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L'apprentissage ne doit pas être un remède à court terme (CEDEFOP)

Paru dans Scolaire le mardi 13 avril 2021.

L'apprentissage a, semble-t-il, le vent en poupe depuis une dizaine d'années. En France notamment, où "pour continuer à favoriser l'embauche des jeunes et fort du succès du plan ‘1 jeune, 1 solution‘ et des 500 000 contrats d'apprentissage signés durant la seule année 2020, j'ai décidé de prolonger le soutien exceptionnel de l'État à l'apprentissage jusqu'à la fin de l'année 2021", déclarait le Premier ministre Jean Castex le 15 mars dernier.

Ces apprentis seraient-ils plutôt, comme le suggère l'analyse du CEDEFOP, “simplement utilisés comme des travailleurs à faible coût“ ? L'apprentissage est-il la panacée face au chômage systémique des jeunes ? Dans sa note de mars 2021, le Centre Européen pour le développement de la formation professionnelle a ainsi étudié l'offre d'apprentissage au sein des pays membres de l'UE durant 10 ans, et pose la question de la réalité de ces mesures. Ainsi, précise-t-il, selon les partenaires sociaux et les experts “tous les programmes intitulés 'apprentissages' ne méritaient pas ce nom, tous ne garantissaient pas une formation de qualité (ni même la moindre formation), et tous les 'apprentis' ne bénéficiaient pas du droit du travail ou du droit à la protection sociale.“

Par exemple, en Italie, “représentative de nombreux pays“, où l'apprentissage revêt plutôt une fonction socio-économique, le CEDEFOP a noté que le programme d'apprentissage “a été principalement perçu comme un contrat de travail à durée indéterminée standard, plutôt que comme un investissement dans la formation. En tant qu’option de recrutement, il s’est néanmoins révélé moins attrayant que d’autres formes de recrutement. Son utilisation est finalement restée limitée dans l’ensemble du pays."

En revanche, “les pays germanophones, le Danemark, la Norvège et d’autres pays ayant une longue tradition d’apprentissage partagent une compréhension profondément enracinée de la finalité de l’apprentissage et de son identité dans la société. Il est conçu pour doter les apprenants de toutes les qualifications qui sont acquises uniquement ou principalement par l’apprentissage, et non grâce à d’autres formes d’EFP (Enseignement et Formation Professionnels)“, note le rapport.

D'autre part, “un risque de confusion peut également exister lorsque le statut d’apprenti diffère au sein d’un même programme en raison des différents types de contrats utilisés, par exemple en Belgique ou en Espagne. Les apprentis peuvent être des salariés s’ils signent un ‘contrat d’apprentissage‘ ou des étudiants s’ils concluent un ‘accord de coopération‘ avec leur entreprise.“ Ainsi existe un statut incertain provenant de l' “ambiguïté qui entoure le terme ‘apprentissage‘ dans certains pays“ (salarié/ apprenant/ salarié-apprenant, ndlr). Une ambiguïté qui “entraîne, à son tour, des conséquences pour la qualité et l’efficacité de l’apprentissage.“

Le Cedefop propose que les pays s’accordent sur un dénominateur commun présentant certaines caractéristiques comme l'appui sur un cadre juridique, l'aboutissement matérialisé par une qualification formelle et transférable, la structuration entre la formation par le travail et l’apprentissage en milieu scolaire, l'engagement d’une durée minimale qui justifie l’alternance entre les deux types de formation, la signature entre l’entreprise et l’apprenant d'un type de contrat spécifique et une rémunération reçue par ƒl’apprenant.

Pour le Centre Européen, les pays doivent s’accorder, dans leur propre contexte national, “sur la définition et les fonctions de l’apprentissage“, car il a pu observer “des tendances à la réduction des finalités de l’apprentissage“ : “la plupart des programmes analysés étaient principalement liés à un objectif d’emploi à court terme : aider les personnes à trouver un emploi. Malgré l’importance potentielle de cet objectif, notamment en période de crise, il ne devrait pas compromettre la fonction distincte de l’apprentissage, outil solide d’éducation et de formation."

“La route est longue“, assène-t-il en ajoutant qu' “une vision commune de l’apprentissage devrait inclure les caractéristiques qualitatives dynamiques suivantes : ƒle processus d’apprentissage devrait réunir la théorie et la pratique en tant qu’unité intégrée, à la fois dans l’établissement scolaire et sur le lieu de travail, sans séparer l’une de l’autre (par exemple, théorie à l’école et pratique au travail) ; ƒun formateur qualifié devrait être en mesure d’accompagner un apprenti ou un groupe d’apprentis dans une réflexion guidée sur ce qui est enseigné et ce qui est appris ; ƒles apprentissages ne devraient pas être certifiés par un diplôme spécifique de l’entreprise, mais déboucher sur une qualification reconnue“, les pays doivent réfléchir à distinguer objectifs d'emploi et d'employabilité, un aspect qui “importe d’autant plus à l’heure où les marchés du travail européens sont remodelés par les transitions écologique et numérique et par la nécessité d’une reprise créatrice d’emplois.“

Le CEDEFOP estime ainsi que “l’apprentissage ‘réel‘ ne fera la différence que lorsque les employeurs seront rassurés au sujet de l’utilité du temps et des efforts investis. Les pays européens doivent exposer clairement les objectifs assignés à l’apprentissage“, en déterminant si les apprentis sont considérés comme une ressource ou un capital, et soumet l'idée que “les pays doivent investir davantage dans la gouvernance, la réglementation et les normes“ pour renforcer la valeur de l'apprentissage.

La note du CEDEFOP ici

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