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Orientation, information et politiques jeunesse, académies, circonscriptions du 1er degré : le rapport de la Cour des comptes

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le mardi 12 décembre 2017.

"Il serait logique de transférer le réseau 'Information Jeunesse', ainsi que les CIO aux régions, en leur qualité de chefs de file de la politique de formation et d’orientation professionnelle et responsables à ce titre du service public régional d'orientation (SPRO). De ce fait, les missions des DRJSCS et les DDCS/PP [les directions régionales et départementales J & S, cohésion sociale, protection des populations, ndlr] qui demeurent encore (...) des interlocutrices privilégiées du réseau 'information jeunesse', s’en trouveraient allégées et centrées autour de la collation des grades et des contrôles." C'est un des constats de la Cour des comptes qui a publié hier 11 décembre, son "rapport thématiques sur les services déconcentrés de l'Etat". Plusieurs de ses considérations concernent l'éducation (au sens large). En voici l'essentiel.

S’agissant de l’Éducation nationale, la Cour constate que "le dialogue de gestion entre les recteurs et le ministère demeure un exercice très formel, non conclusif et non décisionnel. L’absence d’engagements clairs, en particulier sur les moyens, ne permet pas d’en faire un véritable levier d’amélioration de la performance du système éducatif. Depuis 2012, ce ministère signe des contrats avec chaque recteur d’académie, d’une durée de quatre ans (...) L’efficacité de ce dispositif est limitée par la difficulté d’articuler la démarche contractuelle et le tempo de la définition des priorités nationales, notamment par la traditionnelle circulaire de rentrée et surtout par l’absence d’engagement ferme du ministère sur les moyens alloués."

"A la fusion des rectorats, qui avait été envisagée, a été préférée la création de recteurs de régions académiques, laissant subsister la carte des 30 académies existantes (...). La Cour souligne la fragilité de ces régions académiques, qui ne disposent ni d’autorité hiérarchique, ni de missions d’allocation des moyens." De plus, dans quatre cas, le siège des régions académiques n’a pas été localisé au chef-lieu de région. "Ainsi apparaît un décalage croissant entre l’organisation territoriale de l’éducation nationale et celles des autres services de l’État au niveau régional (...) Le dispositif organisationnel retenu pousse à l’immobilisme (...) Le décret du 10 décembre 2015 prévoit (...) une mutualisation de certaines missions des académies au sein des nouvelles régions académiques (...) Cependant, la mise en œuvre de cette disposition se heurte au défaut de mobilité des agents concernés et se traduit plutôt par la spécialisation des sites existants (...)."

"Dans les rectorats, un certain nombre de missions des services départementaux (DASEN), notamment les plus petits d’entre eux, pourrait être assumé par le rectorat", comme à Limoges, la gestion des ressources humaines du 1 er degré. Ce mouvement de "mutualisation infra académique" est du reste "largement engagé". Les recteurs peuvent également "créer des services interdépartementaux". L’académie de Bordeaux a ainsi confié "à un seul service départemental la gestion des bourses, des frais de déplacement des personnels itinérants du 1er degré, des pensions civiles des personnels du 1er degré et des personnels enseignants du 1er degré privé".

"S’agissant des circonscriptions de l’Éducation nationale, l’enquête de la Cour a mis en exergue des découpages parfois peu pertinents, voire sans cohérence, car ne correspondant ni aux bassins de recrutement des [collèges], ni surtout, eu égard aux missions exercées à l’échelle de ces circonscriptions, aux nouveaux territoires de l’intercommunalité."

"La Cour rappelle sa recommandation de réunir les écoles du 1er degré autour de regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) dits concentrés, évolution qui serait grandement facilitée par l’attribution de la compétence scolaire (et périscolaire) aux EPCI (...)." Elle recommande de "revoir d’ici le 31 décembre 2019 la carte des circonscriptions du 1er degré de l’Éducation nationale en fonction des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale."

En ce qui concerne la gestion des enseignants, la Cour rappelle que son précédent rapport (voir ToutEduc ici) avait montré que les affectations ne prennent pas suffisamment en compte les besoins des élèves, que le ministère n'a pas tenu compte de la révision des critères territoriaux par l’Insee "compte tenu de l’extension et de la densification de l’urbanisation" et qu'il en résulte de forts écarts "qui favorisent les zones rurales". Elle note que le ministère "a entrepris depuis la rentrée 2015 de rénover les modalités d’allocation des emplois enseignants dans le premier degré public" et qu'il s'est donné pour objectif de réduire les écarts entre académies, "ce qui suppose de retirer des moyens aux académies relativement les mieux dotées pour les attribuer aux académies les moins bien dotées".

