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1ers ateliers de la voie pro : Le “regard sévère“ des enseignants de lycée professionnel sur le quinquennat, des perspectives pour la démocratisation du 2nd degré (SNUEP-FSU)

Paru dans Scolaire le vendredi 01 avril 2022.

C'est un “regard sévère“ que les professeurs de lycée professionnel ont posé sur le bilan du quinquennat de Jean-Michel Blanquer, indique Sigrid Gérardin, co-secrétaire générale du SNUEP-FSU après la parution d'une enquête inédite dans l'histoire de la filière.

Un “tableau assez sombre“ également dépeint par Jean-Daniel Levy, directeur délégué d'Harris Interactive, société mandatée pour réaliser un sondage après ce 500 enseignants du 1er au 25 mars (sur 60 000 environ en lycée professionnel, ndlr), même si les professeurs de lycée professionnel trouvent à 59 % que leur métier reste satisfaisant.

Six sur 10 estiment cependant que les conditions d'exercice se dégradent depuis 2017. La question de la reconnaissance est d'ailleurs le point le plus critique pour les enseignants de lycée professionnel, et non la rémunération, même si les trois quarts d'entre eux n'en sont pas satisfaits. En outre, aucun des thèmes questionné (conditions d'enseignement dans les classes, possibilité de faire progresser les élèves aux examens, rémunérations, horaires..) n'apparaît en amélioration ou ne fait mieux que stagner.

De plus, selon les professeurs de LP, les réformes menées par le gouvernement “n'ont pas atteint leur objectifs“, explique Jean-Daniel Levy. A 71 %, les profs ne soutiennent pas la Transformation de la voie professionnelle (TVP), 4 sur 5 pensent qu'elle ne permet pas d'atteindre les objectifs de formation, et seul le dispositif de “co-intervention“ bénéficie d'un jugement positif pour une légère majorité de sondés (à 49 %, contre 48 % qui ne l'apprécient pas).

“Nous ne sommes pas face à des enseignants tournés vers leur propre situation“, a toutefois répété Jean-Daniel Levy à plusieurs occasions. Très majoritairement, les enseignants critiquent la complexification de l'organisation au sein de l'établissement (à 86 %). La transformation de la voie professionnelle est aussi vue comme une “perte de sens“ pour beaucoup (deux tiers des enseignants interrogés), en grande partie en raison d'un manque d'heures disciplinaires avec les élèves.

Interviewé par ToutEduc, Axel Benoist, co-secrétaire général du SNUEP-FSU confirme ce sentiment et évoque “le besoin de temps“ nécessaire aux élèves, qui n'ont pas tous les mêmes besoins pour arriver aux savoirs et aux qualifications. Or il constate que les propositions de certains candidats à l'élection présidentielle vont à l'encontre de cette idée et “relèvent d'une idéologie qui méconnait et qui méprise les jeunes issus majoritairement de classes défavorisées“.

Assigner les élèves à leur position sociale

Une idée qui rejoignait les débats de l'atelier autour de la démocratisation du second degré. Pour Sophie Vénétitay par exemple, Jean-Michel Blanquer a renoncé à cette démocratisation, sa ligne directrice ayant été “d'assigner, d'enfermer les élèves à leur position sociale d'origine“ alors qu' “un certain nombre de familles n'ont pas les codes pour comprendre ce qui se passe au 2nd degré“. La secrétaire générale du SNES-FSU (enseignants du 2nd degré généraliste) a souligné une hausse des inégalités sous ce quinquennat, et ajouté que la difficulté scolaire a été sortie de la classe, externalisée.

“Les élèves en difficulté ont besoin d'école“, estime également Eric Nicollet, du SUI-FSU. Pour le secrétaire général du syndicat des inspecteurs de l'éducation, le LP a été un outil important pour la démocratisation des élèves, et “c'est peut être ce qui pose problème aux décideurs“. D'où la mise en avant de l'apprentissage, dans une “logique d'asservissement de la formation professionnelle aux besoins des entreprises“. Est critiquée l'idée de former les élèves selon ce dont on a besoin, et non par une formation complète, globale.

Dans le troisième volet de l'enquête d'Harris Interactive, l'apprentissage au sein des établissements apparaît justement comme un “exercice complexe“. Pour 56 % des professeurs de lycée professionnel, l'accueil des apprentis semble plutôt “imposé“ par la hiérarchie. La plus grande difficulté, pour 44 % des personnes intérrogées, est qu'il génère une dégradation des conditions d'enseignement pour les élèves.

A contrario, pour Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, “l'économie a besoin d'avoir beaucoup de gens très qualifiés“, alors qu' “on bouche l'avenir d'une partie de la jeunesse“, notamment avec la réforme du lycée pro qui “a été une catastrophe“.

La voie professionnelle est la “cible privilégiée des politiques libérales“ actuellement menées, a conclu Sigrid Gérardin. Si elle est au cœur d'enjeux socio-economiques qui dépassent le seul cadre scolaire, elle est “fortement attaquée“, ce qui pourra conduire selon la co-secrétaire générale du SNUEP-FSU à “une riposte syndicale forte, et elle sera fédérale".

Les 1ers ateliers de la voie professionnelle étaient organisés par le SNUEP-FSU à Gentilly jeudi 31 mars et vendredi 1er avril. Plusieurs tables rondes ont permis de se pencher spécifiquement sur le développement du sport et de la philosophie dans la voie professionnelle, sur la filière coiffure ou encore sur les impacts du confinement et son corrolaire, l'enseignement à distance, et de mettre en avant les préconisations de l'organisation (voir ici).

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