Exclusif - Ce que le confinement peut apporter de positif aux élèves (Pascale Haag)
Paru dans Scolaire le mercredi 15 avril 2020.
"C'est une expérience inédite et cela ajoutera à mon vécu et à mon expérience", ou "Même si il peut y avoir des tensions, c'est globalement très sympa de se retrouver avec les membres de sa famille". Ce sont deux réponses de lycéens à une enquête lancée par le laboratoire BONHEURS (université de Cergy) sur la façon dont la situation actuelle affecte le quotidien des élèves, sur ce qui leur manque le plus. Pascale Haag (École des hautes études en sciences sociales) a cherché dans leurs réponses les "éléments positifs" et a communiqué à ToutEduc ses conclusions. Sur les 672 premiers questionnaires renseignés par des élèves de tous niveaux, du CP à la terminale, un peu plus de la moitié, 365, ont en effet apporté une réponse intéressante à la question ouverte "Pensez-vous retirer des éléments positifs de cette période ?"
C'est d'abord le gain d’autonomie (100 réponses sur 365) : "J'apprends que je suis autonome et peut-être prêt pour la 6e" (élève de CM2) ; "Nous avons appris à faire nos cours et devoirs de manière autonome, ce qui peut être un avantage pour nos futures écoles et universités" (élève de Terminale).
Vient ensuite le sentiment que ce temps de pause s'accompagne d'une diminution du stress, d'une meilleure alimentation et d'un rythme de sommeil qui leur convient mieux (98 réponses) : "écouter beaucoup de musique, faire des choses qu’on se dit jamais avoir le temps de faire, ne pas être pressé, dormir plus longtemps, réfléchir" (élève de 2nde) ; "on n'est pas obligé de se réveiller tôt, on peut s'endormir plus tard" (élève de CM2).
Ils sont presque autant (85) à souligner que cette période est l’occasion de nouveaux apprentissages : "Tout est positif : on fait plus d'activités manuelles ou cuisine, des activités scientifiques" (élève de CM2) ; "cette période nous pousse à beaucoup mieux nous organiser et à développer de nouvelles compétences informatiques" (élève de 1re).
Le confinement est aussi l'occasion de passer plus de temps en famille, ce que jugent positivement 68 des répondants : "Je passe plus de temps avec ma mère qui travaille beaucoup d'habitude" (élève de CM2) ; "même si il peut y avoir des tensions, c'est globalement très sympa de se retrouver avec les membres de sa famille" (élève de Terminale).
C'est aussi un temps propice à la réflexion, à l’introspection, estiment 63 élèves : "On réapprend à avoir le temps. Celui de parler aux autres, de retrouver le contact humain, les plaisirs simples de la vie quotidienne, celui de SE retrouver, et de s'occuper de soi" (élève de 2nde).
Enfin, 18 élèves évoquent un moment de "répit pour la planète" et 12 autres une occasion de manifestations de solidarité aussi bien au sein de la famille qu’entre les élèves de la classe ou avec les soignants. L'auteure, par ailleurs co-fondatrice de la Lab school Network, note l'absence de différences significatives entre les réponses des filles et des garçons, ni entre celles d’élèves de différents types d’établissements (publics, privés sous contrat ou hors contrat), mais davantage en fonction de l’âge : les enfants d’élémentaire évoquent davantage la famille et le plaisir d’être chez soi, tandis que les collégien(ne)s et les lycéen(ne)s soulignent davantage le gain d’autonomie. Elle ajoute qu'à une autre des 42 questions qui leur étaient posées, "quand les établissements scolaires seront rouverts, aimeriez-vous qu'une partie de l’enseignement continue d’être à distance ?", 68 % répondent négativement, 29 % disent souhaiter qu’une partie des cours puisse se poursuivre à distance lorsque le confinement prendra fin et 3 % ne savent pas.
Cette étude, qui doit être prolongée et affinée avant de faire l'objet d'une publication, s'inscrit dans le cadre d'une enquête lancée le 21 auprès d'élèves de collèges publics à l’initiative de François Durpaire (laboratoire BONHEURS, "bien-être, organisation, numérique, habitabilité, éducation, universalité, relations, savoirs", université de Cergy, ici) et Jean-Louis Durpaire (inspecteur général). Le questionnaire a été adapté pour permettre à tous les élèves de s’exprimer, de l’élémentaire à la Terminale, du public ou du privé, sous et hors contrat et il a été mis en ligne du 1er au 11 avril.