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La “ligne numérique“ peut-elle faire progresser les élèves en mathématiques ? (CSEN)

Paru dans Scolaire le mercredi 23 février 2022.

En sixième, “beaucoup d’élèves confondent l’addition et la soustraction !“ constate le Conseil scientifique de l'Education nationale dans une note cherchant à évaluer et améliorer la compréhension des nombres décimaux et des fractions à l'école.

Est calculé que chez les élèves de début de sixième, les calculs avec des décimaux entrainent entre “40 % et 90 % d’erreurs“, tandis que ceux portant sur des fractions, “même les plus élémentaires, entre 75 % et 90 % d’erreurs.“

“Il arrive souvent, considèrent Stanislas Dehaene, Cassandra Potier-Watkins, Chen Xi He et Marie Lubineau, que les élèves mémorisent des recettes arithmétiques, sans pour autant comprendre le sens des objets qu’ils manipulent. Même s’ils peuvent faire illusion avec des problèmes identiques à ceux que l’enseignant a donnés en exemple, leurs performances s’effondrent dès que le problème cesse d’être familier.“ Ils évoquent “une dissociation entre la mémoire procédurale et la mémoire sémantique“, la connaissance de la procédure ne suffisant pas à garantir la compréhension du sens des objets mathématiques.

Et pour savoir “si les élèves ont vraiment compris les concepts sous-jacents“, est recommandée la pratique, par les élèves dè le premier degré, du placement des nombres d'abord sur une bande puis sur une ligne numérique “afin de les aider à comprendre les quantités en jeu et aussi d’aider les enseignants à repérer les difficultés qu’ils rencontrent“, un outil “essentiel pour faciliter et révéler la compréhension de l’arithmétique, qui est proposé dès le début de CP lors des évaluations nationales“, car “la relation entre le nombre et l’espace est un pilier des mathématiques à toutes les étapes du développement, en sorte que la compréhension précoce des relations entre le nombre et l’espace prédit les résultats scolaires ultérieurs en mathématiques.“

Ainsi, “dès la maternelle, la recherche montre que la bande numérique, où chaque case correspond à un nombre, aide les enfants à progresser en arithmétique. Elle aide notamment à comprendre que tous les nombres entiers 1,2,3... sont ordonnés et également espacés (acquisition d’une représentation linéaire des quantités) ; que plus un nombre est grand, plus il se situe vers la droite ; et qu’additionner ou soustraire correspondent à des déplacements à droite ou à gauche sur cette bande numérique. Les jeux de plateau, type "jeu de l’oie" ou "petits chevaux"», où l’on avance un personnage dans l’espace, d’un nombre de cases correspondant à un coup de dés, facilitent la compréhension de la bande numérique. Les enfants qui y jouent progressent plus vite que les autres en mathématiques.“

En outre, selon les chercheurs, “la recherche montre que les adultes qui sont experts en arithmétique possèdent un concept intégré de ligne numérique qui rassemble les entiers, les fractions et les décimaux.“

De nombreuses recherches, résulterait d'ailleurs que “l’apprentissage des fractions pose des difficultés considérables à l’école et au collège“. Aussi, saisir qu’un rapport de deux nombres est encore un nombre, telle est la cause pour laquelle les fractions et les décimaux sont si difficiles à comprendre, et que “les élèves qui n’ont pas compris le sens des fractions se bornent à traiter ces deux nombres indépendamment l’un de l’autre.“

Les élèves qui maitrisent le concept de fraction seraient davantage capables de se représenter leur grandeur sur une “ligne numérique mentale“, créant un “effet de distance“, à savoir qu'ils “ont compris que chaque fraction (...) correspond à une grandeur que l’on peut situer dans l’espace des nombres, à des positions qui se situent entre les nombres entiers habituels.“ Dès lors, “apprendre à positionner les nombres décimaux, soulignent les auteurs de la note du CSEN, ce qui oblige à prêter attention à la position de la virgule, facilite la compréhension de leur grandeur et de leur sens.“

“Le concept de grandeur d’une fraction n’est absolument pas maîtrisé par les élèves, alors que les programmes spécifient qu’il est étudié en CM1 et surtout en CM2.“ Pour les chercheurs, les résultats du test de la ligne numérique montrent que “78 % des élèves en début de sixième n’ont pas su placer correctement la fraction ½ au milieu de l’intervalle [0,1] !“, ou encore que “les élèves confondent souvent une fraction, soit avec l’une de ses composantes entières (½ à 1 ou 2), soit avec le nombre décimal (1,2).“

Ils estiment enfin que “le feedback leur permet de s’améliorer au cours du test“, la littérature montrant que “la bonne compréhension de la ligne numérique est fortement prédictive de la réussite ultérieure en mathématiques, et (qu’) un entrainement dans ce domaine, accompagné d’une pédagogie adaptée, a des effets positifs.“

Le CSEN pense que “la comparaison des décimaux et des fractions, leur classement, leur mise en relation avec des graphiques et des formes, l’équivalence des fractions et des nombres dans différentes écritures, pourraient être travaillés plus souvent au cycle 3.“ La ligne numérique, ajoutent ses chercheurs, pouvant “aider à comprendre les décimaux et les fractions“, il serait donc “efficace de pratiquer des activités qui consistent à ancrer dans le concret la connaissance de la grandeur des décimaux et des fractions, à travers des activités de comparaison, de mise en ordre, et de positionnement de ces nombres sur des lignes numériques.“

En revanche, l’impact du simple fait de jouer à placer des fractions sur la ligne numérique “est débattu“, car “les données suggèrent que le jeu lui-même ne suffit pas, et qu’il faut l’accompagner d’un enseignement explicite de ce que sont les fractions et de la manière dont elles se comportent.“

Enfin, si il peut être intéressant d'effectuer un travail sur les pourcentages avant d’introduire les décimaux et les fractions, il faut surtout “penser aux fractions comme des multiplications d’un nombre (le numérateur) par une nouvelle unité (qui vaut 1/n, où n est le dénominateur). Par exemple, 2/9, c’est deux fois «un neuvième » : tout se passe comme si on avait changé d’unité, et qu’on comptait à présent en neuvièmes.“

Les auteurs de la note du CSEN ont réalisé en 2020 un test par ordinateur sur “un vaste échantillon représentatif d’élèves en début de sixième "avec pour qualité d'être “très sensible aux connaissances et aux faiblesses“. Ils expliquent cependant que “suite à des difficultés informatiques“, les résultats présentés portent sur 1 274 des 3 412 élèves français de début de sixième testés, et qu'ils ont été répliqués en septembre 2021.

La note n°5 du CSEN ici

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