Suivi des CLA : “dans de nombreux cas, la réflexion a surtout porté sur la périphérie de la classe“ (IGESR)
Paru dans Scolaire le lundi 14 mars 2022.
Les correspondants académiques de l’inspection générale (COAC) ont été mandatés pour effectuer une mission de suivi des “contrats locaux d’accompagnement“, dispositif d’allocation dit “progressive“ des moyens, expérimenté depuis la rentrée 2021 dans plusieurs établissements (de la maternelle au lycée) des académies de Lille, Nantes, et Aix-Marseille. L'IGESR présente dans un rapport publié vendredi 11 mars, deux notes “pour faire émerger des points d’attention permettant de guider la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des CLA.“
Indicateurs scolaires
Projets, contrats et courriers d’allocation des moyens... La première note, une analyse des documents transmis par les autorités des académies expérimentatrices, indique que le CLA est “perçu comme une reconnaissance institutionnelle des difficultés auxquelles les équipes sont confrontées“. Elle ajoute que “si l’identification des structures reste très liée aux indicateurs scolaires, quelques données renvoient aux politiques interministérielles et aux spécificités locales et devraient permettre d’impliquer les acteurs locaux dans la dynamique de contrat“ et conclut que, “bien que ces acteurs soient identifiés dans les projets des écoles et des EPLE, une communication académique en leur direction reste à développer.“
La deuxième note identifie quelques effets immédiats des CLA, défauts et qualités. Elle juge en revanche qu'il semble “trop tôt“ pour mesurer l’impact du dispositif sur la réussite des élèves. Pour les inspecteurs généraux, le CLA est à la fois un vecteur de reconnaissance de l’engagement des personnels, un dispositif de relance des dynamiques pédagogiques et éducatives, ainsi qu'une démarche contractuelle qui s’adapte aux particularités de chaque degré d’enseignement.
Ils notent cependant que les équipes rencontrées “se sont interrogées sur les critères qui avaient conduit à l’identification de leur école ou de leur établissement et nourrissent encore quelques inquiétudes sur les finalités et le devenir du dispositif".
“Véritable reconnaissance des difficultés“ auxquelles elles sont confrontées, celui-ci permet en revanche “de rompre avec un sentiment d’abandon institutionnel qui érodait leur capacité à s’engager dans un mouvement de rénovation pédagogique".
Marges de manœuvre et périphérie
Par ailleurs, les équipes “apprécient de bénéficier, dès cette rentrée, de marges de manœuvre supplémentaires pour conduire les actions qui leur semblent les plus adaptées aux besoins des élèves“ et soulignent le caractère concret de la démarche. Exemple donné, les CLA favorisent une plus grande souplesse dans l’organisation du travail collectif et permettent une juste rémunération des engagements individuels.
Les inspecteurs de circonscription et les chefs d’établissement interrogés au cours de la mission d'évaluation ont “parfois regretté l’urgence de la phase d’élaboration du projet“, mais ont souligné l’effet rapide et positif du CLA dans la conduite de l’action collective. De même, les personnels “ont plus facilement accepté d’entrer dans la logique du diagnostic réalisé par les équipes de direction et la compréhension des indicateurs permettant d’objectiver les choix et la ventilation des moyens.“
En revanche, “dans de nombreux cas, la réflexion a surtout porté sur la périphérie de la classe“ souligne l'IGESR qui cite l'acculturation des élèves aux comportements attendus, la relation aux familles, la "sécurisation" ou encore la prise de confiance des élèves. Il serait, “nécessaire, pour entrer véritablement dans la mise en question des pratiques enseignantes, de mettre en place des temps de formation qui visent à déplacer les centres d’intérêt de la réflexion des équipes vers le cœur de la classe et la prise en charge directe des difficultés des élèves".
Si les CLA sont analysés comme “une sorte de levier qui vient rendre plus aisée la mise en place d’actions que l’on souhaitait mener auparavant mais qui, faute de moyens et de démarche diagnostic partagée, ne pouvaient avoir lieu“, la majorité des actions conduites relèvent, “à ce stade, plus de la poursuite ou du ‘recyclage‘ d’actions à la périphérie de la classe que d’une véritable volonté d’innovation permettant de transformer durablement l’action formatrice conduite sur les temps d’enseignement“.
Evaluation
Même si le modèle est défini comme “pertinent pour engager la relance de dynamiques locales confrontées à de fortes difficultés sociales, économiques et scolaires“, une “approche trop abrupte de la mesure de l’efficacité du dispositif pourrait réduire, voire annuler rapidement, le fragile gain de sa mise en place“, les équipes demandant “à disposer d’un temps suffisamment long (durée du contrat) et sans contrainte évaluative excessive pour faire la démonstration de l’efficacité de leurs démarches“.
Concernant “l’évaluation du dispositif“, les inspecteurs généraux soulignent que “le format et le calendrier “restent à définir. Ils ajoutent qu'un “accompagnement sera nécessaire pour garantir la pertinence et la robustesse des indicateurs qui seront retenus pour mesurer les plus-values du dispositif".
“Toutes les équipes rencontrées ont exprimé la crainte de l’arrêt brutal des aides allouées alors qu’elles n’en sont qu’aux prémices de la mise en place“, indique le rapport. L'idée de l'évaluation est associée à “une mesure d’une performance qui détermine le maintien ou le retrait des moyens octroyés“ et “n’est pas envisagée comme une composante à part entière du projet permettant de mieux maîtriser la conduite et l’orientation de l’action.“
Enfin, les équipes de direction, “souvent en retrait sur les questions liées à la pédagogie par crainte, notamment, de la réaction des enseignants, devront, avec l’aide des corps d’inspection, entrer davantage dans l’analyse des effets du projet pour en garantir la pérennisation et interroger les besoins de transformation, d’innovation.“
Le rapport ici