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Le confinement révélateur de l'attachement des enseignants à leurs élèves (web pédagogique)

Paru dans Scolaire le lundi 30 mars 2020.

"En quelques mots, qu'est-ce qui vous serait le plus utile pour rester un bon prof durant cette période ?" a demandé à ses lecteurs le Web pédagogique (ici). Réponse de l'un d'eux : "Si je savais..." Et un (ou une) autre : "Du prozac!", ou, version plus soft, "Du chocolat !!!" ToutEduc a lu les quelques 900 réponses qu'a reçues notre partenaire, et ces trois là sont, dans leur brièveté, parfaitement représentatives de l'état d'esprit général.

Premier enseignement : les enseignants sont très soucieux de leurs élèves. Impossible de compter le nombre de ceux qui s'inquiètent de la fracture numérique et des conditions matérielles auxquelles sont confrontés ces enfants et ces jeunes. Et ils éprouvent douloureusement un sentiment d'impuissance. "Nous pouvons nous agiter dans tous les sens, les familles défavorisées seront les plus atteintes", écrit l'un.e. Un.e autre : "Certains n'ont que le smartphone de leur parent. D'autres ont un ordi mais sans connexion ou encore il doit être partagé avec les frères et soeurs (au collège et lycée les élèves en ont besoin quasi à la journée donc les plus jeunes n'ont plus rien...)." Il faudrait avoir "le don de voyance pour savoir dans quelles conditions ils travaillent", répond un.e autre.

Mais ils sont confrontés à leurs propres limites, telle cette mère de famille qui s'écrie : "Ne pas être surchargée par la dose de travail que les collègues envoient à mes trois enfants." Leurs difficultés sont souvent liées à l'utilisation du matériel informatique. Il faut "du matériel performant", "Une vraie préparation en amont à tout un tas d'outils numérique que l'on découvre au hasard des recherches." Il faudrait aussi pouvoir, dit un.e autre, "imprimer leurs productions, car corriger sur un écran, ce n'est pas facile et beaucoup plus long".

Et ils culpabilisent de ne pas faire assez : "On se culpabalise de ne pas tout faire et on est perdu", il faudrait avoir "la sagesse de ne pas trop en demander aux élèves".

Ils sont nostalgiques de la classe : Comment "savoir expliquer sans public en face, donc dans le vide" ?  Il faudrait "un contact visuel, le ressenti immédiat que je n'ai pas à travers le poste et qui me permet de détecter les difficultés". Un.e autre demande "davantage de retour sur le travail scolaire. Les élèves communiquent bien mais je n'arrive pas à connaître leurs difficultés à moins de les appeler moi-même !"

Ils cherchent des solutions pour compenser, pour établir "un lien plus fort avec (leurs) élèves". "Le fait d'en appeler certains par téléphone pour régler des problèmes informatiques m'a rassurée et les a rassurés. Ils ont besoin de savoir que leurs enseignants sont là pour travailler correctement." Mais ils ont parfois le sentiment de boxer dans le vide: "Un accusé de réception pour les mails ! J'ai l'impression de harceler mes élèves car certain.e.s ne font pas le travail et je leur envoie mille mails. J'aimerais savoir s'ils les reçoivent ou si je dépense de l'énergie dans le vent !"

Leurs demandes à la hiérarchie peuvent sembler contradictoires. Il faudrait "des consignes claires et fréquentes de nos chefs, du ministre", "avoir des infos claires concernant la mise en oeuvre du bac....", avoir "des consignes claires sur les obligations d'avancer dans le programme" ou de "faire des révisions". Mais il faudrait aussi "que le rectorat et le proviseur arrêtent de nous dire ce qu'il faut faire et nous laissent travailler entre collègues pour assurer notre travail au mieux auprès des élèves". Jean-Michel Blanquer n'est pas épargné, il faudrait "un ministre qui se taise", ou "un discours humain et cohérent du ministre !" En réalité, les enseignants demandent à la fois un cadre national et une "LIBERTE TOTALE PEDAGOGIQUE", comme l'écrit en majuscules un.e enseignant.e. "Me laisser la liberté de faire comme je le sens", écrit un.e autre.

Et, surtout, les invariants demeurent : Les enseignants voudraient

- avoir "moins d'élèves à gérer (208 en temps normal c'est lourd mais alors là, ça devient extrêmement lourd, voire carrément trop et ingérable)",

- avoir du temps "pour réfléchir sur l'enseignement à distance : qu'est-ce qu'on veut transmettre ? comment ? qu'évalue-t-on ?"

Ils voudraient "des parents qui s'occupent de leurs enfants, des élèves qui s'entraident et une hiérarchie qui ne (les) fliquent pas mais (leur) fait confiance".

Ils voudraient de la considération : "Sans nous applaudir aux fenêtres, de la reconnaissance ... et une augmentation." Un.e autre : "Des compliments ou des mots pour rassurer de la part de l'inspecteur."

Comme tous les vrais professionnels, ils doutent d'être bons. "Etais-je déjà un bon prof avant cette période ?", demande l'un. "On bricole tous, personne n'est préparé, ni parents, ni profs, ni élèves", constate un.e autre. "Je suis en mode McGyver", s'amuse un troisième. Et plusieurs doutent qu'il soit possible d'être un "bon prof" virtuel.

Ils veulent "pouvoir continuer d'accompagner ceux qui en ont le plus besoin", "maintenir le lien par contact téléphonique, sms, mms, messenger", "avoir la possibilité d'interagir avec tous les élèves".

Il leur faut "du paracétamol pour lutter contre les maux de tête liés à l'usage ++++ des écrans", "du courage, du temps, du calme"...

Et ils veulent "retourner à l'école ! Être prof ce n'est pas enseigner à distance !", "Que ça s’arrête !!". Encore faut-il "ne pas être victime du covid 19"...

A noter cette suggestion : "Tatouer les codes Pronotes de mes élèves sur leur main ! Ca m'éviterait bien des coups de fil aux parents..."

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