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Une proposition de loi veut créer la fonction, mais non le statut, de directeur d’école

Paru dans Scolaire le mardi 19 mai 2020.

Le groupe parlementaire La République en marche de l’Assemblée nationale a déposé une proposition de loi créant "un emploi fonctionnel pour les directeurs d’école" (ici). Pour les députés signataires, cette proposition vise à améliorer les conditions d’exercice d’un métier (celui de directeur d’école NDLR) et "à reconnaître cette fonction essentielle au bon fonctionnement des écoles". Pour ses promoteurs, la proposition de loi doit permettre aux directrices et directeurs d’être mieux formés et mieux accompagnés. Il s’agit, selon eux, de reconnaître une fonction pleine et entière qui mérite toute l’attention de l’institution, qui en valorise les acteurs et qui confirme la priorité donnée à l’école primaire. Mais, soulignent-ils d’emblée, il n’est aucunement question de mettre en place un nouveau corps ou un nouveau grade. Ils précisent même que le responsable hiérarchique demeure l’inspecteur de l’éducation nationale (IEN) pour les enseignants et la commune pour les personnels municipaux.

Pourquoi ces précautions ? Pour l’historien de l’éducation Claude Lelièvre (ici) : il est prévu dans le projet de loi que les seuils des décharges de classe seraient abaissés, leurs durées augmentées, ainsi que les indemnités de direction, et il ne s'agit plus cette fois-ci de créer un "statut" de directeurs d'école. Il fait le rapprochement avec l’opposition déterminée d’une grande majorité des instituteurs au statut de "maître-directeur» instauré par la droite en 1987 et abrogé par la gauche en 1988. Pour sa part, le SE-UNSA va dans le même sens  (ici) : la proposition ne franchit pas "des lignes rouges, notamment celle d’une fonction hiérarchique comme l’avaient un temps envisagé une mission Flash en 2018 ou le projet d’Établissement public local d’enseignement des savoirs fondamentaux (EPLESF) qui avait soulevé la colère des enseignants au printemps 2019".

Cependant, pour le SNUIPP-FSU (ici), "même si le mot statut n’est pas prononcé, c’est bien de l’autorité du directeur ou de la directrice d’école dont il est question. La "délégation de l’autorité académique" et l’affirmation que le.la directeur.trice a autorité sur les personnels définissent le cadre d’exercice de la fonction en l’inscrivant, d’une certaine manière, dans la chaine hiérarchique avec un pouvoir décisionnel affirmé. Le passage sur les pouvoirs du ou de la directeur.trice en cas de dysfonctionnement grave l’illustre bien." Pour le syndicat, sous couvert de répondre à de légitimes préoccupations, on voit se dessiner un projet qui va bien au-delà de "vouloir" satisfaire des besoins, des demandes, des revendications. Il poursuit : "Pour mettre en œuvre une politique éducative ministérielle notamment, mais pas seulement, et s’assurer de sa bonne application, il faut bien un.e pilote au plus près des personnels et pleinement investi.e d’une 'délégation de l’autorité académique' pour pouvoir imposer les normes. Des normes qu’il ou elle n’aura d’ailleurs, pour la plupart d’entre-elles, pas définies lui.elle-même et dont on sait, pour certaines, qu’elles ne sont pas réalisables." Le SNUIPP développe sa démonstration ainsi : "l’autorité du directeur ou de la directrice d’école doit donc être posée à l’instar des chef.fes d’établissement du second degré. La référence est explicite tout comme à celle de l’exception française dans l’OCDE. Cette proposition de loi accentue de fait le 'new public management' dans le 1er degré, mettant à mal notre fonctionnement qui place au cœur l’équipe enseignante comme collectif de travail".

Le SE-UNSA fait part de ses réserves (ici). D’une part, les caractéristiques d’un "emploi fonctionnel" qui existe déjà dans la Fonction publique et donc à l’Éducation nationale, si elles devaient être transposées à la fonction de direction d’école, pourraient se concrétiser par des nominations à la discrétion du Dasen et une obligation de mobilité. Par ailleurs, la notion de "délégation de l’autorité académique" au directeur, s’il est précisé qu’elle concerne le "bon fonctionnement de l’école", doit être définie.  En outre, cette loi envisage des évolutions pour lesquelles l’exposé des motifs est souvent plus prometteur que les articles eux-mêmes. Pour l’organisation syndicale, "des dispositions présentées dans l’exposé des motifs ne relèvent en effet pas de la loi mais de textes règlementaires ultérieurs : c’est le cas des décharges ou de la rémunération. Pour devenir réalité, ces mesures nécessitent un engagement à les réaliser de la part du ministère de l’Éducation nationale". En revanche, martèle-t-il, cette proposition de loi écarte la question de la structuration et du fonctionnement de l’école. Pour le SE-UNSA, "c’est pourtant un des leviers pour la réussite des élèves et la sérénité des équipes pédagogiques".

 

 

Arnold Bac

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