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Egalité des chances : refonder le tissu associatif, rendre obligatoires les heures consacrées à l'orientation au lycée.. les mesures préconisées par la mission d'information au Sénat

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le mercredi 29 septembre 2021.

“On s'est aperçu que l'ascenseur social était cassé et qu'il fonctionnait moins bien qu'il y a une vingtaine d'années“ indiquait récemment le sénateur Jean Hingray (Union centriste), président de la mission d'information sur l'égalité des chances dont le rapport, fruit d'une cinquantaine d'auditions, a été présenté hier, mardi 28 septembre au Sénat.

Monique Lubin, sa rapporteure (SER), en a détaillé lors d'une conférence de presse les conclusions. Elle décrit “le sentiment que l'avenir d'un trop grand nombre de jeunes paraît écrit“, avec un poids des déterminismes sociaux qui “reste élevé“. Pour elle, “il ne fallait pas se contenter d'évoquer la situation des jeunes en évoquant l'adolescence ou la pré-adolescence“, explique-t-elle, d'où son approche consistant à suivre un enfant de sa naissance jusqu'à l'entrée dans l'âge adulte afin d'identifier les facteurs d'inégalités des chances.

“Il faut cesser d'empiler les dispositifs“. La sénatrice les considère trop nombreux, comme une sorte de “maquis“ de mesures hétérogènes et foisonnantes destinées aux jeunes mais non identifiées ou ignorées par ces derniers et leurs familles. Une mise en œuvre qu'elle ne juge pas optimale pour réduire les inégalités, en raison de l' “insuffisance d'impulsion politique“ et d'évaluations régulières qui font aujourd'hui défaut.

Ses conclusions se situent autour de quatre domaines. Tout d'abord, la petite enfance a été “identifiée comme la période clef pour agir efficacement contre les inégalités de langage et sur les capacités socio-comportementales“. La mission préconise d'investir dans les politiques de la petite enfance, notamment dans l'accueil. Sur le plan quantitatif d'une part, là où seuls 16 % des enfants de familles modestes accèderaient au moins une fois par semaine aux structures collectives, contre 25 % pour l'ensemble des jeunes enfants. Le rapport souligne des disparités territoriales très fortes dans les possibilités d'accueil, avec notamment un manque de places et de structures d'accueil en milieu rural, des zones “souvent en dehors des radars“. Est demandée une politique plus volontariste de création de places, alors que “l'objectif de places supplémentaires fixé pour 2022 (voir ici) ne paraît actuellement pourvoir être réalisé qu'à 40 %“.

Au niveau qualitatif, Monique Lubin évoque des remarques de professionnels du secteur selon lesquels les personnels qui accueillent ne seraient pas suffisamment formés. Son souhait est de “monter le niveau de formation“ et de revaloriser les métiers de la petite enfance. La rapporteure note, pour la scolarité, de réels efforts de la part des différents gouvernements, mais limités dans leur périmètre d'action. L'exemple du mentorat, qui augmenterait de 18 % les chances d'accéder à un emploi au bout de six mois en fin d'études, doit selon le rapport servir à l'Education nationale pour “s'emparer du plan 1 jeune 1 mentor alors que le lien avec la société civile n'est pas dans ses traditions“.

Lors de son audition par le Sénat, Eric Charbonnier, analyste à la direction de l'éducation et des compétences de l'OCDE insistait sur la qualité des filières professionnelles. Souvent pour lui, “les enfants d'ouvriers ou de familles défavorisées se retrouvent plus facilement en difficulté. Or ces difficultés scolaires incitent à les orienter vers les filières professionnelles. Alors que nous avons besoin aujourd'hui encore plus qu'hier de techniciens compétents, nous observons que les jeunes n'intègrent pas ces filières par vocation, mais par échec scolaire et sont très souvent issus de milieux modestes. Toutes les réformes qui participent à rehausser la qualité, valoriser ces filières sont importantes. Chez nos voisins, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Suisse, au Luxembourg ou en Autriche, ces filières facilitent l'insertion des jeunes sur le marché du travail.“

Pour Monique Lubin, l'orientation doit en effet “être abordée beaucoup plus sérieusement“ et doit être inscrite dans les préoccupations des élèves. Le rapport déplore un service public de l'orientation qui “ne parvient pas à ouvrir les horizons des élèves, entretenant les phénomènes d'autocensure“.

Pour ouvrir ces horizons, l'éducation “non formelle“, hors l'école est une des pistes avancées par la sénatrice. Elle regrette que les activités périscolaires aient diminuées et souligne le rôle positif mais laissé pour compte de l'éducation populaire. Il faudrait, ajoute-t-elle, “refonder le lien avec ce tissu associatif“. L'exemple des colonies de vacances, dont le nombre est en baisse régulière depuis plusieurs années et qui concernent davantage des enfants de cadres, illustre selon la mission ces inégalités. Ainsi, l'idée d'un “pass colo“ est mise en avant par la mission, sur le modèle du pass culture.

Enfin, le rapport souhaite un accompagnement plus efficace des jeunes en difficulté d'insertion. La mission préconise de poursuivre le déploiement et d'améliorer fortement le maillage territorial des écoles de la deuxième chance, qui ne sont “pas assez développées“ selon Monique Lubin. La part des jeunes sortis du système scolaire et qui ne sont ni en emploi ni en formation (NEET) stagne depuis près de 20 ans à plus de 12 %, et représenterait un million de jeunes. “Des marges de progressions très importantes existent dans la coordination au plan local de tous les acteurs de l'insertion des jeunes“ : le rapport met en avant les PRIJ (plan régional d'insertion pour la jeunesse) qui dans 90 quartiers d'Ile-de-France, toujours selon Monique Lubin permettent “de regrouper ensemble de tout ce qui peut se faire pour les jeunes“.

Au total, 58 propositions ont été formulées par la mission d’information.

Le rapport ici

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