Scolaire » Actualité

Comment les enfants réussissent ou échouent à apprendre (3) : "Les pédopsychiatres sont mis à la porte de l’école" (N. Catheline)

Paru dans Scolaire le mardi 29 mars 2022.

Voici des échos de la journée scientifique organisée le 25 mars par l'APF (Association française de psychiatrie) et ToutEduc sur les liens entre pédagogie et sciences de la cognition. Identifiée comme une spécialiste de la scolarité, Nicole Catheline regrette que l’Education nationale ne s’ouvre pas davantage à ce que pourrait apporter le regard des pédopsychiatres.

"Nous, les pédopsychiatres, nous sommes mis à la porte de l’école. Les MDPH nous ont exclus des CDES… Aussi, nous ne sommes plus assez nombreux...". Avec de la tristesse, voire un peu d’amertume, Nicole Catheline ajoute :"On a beau être considérés comme des experts et proposer des choses, le ministère décide ce qu’il veut (…) L’idée selon laquelle nos réflexions influent sur le politique et changent le monde, j’en suis revenue."

Elle s’appuie sur 43 ans d’expérience. De ses débuts à l’hôpital jusqu’à aujourd’hui, où elle est devenue l’experte des relations famille-école ou des questions de harcèlement entre pairs. "J’ai été fascinée par une médecine qui s’intéressait à l’enfant dans son environnement", se souvient Nicole Catheline en évoquant le moment où elle travaillait avec le professeur Marcel Rufo. Il voulait scolariser des enfants. Elle les accompagnait. Et c’est ainsi qu’elle s’est passionnée par les sujets ayant trait à l’école.

De cette expérience, Nicole Catheline extrait ce que peut apporter la pédopsychiatrie :"Je crois qu’il faut toujours travailler sur le plaisir de l’enseignant et la manière dont l’enfant le reçoit (…) La transmission des savoirs est un processus qui vient nourrir la psyché de la personne qui les reçoit, un processus d’appropriation." Et de rappeler – en référence à la notion d’autorité développée par Hannah Arendt - que c’est parce que l’enfant est plus fort d’un savoir qu’il va respecter l’enseignant.

Deuxième point, les médecins pourraient aider à décrypter des situations tendues, voire à les dénouer. "Il faudrait que les enseignants sachent qu’un comportement agressif ne s’adresse pas forcément à eux. Il faudrait qu’ils aient des lieux pour parler des difficultés avec leurs élèves." A ce propos, Nicole Catheline relève que les maîtres étaient auparavant plus fréquemment issus du même milieu que leurs élèves, souvent agricole. "Ils savaient comment s’adresser à eux." Cette congruence est moins forte aujourd’hui en raison de l’élévation du niveau social des enseignants, alors que l’école est confrontée à des milieux extrêmement divers.

Travailler sur ce qui se vit dans un groupe

La dynamique de groupe constitue le troisième point de réflexion."Cela reste le grand impensé de la formation des enseignants ; or, ce n’est pas rien de vivre avec un groupe. L’idée serait de travailler sur ce qui se vit dans le groupe ; En pédopsychiatrie, ce qui nous est cher, c’est comment on construit sa pensée, en frottant sa parole aux autres, en la montrant aux autres", souligne Nicole Catheline qui évoque avec tristesse l'état de la coopération entre la pédopsychiatrie et l’école. On devine que les neurosciences ont rétréci le champ. "On tente de trouver dans le cerveau des solutions à des problèmes de contexte. Mais le cerveau c’est autant le dedans que le dehors."

MDPH : Maison départementale pour le Handicap, CDES : commission départementale de l’éducation spéciale où se décide l’orientation des enfants (établissement spécialisé, scolarité aménagée, etc)

Muriel Florin

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →