Scolaire » Recherches et publications

RASED : leur utilité mise en cause par une étude de l'IREDU, elle-même contestée par D. Glasman

Paru dans Scolaire le mercredi 17 janvier 2018.

"Nos résultats plaident dans l’ensemble pour un effet négatif du Rased [réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficulté] sur le redoublement et sur les résultats aux évaluations de CE2", estiment Claire Bonnard, Jean-François Giret et Céline Sauvageot dans un "document de travail" de l'IREDU (Institut de recherche sur l'éducation, université de Bourgogne) titré "Quels effets du passage en Rased sur le parcours scolaire des élèves ?". Pour les auteur.e.s, qui se fondent sur des données issues du "Panel primaire 1997" réalisé par la DEPP" et portant sur quelque 10 000 élèves entrés au CP cette année-là, "à caractéristiques comparables, les élèves ayant bénéficié du Rased en CP ont une probabilité plus importante de redoubler leur CP et obtiennent des résultats aux évaluations de CE2 significativement plus faibles que les élèves n’ayant pas bénéficié de ce dispositif".

Les auteurs rappellent que les évaluations des divers dispositifs d'aide concluent rarement qu'ils ont des effets positifs, qu'il s'agisse donc des RASED (ou des GAPP qui les ont précédés), du "plus de maîtres que de classes", des "coups de pouce clé" ou de l'aide individualisée. "Cette absence d’effet correspondrait à un solde neutre où se compenseraient des effets pédagogiques positifs, des effets 'd’étiquetage' négatifs et un rendement décroissant du temps alloué aux études au-delà du temps habituel" [les auteur.es ne posent pas l'hypothèse d'un défaut des méthodes d'évaluation, ndlr].

Des élèves qui ne sont pas en grande difficulté

En ce qui concerne les réseaux d'aides spécialisées, si l'étude conclut à une augmentation du risque de redoubler "ou de partir en classe spécialisée en CE1", elle fait la différence entre les élèves "en difficulté ou en grande difficulté" pour lesquels ils ne constatent pas cette augmentation: "Autrement dit, seuls les élèves avec aucune ou peu de difficultés pâtissent d’un passage en Rased, ce qui peut suggérer pour ces élèves, plus proches du niveau moyen de la classe, un effet d’étiquetage."

Les auteurs estiment eux-mêmes que leur travail "présente plusieurs limites" : "il ne permet pas d’identifier les différents types de Rased" et ne tient pas compte de "la diversité de leurs modes de fonctionnement et d’organisation". Centré "uniquement sur la réussite scolaire", il n'envisage pas "le changement de comportement et de savoir-être de l’élève". Il ne s'interroge pas non plus "sur la progression des autres élèves de la classe". Enfin, il ne prend pas en compte "les évolutions du Rased de ces dernières années".

Des résultats qui font pencher la balance

Dominique Glasman (université de Savoie) qui a lu attentivement cette étude, souligne que ce sont les élèves pris en charge par un réseau alors qu'ils "n’ont aucune difficulté ou peu de difficultés" qui progressent moins que les autres élèves (un constat qui n'est pas également vérifié pour les mathématiques). Or ces élèves "représentent plus de la moitié (54%) des élèves reçus en RASED". On ne peut donc mettre en cause "l’efficacité globale du dispositif" dont les résultats d’ensemble "sont lourdement affectés par ceux … d’élèves qui ne devraient pas y être."

Le sociologue ajoute que "le résultat de l'évaluation est établi en comparant des masses d’élèves (ceux qui sont en RASED / ceux qui n’y sont pas) et non pas classe par classe ou école par école" alors que "les pratiques d’orientation vers le RASED diffèrent amplement d’une école à l’autre". Pour lui, "ce que montre surtout cette étude, c’est qu’il y a un vrai problème d’orientation des élèves vers les RASED". Il risque de plus une hypothèse : les élèves "qui n’ont pas ou guère de difficultés" mais qui sont pris en charge par un RASED pourraient subir, "en termes de redoublement", une forme de stigmatisation : "la décision de faire redoubler un élève initialement orienté en RASED peut constituer une sorte de 'confirmation'." D. Glasman n'exclut pas que les réseaux aient d’autres effets, positifs ou négatifs, sur les élèves : "reprise de confiance en soi (ou, pourquoi pas, sentiment de mise à l’écart), contact renouvelé avec les adultes (...), effets positifs d’exercices non directement scolaires en matière de logique, de créativité, etc… Mais cela n’est pas dans le viseur de l’étude de l’IREDU."

 

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →