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Parcoursup : des progrès en termes d'affectation, pas d'orientation (point de vue de chercheurs)

Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 18 juin 2019.

L'Ajeduc, l'association des journalistes spécialisés en éducation, avait invité, ce 18 juin, trois universitaires, Vincent Lehlé (Rouen), Even Loarer (CNAM) et Paul Lehner (Cergy-Pontoise) à présenter de premières conclusions sur le fonctionnement de Parcoursup. La plateforme a pour ambition d'améliorer l'affectation des élèves, ce qu'aurait suffi à faire une version corrigée d'APB, dont le principe se retrouve dans de nombreux pays, mais aussi de "réinjecter de l'orientation dans l'affectation et la sélection" (E. Loarer) selon une logique qui n'est développée nulle part ailleurs. Le choix pour les candidats qui n'établissent pas de classement a priori de leurs voeux se fait en effet "au fil de l'eau" (V. Lehlé), au fur et à mesure du dialogue avec les établissements qui ont, pour leur part, la possibilité de classer, et donc de choisir leurs futurs étudiants.

C'est ce "fil de l'eau" qui fait difficulté pour les trois intervenants. La phase de choix est trop courte pour avoir une véritable maturation, d'autant que les "psy-EN" qui pourraient accompagner les élèves sont marginalisés. Le nombre de postes mis au concours a d'ailleurs été réduit. Quant aux candidats, ils sont amenés à se connecter constamment pour voir comment évoluent les réponses qui leur sont adressées, et beaucoup d'entre eux sont très démunis, incapables de déceler les mécanismes sous-jacents s'ils ne sont pas aidés, ce qui tend à renforcer les inégalités (P. Lehlé), alors que le processus devrait amener progressivement à une convergence entre les établissements d'enseignement supérieur et les demandes des lycéens.

Dépossédés de leur avenir

Ceux-ci se trouvent donc dans une situation d'incertitude qui peut être insupportable alors que c'est, pensent-ils, toute leur vie qui se joue (E. Loarer). Ils ont le sentiment d'être "dépossédés de leur avenir" tandis qu'ils entendent partout vanter leur autonomie, leur auto-détermination. Bien des établissements privés l'ont compris, leur disent "On vous prend tout de suite" et leur proposent de quitter Parcoursup, à leur plus grand soulagement (P. Lehner).

Pour y remédier, il faudrait sans doute davantage de transparence sur les critères des établissements : quelle place pour les boursiers ? Y a-t-il des quotas ? Les notes sont-elles "redressées" en fonction de la réputation du lycée... ?. Privilégie-t-on les candidats qui résident à proximité, ou ceux qui ont les meilleures notes ? (V. Lehlé).

Le rôle du lycée

Faudrait-il de plus raccourcir les délais pour limiter cette phase angoissante, ou privilégier le temps long de la maturation des choix ? C'est bien en amont qu'il faudrait une véritable éducation à l'orientation, qui n'a rien à voir avec l'information, les deux notions étant régulièrement confondues et les 54h prévues pour l'accompagnement à l'orientation étant dévolues à l'information. A moins que l'orientation ne soit que "la fabrication du consentement". Mais, outre la question de la formation des professeurs principaux à jouer ce rôle, se pose celle du sens même du lycée. Celui-ci est conçu pour amener les élèves aux classes préparatoires et aux grandes écoles (P. Lehner). Est-il possible d'imaginer une année non de propédeutique, mais de stages et de découverte de ce qu'est l'enseignement supérieur ? Un bon élève de lycée fera-t-il un étudiant autonome ?

S'ils ne condamnent pas Parcoursup, les trois chercheurs jugent qu'il est urgent d'investir dans l'éducation à l'orientation plutôt que dans des systèmes d'information sur l'orientation.

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