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PIRLS : l'occasion pour Jean-Michel Blanquer d'un discours offensif et d'un appel à la mobilisation

Paru dans Scolaire le mardi 05 décembre 2017.

Des résultats "très insatisfaisants", "préoccupants", "qui ne sont pas dignes de notre pays", auxquels "on ne peut se résoudre". Jean-Michel Blanquer a ouvert, ce 5 décembre, sa conférence de presse de présentation des résultats de PIRLS [Programme international de recherche en lecture scolaire] avec le visage grave et des mots très forts. Le ministre de l'Education nationale évoque le score moyen des élèves français de CM1, 511 points, contre 540 pour la moyenne des 24 pays européens qui ont participé à l'enquête, et souligne une baisse continue du niveau depuis 2001 (525 points), particulièrement nette entre 2011 (520 points) et 2016, alors que d'autres pays voient leur score s'améliorer. 

Ce résultat "conforte" les stratégies mises en oeuvre pour apporter "une réponse structurelle", de long terme, à "la maîtrise insuffisante des fondamentaux", poursuit le ministre. Il rappelle la mise en place du dédoublement des CP, 2 200 classes cette année, une mesure dont les "premiers échos sont positifs", elle concernera l'an prochain 3 500 classes de REP, et la réforme "sera engagée pour les CE1" qui devraient être tous dédoublés (REP et REP+) à la rentrée 2019, soit 340 000 élèves concernés. 

Mais ces mesures quantitatives doivent s'accompagner d'un "volontarisme pédagogique", et il revient au ministère d' "indiquer un cap". Jean-Michel Blanquer n'entend pas remettre en cause la "liberté pédagogique", puisqu'il veut encourager l'innovation, et qu'il invite les enseignants à user de leurs "marges de liberté", mais celle-ci n'est pas "l'anarchisme pédagogique", elle doit être "éclairée", s'inscrire "dans le cadre des lumières que nous apporte la science". C'est d'ailleurs la raison d'être du Conseil scientifique qu'il constitue, présidé par Stanislas Dehaene, mais qui réunira "des spécialistes de toutes les disciplines", car les "sciences cognitives ne sont pas l'alpha et l'oméga de la science", même si on ne peut les ignorer. Il cite parmi les autres disciplines la psychologie, la sociologie, l'économie [mais pas les sciences de l'éducation, ndlr] et, plus avant dans son discours, les noms d'Alain Bentolila et de Roland Goigoux. Il compte s'appuyer également sur "les instances existantes", le CNESCO dont il salue le travail mené sous la présidence de Nathalie Mons, et le CSP appelé à "une nouvelle étape". Le Conseil supérieur des programmes devra en effet procéder à leur "clarification", à des "ajustements" et donner des "repères annuels" qui sont "très utiles", même si le ministre se dit "très attaché à la cohérence des cycles". 

Il souligne de plus l'importance des évaluations qui sont "indispensables", il y aura d'ailleurs deux évaluations en CP et une en début de CE1, elles participent d'une "culture de l'évaluation" qui est aussi "aide et soutien". Pour lui d'ailleurs, les enfants comme les adultes aiment les évaluations, il cite les jeux vidéos qui attribuent des points, et cette évaluation peut ne pas être punitive ou anxiogènes mais constituer bien au contraire "un levier de progrès", il cite "le contrat de confiance" proposé par André Antibi. 

Pour améliorer le niveau en lecture, il faut que les élèves aient davantage de vocabulaire, et la maternelle doit être "une école du langage", le ministre annonce "une grande conférence" sur ce niveau d'enseignement au mois de mars. S'agissant du CP et de l'école élémentaire, il récuse l'opposition "entre décodage et compréhension" puisque la fluidité de la lecture figure, avec l'étendue du vocabulaire, parmi les conditions de la compréhension. Jean-Michel Blanquer évoque des initiatives comme "Lire et faire lire" ou "Silence on lit" (voir ToutEduc ici), mais compte s'appuyer sur "les dernières recherches", dont les principaux résultats seront présentés dans un "vademecun" début 2018. Seront notamment publiées des "recommandations" pour aider les enseignants à choisir leur manuel de lecture. Il n'est pas normal que certains CP n'en aient pas, et "tous les manuels ne se valent pas". Là encore, le ministre n'entend pas s'opposer à la liberté des éditeurs, il est normal qu'il y ait "plusieurs méthodes et plusieurs manuels", mais il refuse "l'anarchie", et cite à cet égard l'étude de Jérôme Deauvieau sur l'efficacité des manuels 

L'école élémentaire doit également voir renforcer l'enseignement de la grammaire et de l'orthographe. Les enseignants recevront à ce sujet "des instructions très précises" sur la "grammaire de phrase" et sur "la dictée quotidienne qui doit devenir un réalité". Dans l'immédiat, les enseignants doivent utiliser leurs heures d'APC (activités pédagogiques complémentaires) pour le soutien à la lecture des élèves les plus fragiles. Au collège, deux heures d'accompagnement personnalisé doivent y être consacrées. Le ministre se défend d'ailleurs d'encourager le redoublement, qui n'est "pas souhaitable" même si c'est "un outil". Pour le prévenir, les enseignants de l'école et du collège doivent mettre en place avec les élèves en difficulté des "contrats de réussite" et des stages d'été doivent permettre de revenir sur un redoublement décidé à la fin de l'année scolaire. 

Mais doit également être transmis "l'amour de la lecture", "le plaisir de la littérature". S'il se refuse à opposer littérature patrimoniale et littérature contemporaine, il cite les Fables de La Fontaine, Les trois mousquetaires, Le Chevalier au lion, les Fourberies de Scapin. Il rappelle la mission confiée à Erik Orsenna sur les bibliothèques municipales et indique qu'une mission a été confiée à l'inspection générale sur les bibliothèques scolaires pour améliorer la circulation des livres. Il faut que de plus en plus de livres aillent de l'établissement au domicile.  

En ce qui concerne la formation continue des enseignants du 1er degré, il considère que sur les 18h annuelles prévues, 9 doivent porter sur l'enseignement de la lecture. Sur leur formation initiale, le ministre s'inquiète des inégalités selon les ESPE, ne serait-ce qu'en termes de nombre d'heures consacrées à cet enseignement. Il plaide pour une "égalité dans tout le pays", malgré l'autonomie des universités. 

Et, comme il l'avait fait à l'Académie française, le ministre lance "un appel à la mobilisation de la société française autour de son école", "au respect de l'institution scolaire" et donc des enseignants auxquels il apporte son "soutien inébranlable". 

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