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Continuité pédagogique : un temps pour repenser les logiques pédagogiques et la bienveillance (Lettres Vives)

Paru dans Scolaire le mardi 14 avril 2020.

Il faut "vivre et construire le confinement pédagogique collectivement" déclare le collectif Lettres Vives dans une longue analyse des postures d’enseignants durant le confinement : le confinement et l’exigence intransigeante de continuité pédagogique ont en effet, estime-t-il, mis chaque enseignant dans une situation inédite d’isolement professionnel, social et humain. Chacun a continué de son mieux son travail, avec son lot de réussites et d’erreurs, de satisfactions et d’angoisses, avec le même souci de bien faire, en tentant de conserver des repères rassurants dans ce désordre anxiogène.

Mais certains ont, à cette occasion, mis en cause la notion de bienveillance "qui aurait donné le goût de la fainéantise aux élèves, le goût du moindre effort", alors que la "continuité pédagogique" met cruellement en lumière les inégalités entre les élèves. Pour les rédacteurs du texte, cette notion est caricaturée par les contempteurs de la pédagogie : comme si être pédagogue - dans son sens étymologique celle ou celui qui accompagne l'élève à l'École – était un mot tabou et comme si la bienveillance ne se conjuguait pas avec l'exigence. 

"Pourquoi donc la bienveillance envisagée comme posture professionnelle dérange-t-elle autant ?" A cette question, le collectif Lettres Vives propose deux réponses. La première : la bienveillance implique une appréhension de l'élève comme une personne complexe, qui peut se réaliser et s'épanouir si on lui offre les moyens de s'exprimer. Or, pour beaucoup, l'école républicaine c’est la méritocratie. Dès lors, la bienveillance serait perçue comme un leurre qui empêcherait les élèves et leurs familles de se confronter à la seule réalité qui compterait : leur niveau scolaire. C'est alors la conception d'une École fondée sur la compétition et la sélection qui est promue, dont les moteurs sont le stress et la peur de la note pour l'élève, la culpabilité et l'inquiétude pour les parents, l’obligation de notation pour les enseignants.

Seconde réponse : cette crainte de la bienveillance ferait écho à un regard archaïque et patriarcal, méprisant et rempli de peur, sur l'enfant et l'adolescent, "ces êtres non finis qu'il s'agirait de faire obéir et de dresser". En ce sens, la bienveillance est comprise comme une absence de cadre, de lois, mais aussi comme une sorte de niaise douceur à l'égard des enfants. Elle serait évidemment synonyme de "démagogie". Ce mépris pour la bienveillance éducative révèle plus largement celui avec lequel sont traités les enfants. Il n'y aurait qu'à voir à quel point leurs droits, pourtant constitués, sont régulièrement bafoués, à l'École comme ailleurs. Dans l’espace public et dans la réflexion politique, ce serait une place minuscule, ridicule même, que l’on accorderait au bien-être et à la parole des enfants.

Le collectif Lettres Vives souhaite que "la vigilance dont les professeurs font preuve en temps normal ne disparaisse pas en temps de confinement" et que chacun "n’exige pas des jeunes une continuité d’apprentissage tout aussi impossible que la continuité pédagogique". Ce moment est un temps de pause "face à ces diktats que sont la note et la performance, un temps pour repenser ensemble nos logiques pédagogiques afin, le mieux possible, de mettre en leur cœur des démarches permettant de tisser du lien humain et pédagogique". Et de conclure qu’il est impossible de faire et de penser "comme d’habitude". Et d’appeler à être, "dans nos bricolages, du mieux que nous le pouvons", "des maîtres et des maîtresses" rassurants, bienveillants et humains.

Le site ici

 

Arnold Bac

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