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Les directeurs d'école menacés par l'épuisement professionnel (enquête G. Fotinos, M. Horenstein)

Paru dans Scolaire le mardi 06 novembre 2018.

Près de 24 % des directeurs d'école présentent des troubles correspondant à un "burnout cliniquement significatif", contre 14 % pour les personnels de direction du 2nd degré, 9 % des IEN, et 4 à 7 % dans les autres milieux professionnels, calcule José Mario Horenstein. Le psychiatre a mené l'enquête sur "le Moral des directeurs d'école en 2018" et il fait remarquer que ce type de données n'apparaît pas dans le "bilan social" de l'Education nationale, puisqu'il ne s'agit pas d'une "maladie" donnant lieu à un congé identifié comme tel. Georges Fotinos, auteur déjà de plusieurs études sur le climat scolaire et sur le moral des personnels, attire l'attention sur la gravité d'une situation qui échappe à l'administration et qui touche une part essentielle de l'encadrement intermédiaire.

L'enquête a permis de recueillir au printemps dernier, les réponses de 7 365 directeurs d'école (sur quelque 50 000) et certaines données sont positives. 54 % d'entre eux estiment que le climat de leur école est "bon", voire "excellent", même si près d'un sur deux pense qu'il s'est dégradé. Les relations avec l'inspecteur de circonscription se sont considérablement améliorées, ils sont 68 % à se sentir écoutés contre 37 % en 2004, ils sont deux sur trois à être satisfaits de leurs relations avec leur hiérarchie. "Quelque chose a changé", commente G. Fotinos. Ils ont le soutien de leurs collègues en cas de difficulté (80 %), l'équipe de l'école est solidaire.

Mais un sur deux évalue sa charge de travail hebdomadaire à 50h et plus (94 % pensent que la situation s'est dégradée). Ils se plaignent de l'inadaptation de leurs outils informatiques dans les mêmes proportions et bien davantage de leurs possibilités de formation (84 % ne les jugent pas satisfaisantes). A 90 %, ils se plaignent des réformes : Il y a trop de changements et pas assez de continuité dans la politique éducative. Ils sont deux sur trois à avoir le sentiment de ne pas pouvoir faire entendre leur voix et que les décisions sont "prises d'en haut".

L'adaptation de l'école aux besoins des élèves s'est dégradée

S'ils sont satisfaits des progrès en termes de laïcité, ils ne sont qu'un tiers à penser que l'égalité filles-garçons a progressé, 15 % à estimer que "les valeurs de la République se sont affermies", 22 % que "la mixité sociale a progressé", et surtout, pour 58 % d'entre eux, l'adaptation de l'école aux besoins des élèves s'est dégradée. Au cours de l'année scolaire dernière, ils étaient plus d'un sur deux à dire qu'ils avaient été insultés (quatre fois sur cinq par des parents, contre six fois sur dix en 2011). Certains (6 %) ont même reçu des coups, 3 fois plus qu'en 2011.

Ils sont encore un sur quatre à dire qu'ils ont été harcelés (par des parents, mais plus d'une fois sur quatre par des enseignants) et presque autant à dire qu'ils ont subi une forme d' "ostracisme de la part des personnels", un chiffre que Georges Fotinos juge particulièrement alarmant. Au total il note "une forte augmentation des insultes et du harcèlement", "des agressions commises par les parents", mais une diminution du harcèlement par des enseignants et des insultes provenant des élèves (de 22 % à 15 %).

L'enquête révèle aussi une dégradation des relations avec les mairies, dont ils étaient 21 % à dire qu'elles étaient dégradées en 2004, à peine plus en 2013, mais 41% en 2018, une évolution que l'auteur attribue au "traumatisme" de la réforme des rythmes scolaires. De plus, les directeurs d'école se sentent peu reconnus et ont peu de perspectives de mobilité.

Peu de différences avec l'éducation prioritaire

A noter encore qu'à la plupart des questions posées, les réponses ne sont pas sensiblement différentes en REP, REP+ ou hors éducation prioritaire.

Les directeurs d'école étaient invités à proposer des mesures susceptibles d'améliorer leur moral professionnel. La demande d'avoir un statut pour eux-mêmes et/ou pour l'école est récurrente, de même que celle d'avoir une aide administrative.

L'enquête a été menée avec le soutien de Vitruvian Consulting et le questionnaire diffusé par la CASDEN avec l'aide du SE-UNSA et du SIEN-UNSA, de l'Education nationale et de mouvements complémentaires de l'école. Les 25 000 exemplaires du livret (128 p.) seront distribués aux directeurs d'école, à la hiérarchie de l'Education nationale, mais aussi aux parlementaires.

(voir aussi le bilan social du ministère de l'Education nationale ici)

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