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La coopération entre élèves : tout sauf une évidence (IFE)

Paru dans Scolaire le dimanche 18 décembre 2016.

"À plusieurs, on apprend mieux" ; "Il faut développer l’intelligence collective dans les classes pour mieux faire réussir les élèves" ; "La base du socioconstructivisme, c’est l’apprentissage entre pairs". Catherine Reverdy cite ces formules "qui font largement consensus dans le monde de l’éducation" au point d'apparaître comme des évidences, au début du dernier "dossier de veille" de l'IFE. C'est pour mieux les interroger. Les élèves apprennent-ils mieux en groupe "que quand ils sont seuls ou en classe entière"? La réponse n'est pas évidente et l'auteure cite Jean-Yves Rochex pour qui "les relations entre méthodes et effets sur le contenu sont très difficiles à étudier" d'autant que les conceptions pédagogiques mises en oeuvre sont "souvent auto-déclarées" par les enseignants et les catégories dont ils usent sont "relativement grossières" et ne semblent "guère pertinentes pour trouver des éléments de réponse probants aux questions posées".

Le dossier n'y répond donc pas. D'ailleurs, "si le travail en groupe peut s’avérer extrêmement fructueux, il peut aussi se révéler inefficace". L'auteure liste les problèmes posés. "Certains chercheur. se.s déclarent ainsi que l’apprentissage coopératif apporte de nombreux bénéfices aux élèves, connait un succès très large (...). Mais l’enthousiasme autour de cette innovation semble cantonné aux recherches elles-mêmes et les difficultés s’accumulent quand il faut franchir les portes de la classe."

Des finalités diverses

Encore faut-il s'entendre sur les finalités, qui varient avec les divers courants. "La coopération Freinet articule bien une perspective politique (affranchissement de la classe sociale pour les élèves et 'aptitude à coopérer dont le socialisme futur aura besoin') avec une perspective pédagogique (nouvelle relation aux savoirs des élèves, plus directe que la médiation systématique par le maitre)." Pour sa part, le "courant psychologique" est davantage centré "sur le développement de l’enfant lors des interactions avec ses pairs, développement pris dans le sens cognitif bien sûr, mais aussi dans les dimensions affective et sociale". Quant à la pédagogie institutionnelle de F. Oury, elle considère que "la coopération permet de diversifier les pratiques enseignantes dans le but de faire participer activement les élèves" tandis que pour Philippe Meirieu, la coopération est "une méthode d’apprentissage parmi d’autres", et non un but en soi.

Certes, "par rapport à un travail individuel, quand les élèves travaillent en groupe, elles ou ils se soutiennent mutuellement", mais à condition "que la taille du groupe ne soit pas trop grande" et que "la complexité de gestione des relations à l’intérieur du groupe ne prenne pas "le pas sur la valorisation individuelle à l’intérieur du groupe".

Tout dépend aussi de l'enseignant

La recherche permet de définir les conditions nécessaires à l’apprentissage coopératif en classe : Il faut que les membres d’une équipe de travail perçoivent que leur réussite dépend de celle des autres membres, que tous "jouent le jeu" sans se reposer sur le travail des autres, que soit promue l'entraide, que soient "clairement enseignées les habiletés sociales ou coopératives"...

Tout dépend aussi de l'enseignant : Celui-ci n'applique pas "une méthode entièrement prédéterminée", il doit "créer un climat affectif positif en classe", "développer l’esprit d’équipe", apprendre aux élèves à coopérer "par des activités organisées selon les principes de l’apprentissage coopératif". A l'école primaire, mieux vaut sans doute "laisser les groupes stables dans le temps", mais dans l’enseignement secondaire, "à l’âge de l’entrée dans l’adolescence où l’influence des pairs se fait très grande, les groupes de pairs informels, en dehors de la classe, se font et se défont (...) La question de choisir des groupes stables dans le temps se pose alors d’une autre manière (...) L’influence des pairs est donc à multiples facettes, elle n’est pas entièrement négative ni entièrement positive, c’est un problème complexe."

Des changements qui ne peuvent être imposés

Quant aux enseignants, ils ne sont pas toujours enthousiastes et se heurtent "à des difficultés de mise en oeuvre", à un sentiment "de perte de contrôle de la situation" puisqu'ils ne peuvent pas "surveiller de près tous les groupes en même temps". Beaucoup "ne croient pas réellement aux capacités de leurs élèves à travailler en groupe et à apprendre par eux ou elles-mêmes" et le dossier invite à "prendre en compte les changements à réaliser dans la pratique enseignante", lesquels "ne peuvent être imposés sans compréhension des objectifs de progrès en jeu".

Reverdy Catherine (2016). "La coopération entre élèves : des recherches aux pratiques." Dossier de veille de l’IFÉ, n° 114, décembre". Le dossier est téléchargeable ici

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