Scolaire » Actualité

Rythmes : comment les enseignants sont passés du soutien de la réforme à son rejet (analyse, Institut de recherches de la FSU)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le jeudi 31 août 2017.

En septembre 2012, plus de 50 % des professeurs des écoles (PE) se déclaraient favorables à la semaine de 4 jours et ½ selon une consultation du SNUIPP-FSU (34 % étaient favorables à l'ajout d'une demi-journée le mercredi matin et 27 % au samedi matin). Pourtant, l'année suivante, "une vague de grève démontrait le caractère inflammatoire du sujet" et, en avril 2017, 87 % des PE interrogés dans le cadre d'un sondage Ifop déclaraient, au contraire, vouloir "supprimer ou assouplir" la réforme. Comment expliquer ce rejet "alors que ses justifications avaient été approuvées par les grandes organisations syndicales et validées par les experts ?". C'est la question à laquelle l'historien Laurent Frajerman, spécialiste de l'engagement enseignant (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), a tenté de répondre. Absence de soutien syndical franc et de "négociation globale" autour de la réussite des élèves et des conditions de travail des enseignants sont quelques-unes des explications avancées par le chercheur, qu'il livre dans un article intitulé "Comment les enseignants sont passés du soutien ambivalent au rejet de la réforme des rythmes", publié ce mercredi 30 août 2017 sur le site de l'Institut de recherches de la FSU. 

La forte variabilité des syndicats sur le sujet pourrait expliquer en partie ce "basculement". Le chercheur rappelle en effet que le décret Peillon avait été largement rejeté par le Conseil supérieur de l'Éducation (CSE) le 8 janvier 2013, et que le syndicat majoritaire SNUIPP (48 % des voix) avait voté contre alors même qu'il avait approuvé l'Appel de Bobigny initié par la Ligue de l'Enseignement en octobre 2010, texte qui demandait le rétablissement à 4 jours et ½ par semaine. "Conformément à sa tradition", décrit le chercheur, le syndicat "a consulté et sondé régulièrement les enseignants, ce qui l'a amené à infléchir sa position à partir de 2013", année durant laquelle il participe, en outre, aux mobilisations organisées contre la réforme. Quant aux SE UNSA et SGEN CFDT (respectivement 25 % et 6 % des voix), "susceptibles de soutenir le texte" et également signataires de l'Appel de Bobigny (même si le second avait approuvé aussi la semaine de 4 jours de Darcos en 2008), ils sont restés "prudents", observe le chercheur, et n'ont pas fait "la pédagogie de la réforme". Résultat, le premier a refusé de voter, le second s'est abstenu et leurs sympathisants aujourd'hui "la refusent nettement (76 % pour le SE UNSA, 80 % pour le SGEN CFDT, enseignants du premier et second degré confondus, sondage Ifop), plus que ceux de la FSU (61 %)".

L'amélioration des conditions de travail des enseignants insuffisamment prise en compte

Laurent Frajerman retient aussi la responsabilité de Vincent Peillon dans cet échec : parce que celui-ci a refusé "toute négociation globale" qui aurait intégré à la fois la réussite des élèves, mais aussi l'amélioration des conditions de travail des enseignants. Or, observe le chercheur, dans la culture des syndicats, "arbitrer entre l'intérêt des élèves et celui des personnels est très inconfortable". En outre, alors que déjà en 2012 une consultation du SNUIPP montrait que la revalorisation salariale était une priorité des PE (86 % la réclamaient parallèlement à la réforme), l'ancien ministre "demande aux PE de revenir sur le lieu de travail un jour de plus dans la semaine sans compensation", rappelle l'auteur. En 2014, même après l'instauration d'une prime de 400 euros par an, les PE la plaçaient encore en "priorité absolue (67 %), avec la réduction du nombre de tâches administratives (38 %) et l'amélioration des formations (37 %)". "En 2016, peu avant les élections, Manuel Valls annonce un effort supplémentaire de 300 millions d'euros pour porter l'indemnité à 1200 euros par an. Trois ans plus tôt, cette annonce aurait eu un effet plus percutant", juge le chercheur.

Si l'auteur évoque d'autres facteurs qui ont pu "encourager le raidissement des enseignants" en 2013 (l'influence de l'opinion publique ou encore les arguments avancés face aux opposants, "conservatisme" et "dédain de l'intérêt de l'enfant", qui ont pu enclencher "un sentiment de mépris"), il indique que le refus de la réforme était néanmoins déjà visible en 2012 au travers d'une consultation commandée par le SNUIPP à Harris Interactive. Dans ce sondage, qui a traité 23 444 réponses d'un "échantillon relativement fidèle à la population des PE", si 77 % des professeurs considéraient que l'intérêt des enfants devait "primer" "avant l'intérêt des enseignants et des parents", ces derniers plaçaient la réforme des rythmes en toute dernière position de leurs priorités pour l'école primaire.

L'article intégral ici

Camille Pons

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →