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Handicap : le statut d'AESH n'a pas résolu les problèmes de recrutement d'accompagnants mais les futurs contrats de trois ans renouvelables pourraient les stabiliser (Défenseur des droits)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le lundi 29 avril 2019.

"La création d'un statut pérenne d'accompagnant d'élève en situation de handicap (AESH), qui permet un recrutement en CDI, n'a pas résolu à lui seul les problèmes de recrutement et de stabilisation dans l'emploi des AVS." Tel est l'un des constats fait par le Défenseur des droits à l'occasion de son audition par les membres de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005. Cette audition a fait l'objet d'un avis "relatif à l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université", publié le 10 avril 2019. Principale difficulté, ces postes restent "peu attractifs (temps partiels, niveau des rémunérations)", mais, nuance l'avis, les nouvelles dispositions du projet de loi pour une école de la confiance "pourraient contribuer à une meilleure stabilité dans l'emploi de ces personnels, en prévoyant leur recrutement par un contrat de trois ans, renouvelable une fois". Dans cet avis, le Défenseur des Droits identifie d'autres freins à l'inclusion des élèves handicapés, comme le manque d’infrastructures accessibles, l'absence de formation spécialisée des enseignants et des accompagnants, l'inadaptation des programmes scolaires et des salles de classe. L'avis souligne aussi des défaillances et/ou déficit d'évaluation des besoins notamment hors temps scolaire, l'existence de pratiques illégales ou discriminatoires.

En matière d'accompagnement, le Défenseur des droits, au vu des réclamations qui lui sont adressées, souligne aussi un manque de coordination dans le recrutement des AVS entre les rectorats et les établissements d’enseignement privés sous contrat, ainsi que des absences d’accompagnement par des AVS "de nature à compromettre gravement la poursuite de la scolarité de l’élève en situation de handicap". Celles-ci s'expliquent parfois par des "pratiques illégales" de certaines CDAPH (Commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées), qui conditionnent l'octroi d’un AVS aux moyens dont dispose les services départementaux de l’éducation nationale, alors que celles-ci doivent se prononcer sur les besoins de compensation du handicap "indépendamment des moyens nécessaires et disponibles pour y répondre", souligne l'avis.

Encore des représentations discriminatoires au sein des établissements scolaires

L'avis souligne aussi la persistance de difficultés à mettre en place les aménagements de scolarité, y compris sur les temps de sorties scolaires, difficultés (au vu des saisines toujours) rencontrées plus spécifiquement par les enfants présentant un trouble du neurodéveloppement (dys, trouble du comportement, autisme). Si elles traduisent "très souvent" un manque de formation et d'accompagnement des professionnels de l'éducation, elles montrent aussi "encore, trop souvent, une représentation discriminatoire voulant que les enfants en situation de handicap ne relèvent pas du milieu ordinaire", regrette le Défenseur des Droits.

Celui-ci constate aussi des écarts curieux entre les aménagements accordés dans le cadre de la scolarité et ceux accordés dans le cadre des examens puisque des familles se voient opposer des refus d'aménagement d'examen alors que leur enfant bénéficie, durant l'année, d'un aménagement de sa scolarité. Sur ce plan, l'avis identifie trois "responsables". D'abord le manque de formation et d'information des professionnels. La mise en place de formations sur l'éducation inclusive et le soutien individualisé à tous les personnels de l'éducation nationale constituent d'ailleurs l'une des grandes préconisations faites par le Défenseur. Ces professionnels ne savent pas, par exemple, que les aménagements d'examens ne se limitent pas aux seules personnes ayant fait l'objet d'une reconnaissance du handicap par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées), mais peuvent concerner aussi des troubles répondant à la définition du handicap, "comme c'est le cas des enfants présentant un trouble du neurodéveloppement". Celui-ci souligne aussi un manque de sensibilisation des acteurs (jury, organisateurs des examens) à la philosophie générale du dispositif d'aménagement des examens qui vise, "non pas à attribuer un avantage, mais à rétablir l'égalité" mais donne pourtant "lieu à des suspicions à l'égard de l'élève en situation de handicap". Enfin, complexité des demandes et défaut d'information des parents à l'origine de demandes d'aménagement parfois tardives, ne permettent pas toujours de mettre en place ces derniers.

Déficit d'évaluation des besoins de ces enfants hors temps scolaires

Enfin, l'avis souligne un déficit d'évaluation des besoins de compensation et d'accompagnement de l'enfant hors du temps scolaire : d'abord parce que certaines MDPH ne se prononcent que sur les besoins d'intervention lors du temps scolaire, ensuite parce que même celles qui évaluent les besoins hors temps scolaire, ne le font que pour le temps périscolaire et non sur le temps extrascolaires. Outre recommander que les pratiques des MDPH soient "harmonisées afin de garantir l'égalité de traitement", le Défenseur estime nécessaire que l'évaluation globale des besoins se fasse "sur tous les temps de vie".

L'avis souligne aussi des problèmes "récurrents" de financement des aides humaines sur les activités périscolaires, alors que celles-ci "participent au droit de chaque enfant à l'éducation" et qu'il revient à la commune de "mettre en place des aménagements permettant à ces enfants d'accéder à l'ensemble des activités périscolaires", mais aussi de rémunérer les AESH pouvant être mis à leur disposition sur ces temps (code de l'éducation). Mais beaucoup de communes estiment que c'est à l'État de les prendre en charge : elles s'appuient notamment sur une décision du Conseil d'État, qui a considéré, en 2011, qu'il revenait à ce dernier "de prendre en charge les mesures propres à assurer l'accès des enfants handicapés aux activités périscolaires (s'agissant, en l'occurrence, de l'accompagnement par un AVS sur le temps de la cantine)". Notons qu'une des recommandations du Défenseur pourraient permettre d'en finir avec ces problèmes de financement puisque celui-ci suggère le transfert au Ministère de l'Éducation nationale des ressources humaines et financières en matière d'éducation des enfants handicapés.

Enfin, l'avis regrette à ce titre aussi que le mécanisme dit des "aménagements raisonnables" soit méconnu des collectivités. Celles-ci se bornent en effet souvent à refuser l'accueil d'un enfant handicapé, faisant de fait une discrimination, en invoquant des craintes liées à leur sécurité et à celle du groupe, de part l'absence de personnels qualifiés ou encore l'incompatibilité du handicap de l'enfant avec les activités proposées. Or, alors que l'aménagement raisonnable est notamment défini comme étant "les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée", force est de constater que "la plupart du temps, aucun aménagement (ex : aménagement des activités), en dehors d'un renfort en personnel, n'est envisagé".

Surtout, plus globalement, cet avis "encourage" le Gouvernement à passer de l'approche individuelle appliquée actuellement, "qui veut que les enfants handicapés s'adaptent au système scolaire", à une approche générale visant à transformer le système d'enseignement afin que ce soit lui qui "s'adapte aux besoins des élèves en situation de handicap".

L'avis ici

Camille Pons

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