Scolaire » Actualité

La Région Auvergne Rhône-Alpes va utiliser des robots pour représenter en classe les élèves empêchés d'y être

Paru dans Scolaire le lundi 20 novembre 2017.

"Oui, la téléprésence est à préférer à la visioconférence lorsqu'il s'agit de maintenir le lien avec des élèves empêchés de venir dans leur établissement. Parce que les robots sont à taille humaine et incarnent l'élève, figurent sa présence au sein de la classe, ils facilitent les interactions. Ils sont mobiles, plus autonomes qu'une tablette, donc plus pratiques pour voir un cours. Ils peuvent suivre les autres élèves dans un TP, dans le couloir ou encore à la machine à café. Et il sont effectivement beaucoup mieux pris en compte par l'enseignant et les autres élèves !" Ces arguments, avancés par Edwige Coureau-Falquerho, chargée d'études à l'IFE (Institut français de l'éducation), comptent parmi les enseignements tirés d'une expérimentation qui avait été menée en milieu scolaire entre janvier 2014 et décembre 2016 en région Auvergne Rhône-Alpes et à laquelle l'IFE avait été associée. La chargée d'études a fait état de ce projet dans un état des lieux de la robotique au service de l'éducation qu'elle a présenté à l'occasion d'un séminaire de travail organisé par la Direction du numérique pour l'éducation, le jeudi 16 novembre 2017 au salon Educatec-Educatice à Paris. Elle y était invitée au titre de l'un des groupes de travail thématiques numériques coordonnés par Numéri'Lab.

De fait, poursuit la chargée d'études, "un robot de télé-présence fait environ 1,35 mètres", se déplace avec un écran sur lequel on peut visionner la personne physiquement absente et échanger avec elle, "et il est effectivement beaucoup mieux pris en compte par l'enseignant et les autres élèves". Les résultats "encourageants" des trois ans d'expérimentation motivent, indique-t-elle à ToutEduc, le lancement en 2018 d'un nouvel appel à projets du conseil régional qui avait piloté ce premier projet, pour déployer désormais des robots de téléprésence dans les 15 départements du territoire.

Cette recherche-action baptisée "Robot lycéen en Auvergne Rhône-Alpes" constituait une "première" en France selon la chargée d'études. Elle souligne que si la robotique pédagogique, c'est-à-dire les petits robots dédiés à l'apprentissage du codage et de la programmation, se développe en milieu scolaire, les robots de téléprésence, en revanche, n'en sont qu'aux prémices même si "les usages se répandent dans le supérieur".

Des robots qui se fondent assez vite dans le décor

Des robots avaient été implantés dans 4 établissements (3 lycées auxquels s'ajoutent le collège et lycée Elie Vignal à Caluire, établissement qui accueille des élèves malades ou en situation de handicap) pour permettre à des élèves "empêchés" de venir à l'école pour des raisons de santé, de continuer, via ces robots, à être en cours. 14 élèves, de la seconde au BTS, ont bénéficié du dispositif.

Edwige Coureau-Falquerho cite d'autres "bénéfices significatifs" observés durant l'expérimentation : "les robots ont permis une continuité scolaire, de limiter les retards sur le programme, le risque de décrochage et de maintenir la motivation. Mais ils ont surtout permis le maintien de la socialisation avec les enseignants et les camarades. Et tous disaient avoir envie de revenir en cours." L'IFE observe également que le robot n'a pas perturbé "le déroulement du cours, ni au niveau pédagogique, ni au niveau de la vie de classe", en dehors d'une "excitation" et d'une "curiosité" constatée lors de l'installation et que, "comme tout autre élève", "il se fond assez vite dans le décor". Même si, souligne le rapport, "ces observations sont à nuancer pour le cas particulier d'Elie Vignal qui accueille dans une même classe des élèves souffrant de différentes pathologies. Certaines de ces pathologies (troubles autistiques par exemple) peuvent rendre la présence du robot en classe plus difficile à accepter et demander des mesures d’accompagnement spécifiques".

Une charte pour cadrer l'usage et préserver notamment "l'intimité pédagogique"

Surtout, au-delà de permettre effectivement la mise en œuvre d'une "École inclusive", ces robots offrent "beaucoup d'autres usages possibles" : en langues, pour l'orientation et la découverte des métiers, les enseignants empêchés, les élèves isolés du fait de problèmes de déplacements, pour la découverte culturelle...

Le prochain appel d'offres devrait permettre l'acquisition de 15 à 80 robots. Le déploiement ne se fera plus "à demeure" dans un établissement mais prendra la forme d'un "pool de robots mutualisé, certainement à l'échelle d'un bassin de formation". Les autorités académiques prévoient également un dispositif de formation pour les équipes de direction, enseignants et élèves, qui s'appuiera sur les observations et les recommandations du rapport d'études pour lequel 330 questionnaires ont été traités (élèves concernés, pairs en classe, enseignants), complétés d'entretiens auprès de ces mêmes publics ainsi que des parents et des chefs d'établissement. Il s'appuiera également sur le guide d'utilisation et les outils développés durant la phase expérimentale. Ainsi, une charte a été élaborée pour définir un cadre d'utilisation et lever ainsi "certaines réticences". "Cela a suscité chez les enseignants deux grands types d'inquiétudes", raconte Edwige Coureau-Falquerho. "On va nous filmer en cours et ça va être diffusé sur internet", ce qui soulevait à la fois la question du droit à l'image et celle de l'intimité pédagogique. La charte a permis d'inscrire, entre autres, l'interdiction de diffusion et de la présence des parents auprès de l'élève lorsque ce dernier assiste à son cours depuis son domicile.

Une nécessaire assistance humaine au robot

Des contraintes seront également à prendre en compte, au delà de celles liées aux connexions. Chaque robot, notamment, nécessite une assistance humaine : il faut lui ouvrir les portes, lui faire monter ou descendre les escaliers... Durant l'expérimentation, cette assistance avait été confiée à des élèves référents lycéens, deux volontaires minimum par robot.

Au-delà des rectorats et de l'IFE à qui avait été confiés le suivi et l'analyse des conditions d'implantation et le développement des usages de ces robots lycéens (et dont les résultats ont été présentés dans un rapport d'étude en février 2017), plusieurs autres acteurs avaient été associés à la recherche : l'accompagnement au déploiement et à la mise en œuvre avait été confiée au service ICAP (Innovation conception et accompagnement pour la pédagogie) de Lyon 1, l'accompagnement humain, par la formation et l'aide à la mise en place auprès des utilisateurs (enseignants et lycéens) à l'École centrale. En complément, l'équipe Éducation, cultures, politiques de Lyon 2 avait mené une analyse de l'activité d’enseignement-apprentissage avec le robot de téléprésence. Les robots, financés par la Région, avaient quant à eux été distribués par Awabot. Pour le déploiement, qui se fera en concertation avec les 3 rectorats, l'enseignement agricole et l'enseignement privé, les "cibles" devraient être "plus larges", précise encore Edwige Coureau-Falquerho. Outre servir à des lycéens en situation de handicap, les partenaires envisagent aussi de mettre à disposition ces robots pour des collégiens et des écoliers.

La chargée d'études signale le développement d'autres projets similaires, mais "à petits volumes" : des robots de téléprésence actuellement utilisés dans les Landes par le SAPAD (Service d'assistance pédagogique à domicile) du rectorat de Bordeaux et deux projets qui vont être déployés, "dans les mois prochains", dans les académies de Besançon et d'Amiens.

Le rapport ici

Camille Pons

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →