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CP-CE1 dédoublés : inquiétudes du SNUIPP malgré des "incidences positives"

Paru dans Scolaire le lundi 25 juin 2018.

Le syndicat FSU du 1er degré voit un avantage au dédoublement des CP et des CE1 en éducation prioritaire : "le ministère considère la baisse des effectifs comme un levier" pour l'amélioration des résultats des élèves, déclare Francette Popineau, co-secrétaire générale du SNUIPP. L'organisation syndicale publie, ce 25 juin, les résultats de son enquête sur les "CP à 12", à laquelle ont répondu quelque 10 % des enseignants concernés (388 pour 3 852 classes).

Un tiers d'entre eux déclare avoir eu des problèmes de locaux, qui se sont traduits quatre fois sur dix par la suppression de la salle informatique ou de la bibliothèque. Dans un quart des écoles, d'autres classes ont vu leurs effectifs augmenter, parfois sensiblement, et ils sont 21 % à déclarer que cela crée des tensions avec leurs collègues. Mais dans la classe à effectifs réduits, le climat est apaisé (90 %), les interactions entre élèves sont favorisées (84 %), la dynamique de classe n'a pas été affectée; les enseignants sont davantage partagés quand on les interroge sur l'autonomie des élèves.

Ils sont 7 sur 10 à constater un acquis en termes d'acquisition des compétences

Près de la moitié des enseignants répondants estime que leurs élèves sont sur-sollicités, la lecture et les maths sont privilégiés, répondent 76 % et 42 % des enseignants, alors qu'ils ne sont que 4 à 6 % à citer les langues vivantes, la musique, les arts visuels ou l'EPS. Un inspecteur aurait d'ailleurs conseillé, dans une classe où l'apprentissage de la lecture n'allait "pas assez vite", de "laisser tomber" les activités physiques pour faire davantage de "code". Et s'ils sont 71 % à estimer que "les compétences sont acquises plus rapidement", ils sont 24 % à répondre "non", et 5 % à ne pas répondre. Ils estiment de plus presque tous (93 %) avoir certains de leurs élèves en trop grande difficulté pour profiter de la réduction d'effectif et ils sont 35 % à dire qu'ils ne sont pas pris en charge par le RASED.

Selon les calculs du SNUIPP, à la rentrée 2017, 1 925 postes nécessaires à la mise en place des dédoublements ont été pris sur les moyens des RASED (76 postes), sur les moyens de remplacement (430 postes), sur les "réserves de rentrée" (246 postes), et sur le dispositif "plus de maîtres que de classe" (673 postes), un dispositif "martyrisé". A cette rentrée, l'extension des dédoublements demandera 5 442 postes alors que ne sont budgétés que 3 680 postes supplémentaires, pour répondre à l'ensemble des besoins, dédoublements, moyens de remplacement, etc. La différence sera prise sur le "plus de maîtres que de classe", mais aussi "quoiqu'en dise le ministre", sur les effectifs des autres classes et des autres écoles, y compris en maternelle, et sur les écoles rurales.

Des enseignants stressés

Autre source d'inquiétude pour l'organisation syndicale, le stress des enseignants confrontés au mot d'ordre des 100 % de réussite, sans définition de ce que serait cette réussite, notamment de ce que signifie "savoir lire" (53 % de réponses positives). S'ils n'y parviennent pas avec des effectifs réduits, leur responsabilité personnelle sera en cause. "Certains nous ont dit qu'ils ne reprendraient pas une classe dédoublées l'an prochain." S'y ajoutent "des recommandations" ou des "injonctions" de la hiérarchie, des inspecteurs plus présents que jamais dans les écoles, des formations imposées (93 %), sans apport pour les pratiques pédagogiques (35 %), dans certains départements, la publication de listes de manuels avec indication de leur conformité aux préconisations du ministre, et dans d'autres, les manuels sont imposés.

Par ailleurs, selon les enseignants interrogés, 20 % des élèves qui sont cette année dans un "CP à 12" se retrouveraient l'an prochain dans un CE1 non dédoublé, il semblerait que certains DASEN, faute de locaux ou de postes, aient limité les dédoublements de CE1.

La professionnalité des enseignants mise en cause

Interrogée sur les "ajustements" des programmes qui devraient être examinés par le CSE (Conseil supérieur de l'éducation) le 12 juillet, la responsable syndicale s'étonne de la publication de projets, les textes prenant un caractère officiel par anticipation, et elle dénonce un CSP (conseil supérieur des programmes) qui n'est pas indépendant puisqu'on retrouve dans ces textes "les partis pris du ministre" sur la syllabique, les quatre opérations, le passé simple...

Au-delà, l'organisation syndicale fait valoir que le raisonnement qui vaut pour les CP et les CE1 en éducation prioritaire, à savoir l'abaissement des effectifs devrait valoir dans les autres classes : réduire à 20 élèves par classe les effectifs des écoles élémentaires en éducation prioritaire coûterait 7 178 postes, soit 1 736 de plus que les dédoublements prévus à cette rentrée. Elle fait remarquer que les dépenses par élève et par an sont en France inférieures de 30 % à la moyenne des 11 pays de l'OCDE comparables.

Le SNUIPP redoute de plus une mise à mal du "laboratoire" que constitue l'éducation prioritaire, notamment en termes de travail en équipe et avec les familles et surtout il dénonce une atteinte à la professionnalité des enseignants, de plus en plus considérés comme des "exécutants" : "tout cela va devenir très vertical", estime Francette Popineau qui pense aussi bien aux relations des enseignants avec leurs inspecteurs qu'au "guide orange" ou aux "ajustements" des programmes. Elle y voit une menace sur l'attractivité du métier.

Le dossier ici

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