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Les pratiques numériques des lycéens leur permettent-elles un autre accès aux connaissances ? (J-F Cerisier à l'ORME)

Paru dans Scolaire le jeudi 01 juin 2017.

Quelles sont les pratiques numériques des lycéens et permettent-elles d'améliorer l'efficacité de l'enseignement ? C'est l'objet d'une étude menée par le laboratoire Techné (université de Poitiers) dont Jean-François Cerisier, le directeur, a présenté les premiers résultats lors de la conférence inaugurale des rencontres de l'Orme, hier 31 mai à Marseille. Son équipe s'est immergée pendant trois ans dans un lycée dont elle a "tracé" les usages des élèves (elle n'a pas pu faire de même pour les enseignants, dont les pratiques mériteraient pourtant également d'être interrogées).

La Région Poitou-Charentes, commanditaire de l'étude, a renoncé à équiper les élèves de seconde de tablettes dont il n'était pas évident qu'elles tiennent le coup trois ans, ni qu'elles répondent à leurs besoins, et elle a préféré financer l'équipement par les familles. Les lycéens sont donc tous équipés, chacun de façon différente. C'est dans ce contexte que les trois doctorantes qui les ont suivis ont identifié plusieurs facteurs bloquants. Le premier, celui sur lequel les collectivités doivent absolument investir est la connectivité. Celle-ci permet notamment d'accéder aux données sauvegardées, or c'est là que se situe la seconde difficulté. L'ENT (l'espace numérique de travail) comporte bien un "cloud", et le serveur du lycée un espace de stockage important, mais les élèves, et souvent leurs professeurs, leur préfèrent les solutions proposées par Google, Dropbox et autres géants de l'informatique, qu'ils jugent plus pratiques. Dès lors se pose la question de la sauvegarde de leurs données personnelles et donc de la nécessité d'organiser les rapports avec ces entreprises pour garantir les droits des utilisateurs.

Troisième question soulevée par cette étude, les ressources disponibles. Si les familles sont prêtes à acquérir des équipements, elles ne le sont pas à acheter des logiciels. Beaucoup de lycéens n'ont pas de traitement de texte sur leur ordinateur portable, ni accès à des manuels ou autres. De plus, les enseignants ne semblent pas convaincus de la qualité des ressources offertes sur le marché. Une étude de Deloitte montre d'ailleurs que ce marché des ed-tech (les technologies pour l'éducation) est à un niveau de maturité très faible. Enfin, les lycéens ont de réelles compétences dans l'utilisation d'outils numériques, mais essentiellement celles qui sont acquises par l'expérience, sans réelle compréhension de l'informatique, ce qui amène Jean-François Cerisier à parler de "compétences en trompe-l'œil". Il n'est pas pour autant convaincu qu'il faille créer un enseignement spécifique, avec une discipline et un corps enseignant dédié, mais il estime absolument nécessaire de formaliser des activités qui soient explicitement dédiées au développement de ces compétences.

La difficulté vient aussi de ce que les pratiques des lycéens sont très diversifiées, qu'ils jonglent en permanence entre les propositions des enseignants et d'autres sollicitations et que c'est face à un changement de culture que le système éducatif doit se transformer. Comment organiser les rapports à l'information ? Comment repenser l'espace et le temps, les salles de classe et le découpage des journées en heures de cours, voire le découpage disciplinaire ? Comment repenser la nature même des activités des élèves, de façon qu'elles soient plus productives et créatrices ? Autant de questions politiques difficiles à assumer.

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