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Le CNESCO : "une construction intéressante remise en cause sans un minimum de débats" (E. Verdier)

Paru dans Scolaire le mardi 06 novembre 2018.

Eric Verdier (CNRS, président du conseil scientifique du Cereq) est l'un des signataires de la tribune publiée par Le Monde pour la défense du CNESCO. Il revient pour ToutEduc sur l'intérêt du "Conseil national d'évaluation du système scolaire" dont l'existence est mise en cause par le projet de loi du ministre "pour une école de la confiance", mais dont la légitimité est également discutée par un sociologue, Choukri Ben Ayed (voir ToutEduc ici*). Il constate tout d'abord que la tribune défendant le Cnesco a eu un écho important (elle est signée par plusieurs centaines de chercheurs) : "J'ai des retours de collègues très divers, de chercheurs qui ne sont pas spécialistes des questions d'éducation, mais qui sont étonnés de voir cette institution supprimée sans débat. C'est notamment le cas de chercheurs spécialistes de l'évaluation des politiques publiques."

Par nature, le CNESCO n’est pas une instance scientifique ordinaire, et ne saurait être comparée à une revue à comité de lecture comme le fait C. Ben Ayed, qui semble ainsi en méconnaitre le fonctionnement, puisque ses travaux sont validés par un processus "à trois étages" : les rapports préalables à une conférence de consensus ou international sont tout d'abord relus par des scientifiques issus de plusieurs disciplines qui interagissent avec les chercheurs sollicités. "J'ai moi-même fait l'expérience de devoir reprendre un papier pour en préciser certains points." Ensuite, les avis sont soumis à l’approbation des membres du CNESCO, parmi lesquels figurent plusieurs scientifiques (outre sa présidente, sociologue, ce sont P. Bressoux, sc. de l'éducation, P. Caro, géographe, M. Gurgand, économiste, C. Lessard, sociologue, M-C Toczek-Capelle, sc. de l'éducation, A. West, London School of Economics, ndlr) et toujours adoptés à l'unanimité par-delà le pluralisme de ses membres (scientifiques, parlementaires – majorité et opposition - et du CESE). Enfin, les chercheurs sont confrontés au jury des acteurs de terrain "dont les questions sont parfois rudes". Eric Verdier ajoute que les chercheurs qui ont participé aux travaux du CNESCO publient ensuite souvent leurs résultats dans des revues scientifiques avec comité de lecture.

Cette institution "occupe donc une place originale dans le dispositif d'évaluation des politiques publiques" puisque, en France, ce sont souvent des instances administratives qui évaluent l'administration. "Quelle que soit la qualité des chercheurs de la DEPP ou de la DARES, ne s’exposent-ils au risque d’être suspectés d'être pris dans un conflit d'intérêt ? Dans nombre de pays démocratiques, les instances d'évaluation sont clairement indépendantes de l’exécutif. Le CNESCO est, de ce point de vue, une construction institutionnelle particulièrement intéressante."

Choukri Ben Ayed a donc tort de contester en bloc la qualité des avis rendus, et en outre, méconnait l’origine des contributeurs scientifiques du Cnesco quand il affirme que les économistes (de l'Ecole d'économie de Paris, implicitement visée, ndlr) sont prédominants sur les sociologues alors que dans les faits, "beaucoup de sociologues ont été sollicités comparativement aux économistes en nombre somme toute limité".

* A noter que le texte de Choukri Ben Ayed diffusé au sein du réseau des sociologues de l'éducation n'était pas destiné à être diffusé au-delà de ce cercle restreint, ndlr

Propos recueillis par P Bouchard, relus par E. Verdier

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