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REP + : Une mise en oeuvre parasitée par la réforme du collège (inspections générales)

Paru dans Scolaire le samedi 01 octobre 2016.

Le ministère de l'Education nationale publie trois rapports sur la réforme de l'éducation prioritaire. En voici l'essentiel.

Le premier date de juillet dernier et portait sur le "suivi de la refondation de l’éducation prioritaire dans les REP+". Il concluait notamment que "les 102 REP+ mis en place à la rentrée 2014 (devaient) continuer à jouer leur rôle de préfigurateurs", mais il ne cachait pas les difficultés de mise en oeuvre. Si certaines équipes étaient "enthousiastes", d'autres étaient "rétives", et "l'encadrement intermédiaire", qui avait un rôle "essentiel" à jouer, devait être conforté. La mission concluait aussi que l'éducation prioritaire disposait de "moyens conséquents", même si, pour ce qui est du second degré, "plusieurs académies ont exprimé une incompréhension devant l’évaluation de la part de l’éducation prioritaire dans la dotation déléguée, bien inférieure aux moyens consommés". Pourtant, "les arbitrages au bénéfice de l’éducation prioritaire ne se sont pas effectués au détriment des autres collèges". Quant aux dotations des collèges REP+, elles n’atteignaient pas nécessairement les 10 % prévus, "compte tenu de moyens conséquents alloués antérieurement à certains réseaux. "Concrètement, l’écart moyen (...) entre un collège REP+ et un collège n’appartenant pas à l’éducation prioritaire est de 0,43 (soit, à titre d’illustration, pour un collège de 500 élèves, 12 ETP environ). Pour les établissements en REP, l’écart (...) est de 0,22."

Les deux autres datent du mois de juillet de cette année donc un an après la généralisation de l'expérimentation, et alors que le réseau compte 352 REP+ et 724 REP. Le premier porte sur le pilotage de la réforme. Il apparaît que les responsables académiques et départementaux "ont donné priorité à la mise en place de la réforme (du collège) et fait passer au second plan la réforme de l’éducation prioritaire". De plus, "le cloisonnement premier / second degré reste très largement la règle, ce qui est la négation même de la refondation et de la notion de réseau".

 Peu de coordination entre le premier et le second degré

La mission a relevé "des styles de management très variables selon les académies". Les IA-IPR (les inspecteurs du second degré) sont peu associés au pilotage de l’éducation prioritaire. "L’élaboration des projets de réseau ne fait que rarement l’objet d’un processus normalisé et, lorsque c’est le cas, souffre, à l’inverse, d’un formalisme excessif." Leur articulation avec les projets d’école ou de circonscription "n’est pas réfléchie". En ce qui concerne les dispositifs de formation continue, premier et second degrés, ils "sont peu coordonnés". D'ailleurs "l’ESPE est rarement partie prenante dans les dispositifs de formation liés à l’éducation prioritaire". Quant aux parents d’élèves, ils ne sont pas considérés comme acteurs à part entière au sein des instances représentatives et leur présence est souvent très formelle".

Les rapporteurs estiment que "l’échelon académique doit renoncer à un mode de pilotage pyramidal et hiérarchique au profit d’un mode de pilotage plus participatif". Ils constatent aussi que "la dimension organisationnelle de la réforme a pris le pas sur la dimension pédagogique".

Une "compensation à la pénibilité du travail"

Le troisième rapport, également daté de juillet 2016, porte d'ailleurs sur le volet pédagogique de la réforme, et l'inspection générale de l'Education nationale constate qu'il peine à se mettre en place "faute d’une maîtrise par tous des enjeux pédagogiques de cette refondation" alors que "la refondation de l’éducation prioritaire est avant tout pédagogique".

