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Educatec - Educatice : Réalité virtuelle en contexte pédagogique : pas avant le lycée et sur des scénarios qui tiennent compte des émotions

Paru dans Scolaire le dimanche 25 novembre 2018.

Utiliser la réalité virtuelle dans un contexte pédagogique nécessite la prise en compte de plusieurs paramètres issus des observations de la littérature scientifique. Parmi eux figurent les émotions qui entrent en jeu dans les processus d'apprentissage. C'est ainsi qu'a été introduite la conférence animée, vendredi 23 novembre 2018 au salon Educatec Educatice à Paris, par Jean-Michel Perron, directeur de la recherche et du développement sur les usages du numérique éducatif (Réseau Canopé) et Julian Alvarez, chercheur associé au laboratoire en design virtuel et urbain (DeVISU, université de Valenciennes), auteur d'une thèse de doctorat intitulée "Du jeu vidéo au serious game : approches culturelle, pragmatique et formelle". Ces deux intervenants proposaient des pistes de réflexion pour le développement de scénarios de jeux en réalité virtuelle dans le système éducatif.

Leur intervention visait à montrer comment la réalité virtuelle, qui est "une expérience sensorielle", doit être abordée dans un cadre éducatif pour "aller au-delà de l'effet wahou" et à la fois offrir "un potentiel pour acquérir des connaissances", mais aussi "un potentiel pour vivre des expériences, pour apprendre des gestes techniques [à ce titre d'ailleurs, la réalité virtuelle se développe dans le cadre de la formation professionnelle, ndlr] et pour contrôler les émotions", précise Jean-Michel Perron. Contrôle des émotions qui peut constituer notamment, indique-t-il encore, de bons entraînements en vue d'améliorer des épreuves à l'oral ou encore des entretiens.

Introduire de la frustration mais pas trop pour ne pas générer des abandons

Les intervenants ont d'abord souligné l'importance de prendre en compte les émotions qui participent à l'apprentissage, afin de susciter la motivation de l'élève. Ces émotions ont été identifiées par différents chercheurs, dont Antonio Damasio, neuroscientifique psychologue et philosophe qui a notamment voulu montrer le rôle de l'émotion et du sentiment dans la prise de décision et comment les émotions permettent de nous adapter à l'environnement.

Julian Alvarez met en avant au moins quatre grands éléments émotionnels à prendre en compte si l'on veut favoriser notamment l'attention, la perception et la mémorisation : "l'engagement, la confusion, l'ennui, qui survient s'il y a trop de confusion, et la frustration". Ainsi, précise-t-il, "si un état de confusion peut être intéressant dans un processus d’apprentissage, si l'on ne permet pas à l'utilisateur de trouver la solution, cet état peut mener à la frustration puis à l'ennui, élément plus dangereux car il peut mener à l'abandon".

Progression dans le jeu et interaction indispensables

À ce titre, il ne faut pas perdre de vue la notion de "progression". Un jeu - et ils en ont fait la démonstration au travers d'un quiz proposé en ligne aux participants depuis l'application Kahoot! - doit ainsi privilégier une possibilité de multiples bonnes réponses au départ, avant de tendre vers des solutions uniques.

Si les chercheurs débattent encore autour de la définition de la réalité virtuelle et des éléments qui doivent la constituer, les deux intervenants s'accordent également à dire qu'il faut introduire trois dimensions dans la réalité virtuelle pour la rendre efficace en terme d'apprentissage : l'immersion, l'interaction et la présence, donc ne pas se contenter de "visites" virtuelles.

Pas avant le lycée

Concernant l'âge ou les niveaux qu'il convient de toucher par ces usages, Jean-Michel Perron prône la prudence, justement parce que le jeu produit des émotions, et il invite à développer, pour l'instant, des productions ne touchant que les lycéens. "Les observations sur ce point ne sont pas stabilisées et il y a encore un débat important autour des écrans", explique-t-il. "Il n'est pas conseillé à des moins de 9 ans d'utiliser des casques de réalité virtuelle, même si de nouveaux outils technologiques simples d'usage se répandent alors que se pose encore la question des effets qu'ils peuvent avoir." Il évoque à ce titre une expérience de réalité virtuelle menée avec une classe de terminale dans un grand espace, où deux élèves ont abandonné très vite, pour des "problèmes d'émotions" et un troisième "pour des nausées". Le réseau Canopé a d'ailleurs développé un jeu virtuel exclusivement dédié aux lycéens et en partenariat avec l'INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale), Corpus 360° (ici), application qui permet un voyage virtuel dans le corps humain.

Concernant les méthodes et ressources qui peuvent permettre aux enseignants de développer des contenus, le réseau Canopé met à disposition des ressources ainsi qu'un "cahier d'expériences" recensant des pratiques d'enseignants en la matière. Julian Alvarez invite de son côté à ne pas hésiter à "détourner" des jeux existants, de la même manière que l'on peut détourner des jeux de rôles ou de plateau, à l'instar de "Keep talking and nobody explodes", qui permet de "travailler à la fois sur des aspects de communication, de description, la langue française et la capacité à respecter un leadership".

Camille Pons

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