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Effets du confinement et perspectives : Alain Bouvier persiste et signe, nonobstant la critique de Paul Devin

Paru dans Scolaire le jeudi 30 avril 2020.

Alain Bouvier persiste et signe. L'ancien recteur vient d'adresser à la presse une nouvelle charge contre les partisans du statu quo éducatif. En voici des extraits significatifs, même s'ils ne sont le reflet du ton, plutôt véhément, de l'auteur.

Ceux qui espèrent "voir le bout du tunnel" ont tort. "Nous ne sommes pas encore au milieu du gué (...). Au Québec il se dit que le temps de transition pourrait être de 12 à 18 mois". L'auteur de "Propos iconoclastes sur le système éducatif français", ajoute que "l’enseignement à distance ne fait que révéler un peu plus les problèmes qui étaient là bien avant (...). Nous avions, en gros, 25% des élèves en difficulté, voire en très grande difficulté. Ils le sont encore plus aujourd’hui (...) ; mais ce n’est pas une raison pour que les 75% d’autres élèves ne puissent pas apprendre à leur rythme propre."

Autres problèmes : "Le grand nombre de devoirs que reçoivent certains élèves, objets d’aucune coordination (...) ; les incohérences des consignes que donnent les divers enseignants (...) ; l’absence de coordination des évaluations et leur manque de cohérence, etc. (...) Des élèves sont perdus de vue, mais des enseignants aussi ! (...) Cela se voit (...) et donc des parents ne vont pas tarder à créer des sites de notation des professeurs."

D'autres enseignants au contraire, ont innové et "ont littéralement profité d’un effet d’aubaine qui durera encore quelque temps. Ce qu’ils proposent se raffine, se complexifie heureusement, convient de plus en plus aux parents qui, à leur tour, s’engagent davantage." Et, ajoute-t-il, on ne peut pas affirmer que l'enseignement à distance n'est pas efficace. "Depuis 1950, existe en Australie un remarquable enseignement totalement à distance jusqu’à l’entrée de l’université. Qui oserait dire que ces élèves australiens n’apprennent rien ?" D'ailleurs, "les taux d’accès aux ENT ont été multipliés par 100". "Paradoxalement, l’enseignement à distance rapproche les personnes et au gré des acteurs, il a fonctionné même les samedis, les dimanches et pendant le temps dit de vacances de printemps (...). En 5 semaines, sur le plan des compétences professionnelles, les enseignants ont progressé. Leur niveau de maitrise des outils, très variable d’une personne à une autre, s’est d’abord avéré curieusement beaucoup plus bas que ce l’on pouvait imaginer (...). Une fois dépassé le constat initial que les ENT sont tristement peu performants, ils ont été boostés comme l’ont dit et sont arrivés à devenir une ressource mais un peu misérable parmi les autres, plus simples, plus efficaces et abondamment utilisées ; ces derniers resteront dans le paysage éducatif, à commencer par You Tube, WhatsApp, Discord... Le marché de l’éducation a ainsi été rendu visible, même aux yeux de ceux qui ne voulaient pas le voir et qui en niaient presque l’existence." 

"Actuellement l’école est à la maison et la perspective pour le futur c’est que la maison soit plus présente à l’école lorsqu’un temps nouveau sera venu : les conséquences seront lourdes et longues à intégrer (...). Nous ne pourrons pas éviter de nous demander si, comme certains le disent, nous entrons dans une nouvelle civilisation qui serait plus écologique, plus humaine et même, je me risque à le dire, plus humaniste. Nous en sommes seulement à préparer un déconfinement confus, complexe, en absence de tout consensus, sous la crainte des répliques de l’épidémie, en sachant que le virus sera encore là et pour très longtemps."

Le point de vue de Paul Devin (SNPI-FSU)

A noter que Paul Devin avait vivement réagi à la tribune précédente d'Alain Bouvier et à la "formulation prophétique" d'un propos "fondamentalement ultralibéral". "L’école à distance permettrait de pratiquer de véritables suivis individualisés, rendant visible ce que le collectif de la classe empêchait de percevoir." Pourtant, rappelle le secrétaire général du syndicat FSU des inspecteurs du 1er degré, "il y a bien longtemps que de multiples travaux de recherche se sont interrogés sur la question de la prise en compte des difficultés individuelles dans un contexte d’enseignement collectif" et "personne ne peut raisonnablement opposer apprentissages et socialisation", ni nier que les apprentissages ont une dimension sociale. Mais surtout, il ne suffit pas de faire des parents des alliés : reste l’obstacle "des écarts culturels entre l’école et les classes populaires". Pour l'inspecteur; "le modèle libéral d’une école mise en marché suppose, en réalité, de renoncer à la démocratisation" et "n’avoir cure de l’égalité".

Le texte d'Alain Bouvier ici

Le blog de Paul Devin ici

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