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Encore des failles dans la mise en sécurité des établissements scolaires (rapport)

Paru dans Scolaire le jeudi 16 mars 2017.

"Une véritable politique est désormais menée au sein du ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en partenariat avec le ministère de l’Intérieur pour faire face à la menace terroriste", estime Najat Vallaud-Belkacem, dans un communiqué publié ce 16 mars, avant la fusillade qui a éclaté dans un lycée de Grasse (et qui est d'ailleurs sans lien avec une entreprise terroriste). La ministre de l'Education nationale ajoute qu'elle a fait part aux recteurs, la semaine dernière, de sa décision de "mettre en place les principales recommandations" du rapport conjoint de l'IGAENR (l'inspection générale de l'administration de l'Education nationale) et de l'IGA (l'inspection générale de l'administration - ministère de l'Intérieur).

Le rapport constate qu' "une dynamique de diffusion d'une culture de la sécurité et de la sûreté au sein de la communauté éducative a été initiée en quelques mois" et "qu’une véritable politique est désormais menée au sein du ministère de l'Education nationale". Toutefois, les inspecteurs généraux relèvent quelques failles, parfois à lire "entre les lignes". Voici des extraits significatifs du rapport.

MINISTERE. "Au sein de l’administration centrale du ministère, plusieurs structures administratives permanentes interviennent sur le champ de la sécurité, mais de façon éparse". Les rapporteurs laissent entendre que chacun est jaloux de ses prérogatives. Pourtant, "même si la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) n’est pas directement rattachée au secrétaire général, celui‐ci, dans l’exercice de ses missions de haut fonctionnaire de défense et de sécurité, exerce sur elle une autorité fonctionnelle incontestable."

RECTORATS. Les recteurs ont été invités "à structurer des 'cellules académiques de gestion de crise', avec l’appui des préfectures et des forces départementales de sécurité (...) Cette instruction (a) effectivement été mise en oeuvre dans toutes les académies visitées, non sans mal, en l’absence d’un guide méthodologique (qui aurait été apprécié), et selon des modalités différentes."

VOCABULAIRE. Les chefs d'établissement ou directeurs d'école ont rencontré à de multiples reprises des représentants de la police et de la gendarmerie "sans que se crée un discours uniforme des policiers et des gendarmes vis‐à‐vis de la communauté éducative (...) La question se pose par exemple de savoir s’il faut parler de 'tuerie de masse' ou adopter un langage moins violent, avec pour certains la volonté de ne pas nommer la menace terroriste de peur de développer un climat anxiogène. Or ces précautions oratoires peuvent se comprendre vis‐à‐vis des élèves, notamment les plus jeunes, mais plus difficilement vis‐à‐vis des adultes."

CONFUSION. La mission évoque un vocabulaire mal fixé dans les textes officiels, ce qui risque d'entraîner des confusions entre "les 'risques' naturels, technologiques ou matériels qui, en général, ne sont pas la conséquence d'une intention humaine et ceux qui sont le produit d'une intention, en l’occurrence terroriste. C'est alors le terme 'menace' qui est approprié. La mission a souhaité faire cette distinction (...) [car] l'impact psychologique et les comportements des personnels ne seront pas les mêmes lors d'un attentat ou lors d'une inondation ou d'une tempête (...) Les compétences auxquelles le chef d'établissement fera appel ne seront pas les mêmes face à la menace terroriste ou face aux risques majeurs (...) Ainsi y‐a‐t‐il deux logiques qu'il faut savoir appréhender pour être en capacité, dans les établissements d’enseignement, de mieux comprendre la particularité de la menace attentat ‐ intrusion et d’y faire face."

"La circulaire du 25 novembre 2015 relative aux mesures de sécurité demande de réaliser un exercice avec deux options, 'mise à l’abri' ou 'confinement', sans donner d’explications sur ces concepts de telle sorte qu’ils sont confondus avec le confinement mis en oeuvre dans l’hypothèse d’un nuage toxique ou la mise à l’abri préconisée en cas d’accident nucléaire (...) L’absence de définition rigoureuse des termes employés laisse les acteurs de terrain démunis. Aussi, répondent‐ils aux instructions qu’ils reçoivent en faisant au mieux, sans toujours avoir compris ce qui est attendu d’eux ou ce qui est préconisé, comme cela s’est parfois vérifié lors des exercices de rentrée."

PRIMAIRE. "L’enseignement primaire est le niveau le plus démuni face à la menace terroriste" et certains directeurs d’école "paraissent comme 'écrasés' par les décisions qu’ils auraient à prendre et les actions qu’ils auraient à mettre en oeuvre dans l’hypothèse d’un acte terroriste. Ils se montrent parfois déroutés par l’organisation des exercices de mise en sûreté à faire jouer aux tout‐petits."

TAP. Les locaux de l’école primaire abritent des activités qui dépendent de l’Education nationale, "les autres des collectivités locales" et "il appartient aux responsables municipaux d’organiser des exercices permettant de tester hors des temps scolaires la mise en oeuvre des procédures inscrites au PPMS (plan particulier de mise en sûreté). Les remontées de terrain conduisent au constat d’une quasi absence d’exercices réalisés à ce moment‐là."

PRIVE. "A l’exception des écoles juives, les établissements d’enseignement privés sous contrat ont pris en compte les conséquences de la menace terroriste avec moins de célérité que ceux de l’enseignement public qui ont progressé comme à marche forcée. Cette situation est due à la nature même de ces établissements dès lors que le contrat qui les lie avec l’État porte sur les enseignements (horaires et programmes) mais non sur l’organisation et les modes de fonctionnement de l’établissement (...) Par ailleurs, d’après ce qu’a constaté la mission, les établissements scolaires privés même sous contrat ne semblent pas systématiquement pris en compte dans la mise en oeuvre des mesures de sécurité par les services académiques et départementaux."

LIMITES. La mission tient à souligner "l’impossibilité de systématiser une conduite unique à tenir en cas d’attentat ou encore de concevoir des dispositifs permettant de prémunir totalement contre une intrusion dans un établissement scolaire, voire d’empêcher le passage à l’acte d’un élève ou d’un agent qui n’aurait pas été repéré comme susceptible d’attaquer les membres de la communauté éducative. Quelles que soient les dispositions prises, elles auront une limite, celle de l'imagination du terroriste."

La ministre annonce notamment "la mise en place d’un centre ministériel de crise" et la "généralisation des cellules de crise départementale", la distinction des risques naturels et de la menace attentat intrusion dans les PPMS, la "mise à disposition d’un vadémécum reprenant les directives et regroupant les conduites à tenir", le "renforcement de la chaîne d’alerte", la diffusion des bonnes pratiques concernant les exercices", un "élargissement de la réflexion aux procédures pendant les temps scolaire et périscolaire" et un "élargissement des formations aux personnels des collectivités territoriales affectés dans les établissements d’enseignement" ainsi qu'un "renforcement des moments de formation pour les directeurs d’école".

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