Formation continue des enseignants : un bilan "mitigé" (CNESCO)
Paru dans Scolaire le mardi 09 février 2021.
Le bilan de la France en matière de formation continue des enseignants est "mitigé", estime Nathalie Mons au terme d'une "conférence de comparaisons internationales" et d'une enquête du CNESCO. Mais la titulaire de la chaire "évaluation des politiques publiques d'éducation" au CNAM, lorsqu'elle en présente le détail à la presse hier 8 février, est, au total, plus sévère. Les quinze recommandations qui concluent sont exposé listent en effet les conditions d'efficacité de la formation continue, et elles sont loin d'être remplies. C'est d'abord vrai quantitativement, puisque, "en dépit des efforts récents", le pourcentage d'enseignants français ayant participé à des actions de formation en présentiel est parmi les plus faibles de l'OCDE. Mais c'est plus encore en termes qualitatifs que la situation laisse à désirer.
La formation doit être en rapport avec les besoins or 83 % des enseignants de collège disent n'avoir jamais été consultés sur l'offre qui leur est faite. Dans le 1er degré, où 18h/an sont prévues statutairement, ce sont des formations "clés en main" qui s'imposent le plus souvent, seuls 5 % des professeurs des écoles choisissent les contenus pour la totalité des 18h. Les actions doivent également être suffisamment longues et comprendre des aller-retour avec le terrain. Ce sont le plus souvent des "grands messes" sur un jour ou deux, sans que soit prévu un suivi. Ces formations peuvent être individuelles ou collectives, et le dispositif des "constellations" récemment mis en place (voir ToutEduc ici) va dans le bon sens en favorisant les relations entre pairs, mais reste limité.
Autre condition d'efficacité, des mesures incitatives, mais elles sont rares en France. Les formations, sauf exceptions, ne sont pas diplômantes, elles sont peu prises en compte dans les déroulements de carrière, et les stagiaires ne sont pas toujours appelés à donner leur avis sur leur qualité ni leur utilité.
La recherche internationale le montre bien, les résultats des formations sont décevants quand elles s'inscrivent dans un climat de défiance, quand elles apparaissent comme des injonctions au changement, quand elles ne prennent pas en compte l'expertise des personnels et sont "descendantes".
Le CNESCO préconise notamment que soit inscrit à l'emploi du temps des enseignants et des établissements des temps de formation, que les jeunes enseignants bénéficient de formations complémentaires pour lesquelles ils disposent d'un temps dédié et d'un accompagnement de proximité assuré par des collègues expérimentés qui soient missionnés à cet effet. Il faut aussi que puissent se constituer des équipes mixtes chercheurs - praticiens répondant aux besoins et à des "appels à projets de recherche". Les liens qui se nouent entre rectorats et INSPE sont d'ailleurs, en ce sens, "potentiellement prometteurs".
C'est que la formation continue peut avoir des effets très positifs sur le système scolaire. Elle accroît le sentiment d'efficacité des enseignants, et leur bien-être rejaillit sur tout le système éducatif, y compris les apprentissages des élèves, si ses conditions d'efficacité ne sont pas négligées. Elle doit s'appuyer sur une formation initiale solide, comme en Finlande ou en Corée, amener les enseignants à développer une posture de chercheurs, grâce à l'analyse de pratique par exemple, comme en Angleterre, s'appuyer sur des collectifs de travail, comme au Québec ou en Ontario, être prise en compte dans les carrières...
Le site du CNESCO ici