, que ce soit en amont ou pendant la formation." Il faudrait passer d’une "formation successive", la licence pratiquement sans rapport avec l'enseignement, puis les années de master, à "une formation simultanée" avec un accompagnement sur quatre ou cinq années et avec un "établissement formateur". Il faudrait aussi que les lauréats des concours "bénéficient d’une écoute personnalisée et de solutions ajustées à leur situation personnelle. Le recrutement ne se fait plus à quinze ou seize ans comme dans les écoles normales (...) mais en moyenne à vingt-trois ans et peut aller jusqu’à cinquante ans, voire plus. Certaines et certains des démissionnaires auraient pu être d’excellents enseignants aux dires des responsables. Les résultats obtenus accréditent la thèse d’une attractivité bafouée."

L'article, "Discours et parcours d’enseignants renonçant au bénéfice du concours en début de carrière", Richard Étienne et Céline Avenel (laboratoire interdisciplinaire en didactique, éducation, formation- LIRDEF, Montpellier 3), revue Recherches en Education, ici

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