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"L'informatique permet de revoir complètement le rôle de l'erreur " (D. Wilgenbus, La main à la pâte)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le jeudi 06 juillet 2017.

La Fondation La Main à la pâte vient de publier à destination cette fois des enseignants de collège (cycle 4), et particulièrement des enseignants de mathématiques, de technologie mais aussi pour les EPI, le tome 2 du manuel "1, 2, 3… Codez !" rédigé par David Wilgenbus, Mathieu Hirtzig et Claire Calmet.

"1, 2, 3… Codez !" c’est aujourd’hui près de 18 300 inscrits : 10 000 pour le codage en primaire, 2 000 enseignants de collège avec actuellement un rythme de 50 inscriptions par jour, 4 000 animateurs d’association périscolaires et d’éducateurs. Le tome 2 est disponible dans toutes les librairies spécialisées en pédagogie ; il est consultable intégralement en ligne gratuitement en s’inscrivant à www.123codez.fr .

ToutEduc : Ce fort volume s’adresse particulièrement aux enseignants de maths et de technologie, ainsi qu'à ceux qui veulent mettre en place des EPI mais dans une moindre place… pour quelles raisons ?

David Wilgenbus : C’est d’abord le principe de réalité : l’informatique a été introduite dans les programmes de ces deux disciplines, avec des recoupements d’ailleurs entre ce qui est demandé en mathématiques et en technologie. Cela étant dit, l’informatique ne se cantonne pas à ces 2 disciplines, et fait appel parfois à des notions que l’on peut trouver en français (en particulier quand on travaille sur les langages de programmation), en physique (par exemple sur la notion de signal), etc. Au delà des connaissances, l’informatique permet de développer de nombreuses compétences qui sont parfaitement transversales aux différentes disciplines scolaires.

ToutEduc : il nous paraît y avoir peu de pistes interdisciplinaires dans le tome 2…

David Wilgenbus : L’informatique, même si elle a été introduite en maths et en technologie, est par essence pluridisciplinaire. Nous avons voulu montrer un exemple très détaillé, avec un projet EPI qui rassemble, outre maths et techno, la physique-chimie et la musique. Cependant, il y a un choix stratégique à faire : si on veut que les professeurs se lancent dans cette nouvelle matière, il faut éviter de multiplier les difficultés. Les EPI sont très intéressants, mais pas toujours faciles à mettre en place dans les établissements. Donc, on a proposé aussi de "simples" séquences disciplinaires, qu’un professeur peut mettre en place sans avoir à lancer un "gros" projet EPI.

Dans ces séquences disciplinaires, cela ne nous empêche pas de proposer des prolongements vers d’autres disciplines. Prenez le projet de cryptographie (conçu essentiellement pour le professeur de maths) : on donne des pistes en français ou langues étrangères (étudier certaines œuvres, ou la fréquences des lettres dans telle ou telle langue), en physique-chimie, etc.

ToutEduc : Revenons sur les compétences transversales rendues possibles par l’informatique…

David Wilgenbus : Ces compétences dépendent à la fois de l’informatique en elle-même, mais aussi de la démarche pédagogique mise en œuvre dans "1, 2, 3… codez".  Dans les activités "débranchées" (informatique sans ordinateur), on met en place une démarche d’investigation, qui valorise le questionnement, l’autonomie, l’expérience, le débat… C’est bien plus riche qu’un cours magistral ! Les élèves ne sont pas de simples exécutant, mais imaginent, testent, se défient les uns les autres.

Les activités "branchées" (la programmation) sont davantage du ressort de la démarche de projet, qui va favoriser l’autonomie des élèves, la prise de décision, la collaboration avec les autres, etc. Et ça les aide également à apprendre à décomposer une tâche complexe en tâches plus élémentaires.

L’informatique permet également de revoir complètement le rôle de l’erreur, à la fois pour l’enseignant et pour les élèves. Quand vous donnez un exercice en maths, l’élève doit attendre une correction qui est différée, donnée par une figure d’autorité et souvent associée à un jugement ou à une note. Même avec un professeur bienveillant, l’élève va souvent voir son erreur comme une sanction, ce sera vécu comme un jugement.

En programmation, c’est différent. Tous les programmeurs se trompent, et très souvent. Quand on fait une erreur dans un programme, ça ne casse pas l’ordinateur, l’erreur n’a pas de conséquences. D’autre part, l’erreur est visualisée immédiatement, car on teste son programme toutes les 5 minutes, et on constate l’erreur si la machine fait autre chose que ce qu’on voulait qu’elle fasse. C’est la machine qui se comporte bizarrement, ça n’est pas une figure d’autorité qui dit "tu t’es trompé". L’ordinateur est un médium neutre qui réagit instantanément.

Les élèves réalisent très vite qu’un programmeur se trompe tout le temps et que c’est comme ça qu’il avance, en corrigeant ses erreurs au fur et à mesure. Ca les décomplexe beaucoup.

ToutEduc : La place de l’enseignant est donc différente ?

David Wilgenbus : Le rôle de l’enseignant n’est pas le même : l’enseignant ne dit pas tout ce que vous devez faire. Le guide pédagogique "1, 2, 3… codez" (ici, on parle du tome 2, pour le collège) explicite toutes les étapes pour l’enseignant, de façon à l’aider à préparer ses séances. Mais cela ne veut pas dire qu’on attend de lui qu’il fasse de même avec les élèves ! Son rôle, c’est de les aider à y arriver par eux-mêmes, plutôt que de donner les informations. L’enseignant qui va suivre le guide pédagogique, dans son coin (c’est toujours sage de faire les choses chez soi avant de les faire en classe !) peut apprendre à la fois les notions de base en informatique et comment enseigner ces notions aux élèves.

ToutEduc :  dans le travail par groupes il semble que vous proposiez une hétérogénéïté de niveau au sein des binômes lorsqu’il s’agit du travail d’investigation alors que vous préconisez des groupes plus homogènes lorsqu’on est dans la démarche et réalisation de projet projet .

David Wilgenbus : En programmation, plus peut être qu’ailleurs, la différence entre les élèves est énorme : il est illusoire d’espérer que chacun avance à son rythme. Donc, dans ces projets, on conseille de faire des binômes relativement homogènes et de laisser chaque binôme avancer à son propre rythme. Le guide pédagogique précise, pour chaque projet, comment on peut le découper et quelle est la difficulté de chaque tâche. Les projets sont choisis de façon à permettre aux groupes les moins avancés d’arriver tout de même à un résultat fonctionnel et valorisant.

"1, 2, 3... Codez !", tome 2, de David Wilgenbus, Mathieu Hirtzig et Claire Calmet de la fondation "La Main à la pâte", six projets d'informatique pour le collège (cycle 4), éditions  Le Pommier, juin 2017, prix papier : 25 euros; consultable gratuitement sur le site www.123codez.fr

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