La Cour des comptes s'est également penchée sur les contrôles de divers services publics : "Les moyens affectés aux contrôles des accueils collectifs de mineurs (ACM) par les DDCS/PP ont baissé de 10 % entre 2011 et 2014 et le taux de contrôle s'est élevé à 9,8 % en 2015, en deçà des objectifs fixés par les instructions ministérielles, pourtant eux-mêmes revus à la baisse en 2014, même si ce secteur a été caractérisé par la très forte augmentation du nombre d’accueils de loisirs périscolaire dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires.". Les effectifs  affectés au contrôle des éducateurs et des établissements d'activités physiques et sportives (EAPS) ont augmenté, mais "les activités à contrôler ont également crû et l'exercice des contrôles montre de fortes disparités." La Cour dénonce en outre "un manque évident de pilotage" : "Une majorité des contrôles et des inspections demeure dictée par l'urgence."

Dans le domaine de la jeunesse et de la vie associative, les commandes politiques se sont multipliées : réforme des rythmes scolaires ; plan "priorité jeunesse" ; dispositif "la France s’engage" ; développement du service civique, etc. "La loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté a confié au Conseil régional un rôle de chef de file en matière de politique de la jeunesse (...), mais sans pour autant remettre en cause l’intervention de l’État" et les interventions des services déconcentrés, "outre qu’elles se présentent comme un empilement de dispositifs sans réelle portée stratégique, reposent sur des moyens limités (...). Les services de l’État participent ainsi à la mise en œuvre des projets éducatifs territoriaux, alors que ces derniers relèvent pour l’essentiel du bloc communal. Ils soutiennent également 'la mobilité internationale des jeunes', mettent en œuvre des actions du fonds d'expérimentation de la jeunesse, accordent des subventions au titre du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) destinées à soutenir la formation et l’animation et soutien au réseau associatif, et assurent la gestion des postes dits FONJEP, toutes actions à la fois très limitées dans leur montant et sans impact avéré ou, à tout le moins, mesuré. Par ailleurs, la création de délégués régionaux à la vie associative n’apparaît guère justifiée à la Cour."

Le rapport s'intéresse aussi à l'immobilier. La Cour "recommande la poursuite des opérations de relocalisation des circonscriptions du premier degré de l’Éducation nationale sises au chef-lieu de département au sein des locaux des DSDEN, ainsi que le regroupement immobilier avec d'autres administrations, en particulier pour les 'petites' implantations (CIO, circonscriptions IEN), par exemple dans le cadre de la création des maisons de l’État." Ces maisons de l’État permettent de regrouper des services dans des locaux communs : "Au 30 juin 2017, 77 maisons de l’État ont été créées ou sont en cours de création (...) L’académie de Limoges a mis en œuvre une politique de regroupement de ses services avec d’autres services de l’État". Le rapport cite également les circonscriptions de Thouars, Bressuire et Parthenay" qui occupent des locaux de la DDFiP [direction départementale des finances publiques], "générant une économie de loyers estimée à 43 000 € par an". 

A noter que le site Localtis donne l'essentiel d'une interview de J-M Blanquer à l'AEF : Le ministre de l'Education nationale estime que "la réforme territoriale de 2015 a placé l'Education nationale au milieu du gué et [que] le statu quo n'est plus possible". Il a confié sur ce sujet une mission à François Weil (ancien recteur de Paris), Olivier Dugrip (recteur de Bordeaux), Marie-Pierre Luigi et Alain Perritaz (inspecteurs généraux de l'administration de l'Education nationale et de la recherche): ils devront proposer, fin mars 2018, des "schémas d'organisation adaptés à chacune des 13 régions". Le ministre a par ailleurs affirmé que l'Education nationale devait travailler "plus en lien avec les collectivités (région, départements et communes)". Pour lui, l'expérimentation normande de deux académies avec un seul recteur "ne sera pas forcément transposable aux autres régions" et il ajoute qu' "il n'est pas question de prendre des décisions brusques mais d'avoir une approche par étape".

Le rapport de la Cour des comptes ici, le site de Localtis ici

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