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L’autonomie des établissements redonnera-t-elle le moral aux personnels de direction ? (Suite de l’enquête de Georges Fotinos et Jose Mario Horenstein)

Paru dans Scolaire le jeudi 19 octobre 2017.

"On n’avancera qu’au terme d’une véritable révolution culturelle, il faut supprimer le mot réforme de notre vocabulaire et imaginer autre chose. Il faut former les professeurs et les cadres pour qu’ils puissent s’adapter en permanence", a déclaré l’ancien recteur de l’académie de Versailles, Alain Boissinot, lors du débat qui a suivi la présentation, hier mercredi 18 octobre, des résultats définitifs de l’enquête sur "Le moral des personnels de direction des collèges et des lycées" (voir ToutEduc ici).

Réalisée par Georges Fotinos, spécialiste des rythmes et du climat scolaires, et Jose Mario Horenstein, psychiatre, avec le soutien de la Casden-BP, cette enquête – à laquelle ont répondu près de 3 000 "Perdir" - était centrée sur les composantes du moral, les conditions de travail, la qualité de vie professionnelle, les perspectives d’avenir et la santé.

Si 7 Perdir sur 10 ont le sentiment d’être valorisés par les enseignants et 9 sur 10 estiment que les élèves ont de la considération pour eux, 5 sur 10 jugent que les services académiques connaissent peu ou pas leur établissement, 4 sur 10 ne sont pas satisfaits de leur relation avec la hiérarchie et 3 sur 10 considèrent que leurs relations avec l’inspection académique se sont dégradées.

Des conditions de travail dégradées

Les Perdir constatent clairement une augmentation de leur charge de travail, puisque 8 sur 10 estiment leur temps de travail hebdomadaire à 50h et que 72% considèrent que leurs conditions de travail se sont dégradées. Ils sont par ailleurs, 50% à déclarer qu’ils ne sont pas assez informés sur la politique éducative de la collectivité locale de rattachement, 8 sur 10 pour répondre qu’il y a trop de changements et plus de 6 sur 10 qu’il n’y a pas de continuité dans la politique éducative.

Les relations avec les parents se sont dégradées : 50% des personnels de direction indiquent avoir été insultés au cours de l’année 2015/2016, plus par les parents (51%) que par les élèves (30%) et 23% disent avoir été harcelés surtout par les parents (52%). Des résultats qui témoignent d’une forte chute de la situation constatée en 2003 lors de l’enquête précédente (-33 points).

"De l’ensemble des résultats, ressort une photographie, prise en février-mars 2017, qui se révèle inquiétante", souligne Georges Fotinos. "58% des Perdir déclarent avoir un moral moyen ou mauvais". Il constate "une évolution fortement négative puisqu’en 2003, 44% des Perdir considéraient que les décisions les concernant étaient toujours ‘prises d’en haut’ et qu’aujourd’hui ils sont 84% à penser de même".

Un sentiment d’impuissance

"On ressent un sentiment collectif d’échec, une impuissance à passer à autre chose", a réagi Philippe Tournier, lors de la table ronde qui a suivi cette présentation. Pour le secrétaire général du SNPDEN, "le système n’arrive toujours pas à se réformer. On est dans l’injonction paradoxale. On nous parle d’autonomie, on nous dit débrouillez-vous mais en même temps 'faites ce qu’on dit'. On ne nous fait pas confiance."

Selon l’enquête, 31% des personnels interrogés placent en tête des composantes de l’autonomie des établissements le recrutement (31%), la gestion des moyens (27%), la pédagogie (28%) et la gestion des personnels (22%). Pour Patrick Roumagnac, secrétaire général du SIEN-UNSA, "il faut distinguer autonomie et indépendance. Le recrutement des enseignants est effectivement une composante importante de l’autonomie. On doit pouvoir choisir, avec l’équipe et avec l’académie, selon les caractéristiques du territoire dans lequel se trouve l‘établissement".

Une autonomie collective

Catherine Nave-Bekti, secrétaire générale du SGEN/CFDT, insiste sur "l’autonomie de l’établissement qui n’est pas celle du chef d’établissement. C’est une autonomie collective qui nécessite un véritable accompagnement au changement." Une opinion partagée par Marie-Danièle Campion, la rectrice de l’académie de Clermont-Ferrand qui soulignent que "les acteurs doivent être maîtres de leur propre destin autour d’un projet commun, dans un climat de confiance et de dialogue social".

A propos du corps unique pour les chefs d’établissement et les inspecteurs, si le SGEN-CFDT préfère "des convergences plutôt qu’un corps unique", le SIEN-UNSA juge qu’il y a "urgence à démarrer le corps unique". Pour Patrick Roumagnac, "il faut arrêter les ajustements cosmétiques. Il est absurde de refonder l’école sans refonder l’encadrement". "Oui, sans doute", commente Philippe Tournier qui imagine "un corps unique dans 5 ou 10 ans" et qui ajoute : "les vrais changements ne viennent d’aucune réforme. Par exemple, la classe inversée n’a pas été créée par une circulaire. Aujourd’hui les canaux sont différents pour modifier les pratiques."

L'étude devrait être publiée sur le site de la CASDEN ici

 

Colette Pâris

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