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Culture scientifique : dans l'académie de Toulouse, des élèves de cycle 3 se transforment en chercheurs

Paru dans Scolaire, Orientation le lundi 10 juin 2019.

"Voici le résumé de toutes les contraintes lunaires auxquelles on a répondu : pour [compenser] l'absence d'oxygène, un dôme [en polycarbonate, matériau transparent et très résistant] avec un diffuseur d'air, pour le manque de nourriture, la plantation d'un potager sous serre, pour le manque d'eau, il faudra faire fondre l'eau glacée de la Lune, pour le manque d'électricité utiliser l'énergie solaire, pour la perte musculaire installer des escaliers et une salle de musculation...". Ça, c'est le collège "Amstrong" imaginé sur la Lune par les élèves de l'école Marie Laurencin et du collège Jean Rostand de Balma (Haute-Garonne). Ils l'ont présenté au Congrès scientifique des enfants à la Cité de l'Espace à Toulouse, le vendredi 7 juin 2019, en présence de Claudie Haigneré, astronaute de l'Agence spatiale européenne (ESA, European space agency). 8 groupements d'établissements, chacun liant des élèves de CM1-CM2 d'une école à des élèves de 6e d'un collège, ont participé à ce projet, imaginé il y a maintenant 10 ans par la Cité de l'Espace, et dont le Rectorat, le CNES, la MGEN et l'Université fédérale de Toulouse sont partenaires. L'initiative consiste à accompagner, de janvier à juin, des groupes d'élèves assistés de leurs enseignants pour qu'ils élaborent un projet de recherche autour d'une thématique nouvelle chaque année, et à les préparer à tenir un rôle de congressiste scientifique pour venir présenter, durant une journée, leurs travaux, leurs résultats et défendre leurs idées, comme tout vrai chercheur.

Cette année, depuis novembre 2018, environ 500 élèves âgés de 9 à 11 ans, ont été confrontés aux problématiques liées à l'environnement lunaire et et développé des solutions scientifiques pour imaginer leur collège sur la lune, thème choisi pour célébrer le cinquantenaire de la première mission qui a marché sur la Lune, celle d'Apollo 11. Ils ont été accompagnés par des doctorants de l'Université de Toulouse tout au long du projet, notamment sur la méthodologie de recherche et la présentation orale à faire au Congrès, en complément du poster et de la maquette qu'ils avaient à réaliser.

Expérience d'adulte pour prendre conscience qu'on peut faire des métiers que l'on imagine pas

"L'idée était d'essayer de parler des métiers scientifiques", explique Christophe Chaffardon, le responsable des activités éducatives de la Cité de l'espace qui a conçu et organisé l'évènement. "On connaît souvent le côté expérimental, des chercheurs en blouse blanche, mais moins un autre aspect, les congrès à l'occasion desquels ils présentent les résultats de leurs travaux à leurs collègues. Dans ce monde, il n'y a pas de hiérarchie, c'est entre chercheurs que se valident les travaux, que se font des améliorations, se nouent des collaborations..." Il a donc choisi de "mettre des enfants en situation d'adultes, en organisant le même type d'événements, où ils sont à la fois intervenants et auditeurs".

L'objectif premier est évidemment de "susciter des vocations scientifiques en donnant à voir un aspect du métier, auquel se greffe un objectif éducatif au sens large : proposer une expérience d'adulte pour qu'ils prennent réellement conscience qu'ils peuvent faire des choses qu'ils n'imaginent pas", poursuit le responsable des activités éducatives. À ce titre, la Cité de l'Espace et l'Éducation nationale disent veiller chaque année, dans la sélection des candidatures d'établissements à assurer "une diversité sociale et une diversité géographique", les projets étant ouverts à l'ensemble de l'académie de Toulouse.

Déconstruire les stéréotypes de genre

Au-delà du travail en sciences, les enfants sont initiés au travail en équipe, à la collaboration, à répondre à un cahier des charges... Le projet implique aussi "de se documenter sur plusieurs mois, pour la présentation, d'apprendre à structurer ses propos, de s'entraîner à l'oral, de surpasser ses craintes", détaille Christophe Chaffardon. Une démarche qui "leur permet de développer l'estime d'eux-même".

Pour Eric Chenu, le vice-président de la MGEN, "promouvoir la culture scientifique et initier à l'esprit critique" est également "essentiel" dans un monde touché par "l'intox" et un moyen "de déconstruire les stéréotypes de genre". Claudie Haigneré, qui a présenté ses deux missions dans l'espace, sur la station Mir en 1996 et sur la station spatiale internationale en 2001, avant d'échanger avec les jeunes, illustrait aussi la place que les femmes peuvent trouver dans le domaine de la science et de l'ingénierie. Aujourd'hui, précisait la première et unique femme astronaute française à ce jour, on compte 572 femmes astronautes dans le monde, ce qui représente à peine 10 % d'entre eux. Mais parce qu'elles "ne sont que 10 % à se présenter aux sélections"...

Participer à la liaison école – collège

Auparavant dédié aux primaires, le Congrès scientifique des enfants a été ouvert cette année pour la première fois aux collèges, exigence étant que chaque candidature associe plusieurs classes d'écoles à des 6es. Une évolution en lien avec le changement du cycle 3 opéré en 2016 qui associe les niveaux CM1, CM2 et 6e. "C'est aussi pourquoi nous avons choisi le thème du collège sur la Lune", poursuit Christophe Chaffardon. "Via tout un travail sur la façon de vivre ensemble dans un collège - les élèves devaient rédiger une charte de vie commune - c'est aussi un moyen de montrer ce qu'est un collège, de quoi il se compose, etc. Un prétexte pour que les CM1 et CM2 se projettent. Et dès le début de l'année, les élèves se rencontrent, échangent, délèguent les tâches, et les enseignants sont obligés de travailler ensemble."

Pour l'instant, les élèves qui ont participé aux projets n'ont pas fait l'objet d'une étude de suivi permettant d'observer des impacts sur l'appétence pour les sciences et les orientations vers des filières scientifiques. En revanche, les retours informels d'enseignants - "qui veulent souvent revenir l'année suivante", observe Christophe Chaffardon - montrent que "les élèves ont davantage confiance en eux et en leur potentiel".

Depuis sa création, le dispositif a "essaimé" : depuis 2017, d'autres congrès, coordonnés par la Cité de l'Espace, ont été organisés à la Cité des Sciences à Paris, au Jardin des Sciences à Strasbourg et au Planétarium de Vaulx-en-Velin, et, cette année, en Italie avec qui la conférence introductive de Claudie Haigneré a été partagée en visio-conférence. En 10 ans, l'initiative a permis à plus de 3000 élèves de travailler sur un projet scolaire autour d'une thématique scientifique liée à l'espace et à l'astronomie.

Camille Pons

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