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La place du concours et sa pertinence interrogées lors des "entretiens du réseau des ESPE" (écoles supérieures du professorat et de l'éducation)

Paru dans Scolaire le jeudi 11 janvier 2018.

"Chaque solution [maintenir le concours de recrutement des enseignants et personnels d'éducation au niveau M1 ou le placer en L3 ou M2, ndlr] a ses inconvénients" et on peut même se demander s'il faut un concours. Anne-Sophie Barthez, conseillère formation au cabinet de Frédérique Vidal, la ministre en charge de l'enseignement supérieur, participait ce 11 janvier à la "journée d'études" organisée par le réseau national des ESPE et elle n'a pas caché que, pour elle, ces "écoles supérieures du professorat et de l'éducation" avaient encore "un cap qualitatif à franchir", qu'il s'agisse des difficultés persistantes qui concernent notamment la carte des formations, la part trop faible des enseignants chercheurs, la diversité des parcours des étudiants... Sur toutes ces questions des "pistes" seront "mises à l'étude dans un très court délai", qu'il s'agisse de soulager la charge de travail des étudiants-stagiaires en misant sur le continuum, du niveau licence aux premières années dans la carrière, des maquettes d'enseignement qui doivent, certes, tenir compte des spécificités de chaque école, mais répondre à des exigences communes définies au niveau national, ou des procédures d'accréditation qui devront être revues...

La question de la place du concours a été évoquée par plusieurs orateurs, dont Pierre Desbiolles, IGEN. Pour l'inspecteur général, placer le concours en L3 aurait l'inconvénient de mettre des jeunes à bac+3 en concurrence avec des titulaires d'un master. Sur le plan budgétaire, il faudrait les rémunérer un an de plus, en M1 et M2. A l'inverse, placer le concours en M2, priverait de revenus pendant une année les étudiants, et la sélection sociale en serait renforcée. Peut-on imaginer une solution hybride, un concours en deux temps ?

Des mémoires de M2 qui sont "des rapports de stage" 

Françoise Dubosquet (Rennes 2) pose une autre question, celle du master. "Les jurys subissent une pression très forte" pour accepter des mémoires qui ne sont pas au niveau, mais dont les auteurs ont été reçus au concours. De même, pour Daniel Filâtre, recteur et président du "comité national de suivi de la réforme de la formation des enseignants", ce sont trop souvent "des rapports de stage", même si certains parviennent à "convoquer des savoirs complexes" et produisent des rapports "exceptionnels". Pour Laurent Alexandre, les jurys de titularisation, pour éviter les recours devant la justice administrative, doivent valider un grand nombre de compétences, et cette contrainte à laquelle ils sont soumis pèse sur les tuteurs et les stagiaires. Mieux vaudrait une forme d'entretien professionnel qui mettrait en évidence les forces et les faiblesses du futur enseignant, de façon à organiser sa formation continuée sur ses premières années de titulaire, les années T1 et T2 étant adaptées.

La nécessité de concevoir une formation continuée sur les premières années d'enseignement revient régulièrement. Pour Stéphane Crochet (SE-UNSA), il faut "décloisonner formation initiale et formation continue". Pour Francette Popineau (SNUIPP-FSU), les stagiaires en M2 devraient se limiter à de l'observation, et avoir des stages en responsabilité en T1 et T2, avec un accompagnement. Il en va de l'attractivité du métier, car "ça commence à se savoir que l'entrée se fait dans la souffrance". Trop souvent d'ailleurs, la formation elle-même est perçue comme "une suite de défis à relever, de pièges à éviter", du fait de la surcharge de travail, de l'obligation de voir tous les aspects du métier en un an, comme le souligne Frédérique Rolet (SNES-FSU), mais aussi du fait que le stage "n'est pas réellement conçu comme faisant partie de la formation". Sur ce point au moins, Daniel Filâtre est d'accord avec la syndicaliste. Les stagiaires (donc en M2) ont souvent l'impression d'avoir "deux vies", l'une dans l'école ou l'établissement où ils font un mi-temps en responsabilité, l'autre à l'Espé. Dans les écoles de commerce ou d'ingénieurs, en médecine, on sait intégrer les temps en alternance dans la formation, les "entrecroiser" au lieu d'avoir des parallèles...

Davantage tenir compte de l'employeur 

Qui est responsable de cet état de fait ? Monique Ronzeau (IGAENR) estime que si le démarrage, dans l'urgence, des ESPE en 2013 a été réussi, le cadrage "s'est délité" du fait de la complexité de la gouvernance de ces écoles; elle plaide pour la constitution de groupes de travail réunissant présidents d'universités, directeurs des ESPE et services académiques, qui sont les employeurs. Daniel Filâtre lance d'ailleurs un appel aux ESPE : "il se dit qu'il n'est pas facile de vous parler, ouvrez vos portes à l'employeur". Mais sera-t-il entendu ? "Il y a dans les ESPE des enseignants qui n'ont pas saisi qu'on avait changé de paradigme" et "certains parcours de formation" ne sont pas ce qu'on pourrait attendre... Le comité qu'il préside rendra son rapport annuel fin janvier ou début février.

 

 

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