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L'ONU appelle à placer l'éducation au premier plan des programmes de relance et à planifier au plus vite la réouverture des écoles

Paru dans Scolaire le lundi 10 août 2020.

Préserver les investissements dans l'éducation et placer l'éducation au premier plan des programmes de relance post-Covid, se coordonner pour un meilleur impact et planifier minutieusement la réouverture des écoles : telles sont quelques-unes des recommandations formulées par l'Organisation des Nations Unies dans une note d'orientation de 26 pages, intitulée "L'éducation durant le Covid-19 et au-delà", qui a été publiée le 6 août 2020. Ces recommandations visent à empêcher que la crise éducative à laquelle sont confrontés les pays du fait de la pandémie du Covid-19 ne devienne une "catastrophe" pour toute une génération, voire plus. Selon l'ONU, "la pandémie a créé la perturbation la plus grave de l'histoire des systèmes éducatifs mondiaux", et les fermetures d'écoles risquent d'effacer des décennies de progrès. "L'éducation n'est pas seulement un droit humain fondamental, c'est un droit qui permet d'activer la réalisation de tous les autres droits humains (…)", peut-on lire dans la note. "Quand les systèmes éducatifs s'effondrent, la paix, la prospérité et la productivité ne peuvent être soutenues."

La planification de la réouverture des écoles est en tête des recommandations formulées par l'ONU. Parce que ces fermetures ne nuisent pas seulement à l'éducation mais entravent également la fourniture de services essentiels aux enfants et aux communautés, notamment l'accès à une alimentation équilibrée et la capacité des parents à aller travailler. Cette réouverture doit se faire en intégrant plusieurs paramètres : assurer la sécurité pour empêcher la transmission du virus, faire que cette réouverture soit "inclusive", donc programmée pour tous, en "écoutant les voix de tous ceux qui sont concernés", y compris les parents, et en "se coordonnant avec les acteurs clés incluant la communauté de santé".

24 millions d'apprenants risquent de ne pas retrouver pas le chemin de l'école en 2020

Or, selon des données de l'UNESCO sur lesquelles s'appuie l'ONU, alors que près de 1,6 milliards d'apprenants dans plus de 190 pays avaient été touchés par la fermeture d'établissements d'enseignement au plus fort de la crise, un milliard d'apprenants est encore concerné aujourd'hui et une centaine de pays n'ont pas encore annoncé de date de réouverture des établissements.

Selon ces projections, ce sont 24 millions d'apprenants, de l'enseignement pré-primaire à l'enseignement supérieur, qui risquent de ne pas retrouver le chemin des études en 2020 suite aux fermetures induites par le Covid-19. Après l'enseignement supérieur qui connaîtra probablement le taux d'abandon le plus élevé avec une baisse prévue de 3,5 % des inscriptions (soit 7,9 millions d'étudiants en moins), l'enseignement pré-primaire devrait être le deuxième niveau le plus touché, avec une baisse de 2,8 % des inscriptions. Au primaire et au secondaire, ce sont respectivement 0,27 % et 1,48 % des élèves, soit 10,9 millions d'élèves des deux niveaux, qui risquent aussi d'abandonner l'école. Et la majorité vivent dans deux régions, l'Asie du sud et de l'ouest (5,9 millions d'apprenants) et l'Afrique subsaharienne (5,3 millions) qui "étaient déjà confrontées à de graves problèmes d'éducation avant même la pandémie, ce qui risque d'aggraver considérablement leur situation".

Mobiliser les ressources pour les familles et faire de l'action pour l'éducation la première des priorités

La note évoque les différentes stratégies des pays qui ont commencé à planifier ces réouvertures. Elle indique que plusieurs d'entre eux ont déjà planifié d'implémenter un modèle hybride (mélange présentiel/distenciel), que d'autres ont réduit significativement la taille des classes ou dispensé des cours à l'extérieur, et que dans de nombreuses institutions, la plupart des élèves et leurs enseignants portent des masques. Selon les données de l'UNESCO, de l'UNICEF et de la World Bank Joint Survey, 23 % des pays ont prévu de recruter davantage d'enseignants, 23 % prévoient d'augmenter le temps de classe, 64 % vont introduire des programmes accélérés d'apprentissage et 62 % prévoient d'ajuster le cadre des contenus du curriculum.

Avec la réouverture des écoles, la protection des budgets affectés à l'éducation constitue la deuxième plus importante recommandation faite par l'ONU. Celle-ci invite à renforcer la mobilisation des ressources pour les familles, à faire de l'action pour l'éducation la première des priorités et à s'attaquer aux mesures et réformes inefficaces. L'ONU invite en particulier, tout en s'appuyant sur le système classique des impôts, à mettre en place d'autres mesures "sans délai", comme s'attaquer à la triche et à l'évasion fiscales ou encore réviser les avantages et les traités fiscaux.

Former les enseignants à la différenciation pédagogique et à utiliser différentes formes d'apprentissage

Au-delà des investissements à soutenir et de l'invitation à rouvrir les écoles, l'ONU invite aussi à "réimaginer l'éducation" et à "accélérer" les changements dans les méthodes d'enseignement et d'apprentissage, sachant que les "efforts massifs faits dans un temps court pour répondre aux bouleversements qui ont impacté les systèmes éducatifs ont montré que ce changement était possible". Il faut notamment étendre le droit à l'éducation en y incluant le droit à la "connexion", "renforcer l'articulation et la flexibilité entre les niveaux et types d'éducation et d'apprentissage", mais également porter une attention aux groupes marginalisés et apporter un soutien aux enseignants et formateurs. Plus important que de former ces derniers aux compétences informatiques, car "la technologie à elle seule ne suffit pas à garantir de bons résultats", il faut veiller à ce qu'ils aient les compétences pédagogiques et d'évaluation pour accompagner les élèves selon leurs niveaux, pour pouvoir implémenter les curricula accélérés et utiliser différentes formes d'apprentissage.

Concernant les enseignants, la note signale d'ailleurs que même si une minorité de pays n'a pas payé les enseignants statutaires, les mises en congé ou l'allongement des délais de paiement des salaires ont été courants. Dans le secteur public, ce sont les enseignants sous contrats temporaires qui ont été particulièrement touchés. Or, ne pas payer les salaires des enseignants "ne pose pas seulement des problèmes aux individus, aux familles et au bien-être de la communauté, mais impacte sur la qualité de l'éducation", écrit l'ONU. "À court terme, de nombreux enseignants ont dû se tourner vers des ressources alternatives et n'ont pas été capables de soutenir les enfants via l'enseignement à distance", et "sur le long terme les écoles ont dû faire face à une pénurie d'enseignants".

La note d'orientation est lancée parallèlement à #SaveOurFuture, une campagne menée par dix partenaires, dont l'UNESCO, afin de sensibiliser à l'urgence de l'éducation dans le monde. L'UNESCO doit également organiser une session spéciale de la Réunion mondiale sur l'éducation avant la fin de l'année.

La note de l'ONU (en anglais) ici

Les prévisions de l'UNESCO ici

Camille Pons

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