La PEEP s'engage pour l'informatique à l'école et pour la formation des enseignants
Paru dans Scolaire le mardi 04 octobre 2016.
François Lasne, informaticien et vice-président de la PEEP, se demande si le "grand plan pour le numérique" n'est pas en train de brouiller les pistes. "On donne trop de place au matériel" et les formations prévues pour les enseignants, trois jours, permettront de les former à leur utilisation, mais pas à la programmation. "Au mieux, deux heures lui seront consacrées." Résultat, un grand risque de confusion entre "le numérique", l'équipement en tablettes, ordinateurs et logiciels, et "l'informatique" qui est une science qui porte sur les algorithmes et le code.
François Lasne : Les enseignants ont des acquis très différents au niveau des outils numériques. La plupart les maitrisent déjà de par leur utilisation quotidienne, mais nous craignons que trop de temps soit consacré à des manipulations de matériels, et préfererions que l’accent soit mis sur la compréhension des enjeux, et la précision du vocabulaire en est un. A vouloir former tous les enseignants succinctement, ceux-ci risquent d’expliquer les choses de manière contradictoire à nos enfants, et c’est là ce qui nous inquiète. Les enseignants du primaire ont dorénavant pour mission de sensibiliser les jeunes à l’informatique : l’algorithmique sous forme ludique, et la programmation via un outil graphique de type Scratch. Et ce sont les enseignants de mathématiques en collège qui poursuivront cette mission, avec notamment des langages de programmation plus évolués.
ToutEduc : Comment faire pour garantir la qualité de ces formations ?
François Lasne : Nous avons choisi de nous appuyer sur "Class'Code" qui propose un programme de formation gratuit à destination de toutes personnes désireuses d’initier les jeunes de 8 à 14 ans à la pensée informatique. Le programme comprendra cinq modules de formation en ligne d’une dizaine d’heures chacun, couplé à des temps de rencontre en présentiel pour partager, expérimenter et échanger entre apprenants. Deux de ces modules sont déjà en ligne, et ont été testés dans deux régions, PACA et Pays-de-la-Loire. A la fin du premier module, les enseignants qui l'avaient suivi se sont retrouvés, et j'ai participé à cette réunion.
ToutEduc : A quel titre ?
François Lasne : De bénévole dans le but de me former au rôle de facilitateur. Et nous lançons une campagne auprès de nos 200 000 adhérents. Un certain nombre d'entre eux sont, vraisemblablement, informaticiens ou ingénieurs, et susceptibles d'intervenir dans ces temps en "présentiel" que propose Class'Code. Nous faisons également appel à nos responsables pour organiser ces rencontres dans leur ville. Nous allons donc aider à former les enseignants volontaires, et nous visons plus particulièrement ceux du primaire et du collège. C'est vraiment un enjeu majeur, qu'il ne faut pas rater...
ToutEduc : Que pensez-vous du matériel qui est actuellement distribué ?
François Lasne : On est encore loin de la totailité des collégiens équipés en 5e, visés par l’Education nationale cette année, et nous nous inquiétons des différences d'approches entre les collectivités. Certaines, par exemple, fournissent avec la tablette ou l'ordinateur une assurance contre le vol ou la casse. Mais d'autres ne le font pas. Or pour une famille, c'est un coût supplémentaire, et c'est un problème : auprès de quelle compagnie assurer un objet relativement fragile ? Il va se retrouver dans un cartable dont on sait avec quelles précautions il sera manipulé dans la cour de récréation... même s’il s’avère que les élèves déjà équipés prennent soin de leur matériel.
ToutEduc : Les tablettes sont-elles le bon outil pour les élèves ?
François Lasne : Oui pour l'école primaire, les tablettes permettent d'utiliser le logiciel "Scratch" pour apprendre les rudiments de l'informatique. Après, au collège, pour créer de vraies lignes de programmation, pour stocker et transférer des fichiers, pour utiliser des raccourcis clavier, l’ordinateur portable est bien plus adapté.