Temps de travail des enseignants : augmentation sensible des heures supplémentaires mais avec de fortes disparités entre degrés, établissements, secteurs, disciplines et sexes (DEPP)
Paru dans Scolaire le dimanche 05 juillet 2020.
"Augmentation sensible" du nombre d'heures supplémentaires annualisées (HSA) et d'enseignants qui en font au moins 2 par rapport à 2018 : c'est ce qui "caractérise" la rentrée 2019, écrit la DEPP dans une note d'information. Pour autant, malgré cette augmentation globale, que la DEPP lie logiquement "à la modification de la réglementation qui permet aux chefs d'établissement d'imposer à un enseignant de faire 2 HSA dans son service", et le constat que c'est aujourd'hui une pratique "très répandue" (seuls 10 % des enseignants n'y sont pas éligibles et les trois quarts des "éligibles" au dispositif en effectuent au moins une), la note met en lumière, d'une part que de nombreux enseignants en font quand même moins qu'en 2018, et d'autre part qu'elle affecte différemment les degrés, les établissements, les secteurs, les disciplines et les sexes. Ainsi, les enseignants de lycées font plus d'heures supplémentaires que ceux des collèges, les hommes davantage que les femmes, ceux de l'éducation prioritaire davantage que leurs homologues occupant un poste hors éducation prioritaire, les professeurs de physique-chimie et biologie-géologie au lycée plus que leurs alter ego de lettres et de sciences économiques et sociales...
Premier aspect saillant en effet, au niveau collège, ce sont les enseignants des REP+ qui effectuent le plus de HSA, les nouveaux dans l'établissement étant plus nombreux à en réaliser que les autres. L'éducation prioritaire concentre aussi une augmentation en volume d'heures plus notable qu'ailleurs. La DEPP l'évalue, entre 2018 et 2019, à +21 % en REP+, alors que la hausse générale des HSA est presque 3 fois moins importante hors éducation prioritaire (+8 %). Cette augmentation dans les établissements en REP+ "a contribué à la stabilité du nombre d'heures d'enseignement par élève". C'est aussi là que la proportion des enseignants qui font 2 HSA ou plus a augmenté le plus entre 2018 et 2019.
L'impact de la réforme du lycée sur la répartition des HSA
Pour autant, c'est au lycée que les enseignants font le plus de HSA, les enseignants de CPGE et de STS étant ceux qui en font le plus (3 HSA en moyenne). Mais au lycée, ce qui est le plus notable, c'est l'impact de la réforme, puisque celle-ci, note l'auteur, "a entraîné une redistribution des heures données selon les différents champs disciplinaires en lien avec la diversification des parcours des élèves de première générale et de leurs choix d'enseignements de spécialité".
Si ce sont les enseignants qui ont des disciplines dans les domaines de la production et des services dans la voie technologique qui en font le plus, la réforme a aussi eu un impact sur la répartition des HSA dans la voie générale : ainsi, les enseignants de physique-chimie et de biologie-géologie ont eu davantage d'heures à assurer en première générale du fait de la création de l'enseignement scientifique et des enseignements de spécialité "physique-chimie" et "sciences de la vie et de la Terre", tout comme les enseignants en anglais (enseignement de la spécialité "langues, littératures et cultures étrangères"). A contrario c'est "moins le cas des autres professeurs de langues" et les enseignants de lettres, d'éducation musicale, tout comme les professeurs de sciences économiques et sociales ont vu leur nombre de HSA diminuer, baisse pour ces derniers "s'expliquant en partie par la suppression de la filière ES", analyse l'auteur.
Un gain annuel de 3550 euros pour les hommes contre 2850 euros pour les femmes
Enfin, l'auteur observe aussi un différentiel de rémunération entre hommes et femmes pour la réalisation de ces HSA, le gain annuel moyen parmi les agents en réalisant étant de 3550 euros pour les hommes contre 2850 euros pour les femmes. Cet écart est davantage dû au fait que les femmes effectuent en moyenne moins d'heures supplémentaires que les hommes (environ 1,5 HSA pour les premières contre environ 1,8 HSA pour les seconds) qu'au fait que la part de ces dernières est moins forte dans les corps les mieux rémunérés (sachant que la rémunération d'une HSA varie selon le corps et le grade).
Au total, la DEPP estime, pour l'année scolaire 2019-2020, que le service moyen d'un enseignant du second degré (public et privé confondus) a été de 18 heures et 23 minutes, dont 1 heure et 30 minutes de HSA.
La note d'information "Les heures supplémentaires annualisées des enseignants à la rentrée 2019 dans le second degré" ici
Camille Pons