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Le manque d'attractivité du métier d'enseignant, un phénomène Européen (Sénat)

Paru dans Scolaire le vendredi 10 juin 2022.

Job dating d'enseignants contractuels à Versailles, baisse du nombres de candidats admissibles aux concours d'enseignants dans différentes matières.. En France, la crise d'attractivité du métier d'enseignant est régulièrement mise en lumière par l'actualité. Une désaffection sur laquelle la commission des finances du Sénat s'est penchée à travers un rapport présenté jeudi 9 juin par Gérard Longuet.

Sont notamment évoqués “la dynamique de baisse des candidats aux concours enseignants“ en France, accentuée en 2022 mais dont la chute est “structurelle“ avec un nombre d'inscrits aux concours de l'enseignement du second degré qui a diminué de plus de 30 % en moins de 15 ans (50 000 candidats présents en 2008 contre 30 000 en 2020).

Autre phénomène, le nombre d'enseignants démissionnaires qui “est en hausse constante depuis dix ans“, avec surtout celui des enseignants stagiaires qui est aujourd'hui de 3,2 % contre 1 % en 2012, et plus de 10 fois supérieur à celui des démissions de titulaires.

Mais quelle est la situation des autres pays Européens ? A la rentrée 2019, il manquait déjà 15 000 enseignants dans le système éducatif allemand, indique le rapport, et il pourrait manquer plus de 26 000 enseignants dans le cycle primaire d'ici 2025. En Suède, il faudrait recruter 77 000 professeurs d'ici l'année prochaine pour couvrir les besoins du pays.

Démographie

Deux autres faits sont exposés dans le rapport, la population enseignante qui vieillit rapidement dans les pays de l'OCDE, et les enseignants européens qui sont de plus en plus diplômés. En France l'âge moyen des nouveaux enseignants a augmenté de 3 ans dans le 1er degré et de 4 ans dans le 2nd degré.

Mais alors que les pays de l'Union européenne ont choisi la Masterisation (les concours se passent à bac+5, ndlr), Gérard Longuet n'est “pas sûr“ qu'ils ont eu raison de le faire. Il estime que les formations disciplinaires doivent être complétées par des formations pédagogiques dès le post bac et non après cinq ans d'études.

Salaire

Si le niveau des salaires des enseignants français est régulièrement souligné par les syndicats, et vu comme une des causes pouvant expliquer le manque d'attractivité, “on s'aperçoit que l'attractivité est un problème général quel que soit le niveau salarial des enseignants des pays européens“, affirme Gérard Longuet. En effet l'Allemagne et le Portugal, qui ont en commun de bien rémunérer leurs professeurs (de 20 à près de 50 % de plus qu'en France) n'échappent pas à la pénurie d'enseignants.

D'ailleurs pour le sénateur, la rémunération seule n'est pas une solution pour l'attractivité, mais une “solution d'amour-propre“. Selon le rapport de la mission, une des questions principales du désamour pour le métier d'enseignant concerne “le positionnement des professeurs vis à vis du reste de la société, en particulier des médias et des politiques". Les enseignants français souffriraient d'un sentiment “d'isolement“ et “d'absence de collaboration“, ce qui nécessiterait la création d'espaces d'échanges, donc une refondation du bâti scolaire dans cette perspective.

GRH

Aussi, il serait question de gestion des ressources humaines, à savoir d'organisation du travail, de temps de travail, de productivité (comme dans les pays anglo-saxons) et d'évaluation des professeurs. “Il faut évaluer et pratiquer l'évaluation au niveau de l'établissement“, considère Gérard Longuet, comme dans 27 pays Européens, “pour que le travail soit reconnu, qu'il soit gratifiant“. L'évaluation est ici vue comme un travail collectif au quotidien (avec une part d'auto-évaluation) qui permet “d'échapper à la solitude“. L'accompagnement des enseignants débutants, par financement et par mentorat, est une des pistes mise en avant par le rapport.

Décentralisation et différenciation

Ce que préconise le sénateur LR, c'est une décentralisation de l'éducation dans les territoires qui donnerait plus d'autonomie aux établissements, avec une différenciation des salaires des enseignants via des primes selon les disciplines, mais aussi pour compenser l'inattractivité de certaines zones géographiques, par exemple pour “tenir compte du coût de la vie“...

En définitive, la moins forte “valeur ajoutée“ que permettrait de dégager le travail d'enseignant aujourd'hui en France renvoie pour l'ancien ministre “au statut de la fonction publique“ et à l'Education nationale même, très hiérarchique, très “classique“ dans le comportement professionnel qu'elle impose (être seul devant sa classe, un peu comme dans les professions libérales), alors que “la société s'est très largement tertiarisée et l'exigence de qualification initiale est plus forte, et offre donc des perspectives différentes et plus attractives“. Il faut, ajoute-t-il, qu'elle “accepte l'idée de l'offre et de la demande.“

Le rapport provisoire ici

 

 

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