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Faire des jeunes des relais de la transmission de la mémoire de la Shoah et des valeurs démocratiques et républicaines (Journée de la mémoire des génocides)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le samedi 28 janvier 2017.

Des politiques éducatives novatrices, des démarches pédagogiques qui s’y inscrivent, c’est ce qu’il faut développer aujourd’hui pour répondre à la préoccupation de tous ceux qui veulent que les jeunes générations deviennent les relais de la transmission de la mémoire de la Shoah. C’est crucial au moment où les derniers témoins qui interviennent dans les écoles et les établissements scolaires arrivent au soir de leur vie. C’est bien la préoccupation de la ministre de l’Education nationale. La mémoire de la Shoah, celle des génocides, permet non seulement de faire acquérir aux élèves les repères de l’histoire à laquelle ils appartiennent mais également de leur donner des éléments de réflexion pour les conduire au refus de toute discrimination, du racisme, de l’antisémitisme, du populisme et du nationalisme qui en sont les vecteurs.

C’est de cette manière qu’on peut comprendre ce que Najat Vallaud-Belkacem a voulu valoriser au cours de la Journée de la mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l’Humanité hier vendredi 27 janvier. Le projet européen "Convoi 77", porté par l’association éponyme, illustre en effet ce qui peut être fait avec les jeunes générations. Ce projet a pour ambition de reconstituer l’histoire personnelle de chacun des 1321 déportés du dernier grand convoi ayant quitté Drancy pour Auschwitz le 31 juillet 1944. Seuls 214 ont survécu . D’où l’idée de proposer à des collégiens et lycéens de participer à ce projet avec comme finalité de rédiger une biographie de la personne déportée pour laquelle ils ont cherché et collecté des informations : pièces administratives, photographies, témoignages, etc.

Les élèves de 37 pays

Ce qu’ont produit les jeunes avec leurs enseignants est mis en ligne sur le site www.convoi77.org.L’opération implique aussi des collégiens et lycéens des 37 pays qui ont vu naître ces personnes. A ce jour, ce sont des élèves d'Allemagne, de Belgique, de Pologne, d'Algérie.

En France, le projet a été expérimenté dans les académies de Créteil et de Versailles avec le soutien de l’inspection générale et va être étendu. Ce sont des élèves d’une classe de troisième investie dans le projet, celle justement d’un collège de l’académie de Versailles, le collège Charles Péguy à Palaiseau qui, avec leur professeur d’histoire et géographie et d’enseignement moral et civique, se sont exprimés au cours de cette journée. Ils ont notamment évoqué l’écriture d’une pièce de théâtre avec un auteur autour de leurs recherches sur un des déportés dont ils ont interviewé la fille, interview préparée avec une journaliste. La pièce de théâtre, jouée aussi en anglais dans le cadre d’un lien avec des étudiants de l’université américaine de Paris, associe élèves acteurs, élèves costumiers (avec le professeur d’arts plastiques), élèves techniciens (éclairages, bruitages avec le professeur de technologie), chants yiddish avec le professeur d’éducation musicale. La rédaction de la biographie du déporté, qui est l’objectif, confronte les élèves aux exigences d’un texte historique, à la croisée de l’histoire et du français. Cette réalisation, qui voit donc la participation de six enseignants de disciplines différentes, prend place dans le cadre des enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI).

Comment dire le vide ?

Ce travail a fait prendre conscience à chacun d’une des significations de la Shoah, comme l’exprime un passage du bilan d’étape lu à haute voix par le professeur d’histoire et géographie : "De nombreuses questions ont surgi au fur et à mesure des progrès de notre enquête, des hypothèses également. Nous les avons notées afin de poursuivre nos recherches, de questionner les historiens qui vont nous aider à finaliser ce projet. Mais nous avons réalisé que de nombreuses questions resteront sans réponse et qu’il faudra en rendre compte dans notre biographie : ce vide, ces blancs que nous ne comblerons pas, car il n’y a plus de traces. Les élèves ont pris conscience que c’est cela aussi la Shoah : la disparition de personnes, de familles mais également de tous les objets, photos, documents qui pourraient nous permettre de reconstituer ce que fut leur vie. Comment dire le vide ? L’absence ?".

Faire prendre le relais de la transmission de la mémoire de la Shoah par les jeunes : on retrouve encore, et très symboliquement, cette préoccupation avec la cérémonie qui s'est déroulée au cours de la même journée au Mémorial de la Shoah où Najat Vallaud-Belkacem a, d’une part, remis les insignes de commandeur dans l’ordre des palmes académiques à deux hommes qui n’ont eu de cesse de témoigner de ce qu’a été la Shoah et d’en tirer les leçons auprès des écoliers, collégiens et lycéens, Alexandre Halaunbrenner et Nicolas Roth. Et, d’autre part, remis leur diplôme d’ambassadeur aux "ambassadeurs de la mémoire". Pleinement intégrés aux initiatives portées par le Réseau des lieux de mémoire de la Shoah en France, les ambassadeurs de la mémoire sont retenus par chaque institution du Réseau au sein d’établissements scolaires situés à proximité des sites historiques de la Shoah en France où une classe ou un groupe d’élèves volontaires engage, sous la conduite d’un enseignant, un travail de plusieurs mois en lien avec le site de référence et avec les programmes officiels de l’éducation nationale. Ces jeunes sont ainsi "porteurs de la mémoire d’un lieu de la persécution, de l’internement, de la déportation mais aussi du sauvetage des juifs de France et pleinement engagés dans une démarche de réflexion et de transmission autour des valeurs démocratiques et républicaines" (ici).

Arnold Bac

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