Les enseignants en ont conscience, "ils ont massivement exprimé le besoin de pouvoir consacrer plus de temps, en dehors des heures directes d’enseignement, aux autres dimensions essentielles de leur travail en éducation prioritaire : travailler collectivement, se former ensemble, organiser et concevoir le suivi des élèves, se consacrer davantage aux relations avec les parents". Toutefois, dans le second degré, "il a fallu souvent plus d’une année (...) pour que les temps dégagés par la pondération des services soient reconnus et acceptés comme des temps institutionnalisés et non comme une compensation à la pénibilité du travail" et "on est encore loin de temps organisés permettant l’élaboration de diagnostics partagés et débouchant sur la production d’outils et l’évolution des pratiques."

Un téléscopage avec la réforme du collège

La mission évoque de plus "l’incompréhension ou le trouble qui peut régner dans les esprits quand on interroge sur les différents temps de travail collectif dont ils ont pu être bénéficiaires", d'autant que, dans le second degré, il y a pu avoir "téléscopage" avec les formations liées à la réforme du collège. Celles-ci ont provoqué "un découragement profond" lorsqu'elles étaient "très descendantes, se limitant parfois à des diaporamas commentés dispensant des idées et des principes généraux sans s’appuyer sur ce qui se fait déjà sur le terrain (parfois plus avancé en REP + qu’ailleurs)". S'y ajoute "un grand désarroi et un mécontentement intense" du fait d'évolutions de la dotation en moyens des établissements : "dans les réseaux où l’enveloppe des trente-six heures allouées aux professeurs supplémentaires" (dans le cadre des RAR) disparaît (dans le cadre de la dotation des REP+), les professeurs "font des amalgames" et imputent cette perte à la réforme du collège...

Toutefois, en ce qui concerne les temps de concertation, "au fil du temps, le travail semble s’organiser : identification plus systématique de thématiques de travail et d’objectifs bien circonscrits, bilans et retours sur expériences, demandes de formations bien formalisées et motivées." Quant au travail commun entre écoles élémentaires et collèges, "les marges de progrès sont encore très importantes pour faire passer les équipes d’une logique d’actions ponctuelles (...) à un processus de réel travail entre les degrés pour tous les acteurs du réseau".

Valoriser le travail effectué en REP+

La mission décrit précisément les formes pédagogiques attendues dans les REP+. Elle souligne que "le dispositif 'plus de maîtres que de classes' est apprécié des équipes enseignantes". Elles y voient "la possibilité renforcée d’être au plus près des besoins des élèves", d'autant que "la flexibilité du dispositif constitue un atout qui permet de répondre au mieux aux besoins des équipes enseignantes". Mais "la mission de ce maître supplémentaire "demande un investissement important". En ce qui concerne "l’enseignement explicite", les inspecteurs constatent que "beaucoup reste à faire, tout particulièrement dans le second degré" alors que, dans le premier degré, il "semble commencer à porter ses fruits".

"Les formateurs REP+ ont reçu une formation nationale unanimement saluée" et qui leur a fait acquérir "une vraie profondeur de réflexion et un bagage solide de savoirs savants" qui leur manquait. Dans certaines académies, "ils forment une véritable équipe" et ils ont acquis "la capacité à diagnostiquer finement les besoins des réseaux". On pourrait d'ailleurs "renforcer la valorisation du travail effectué par les équipes des REP+, en particulier dans le cadre de la mise en oeuvre de la réforme du collège, en les faisant intervenir dans les formations pédagogiques destinées aux professeurs qui n’enseignent pas en éducation prioritaire."

Former et mobiliser les IEN et les IA-IPR

La mission s'inquiète toutefois des lacunes dans la formation et la mobilisation des IA-IPR et des IEN alors qu'ils ont un rôle "essentiel" à jouer et elle évoque l' "indispensable formation de tous les inspecteurs pour qu’ils puissent s’approprier les enjeux de cette refondation qui se veut avant tout pédagogique".

La mission souligne encore l'importance du lien avec les parents, même si les enseignants "peinent à partager avec eux les enjeux des activités et des évaluations sur les apprentissages". Elle préconise qu'ils coopèrent avec eux afin "d’aboutir à la conception d’outils de communication sur les apprentissages et les réussites des élèves, sur les bilans de compétences, qui soient clairs et accessibles à toutes les familles".

Les rapports sont téléchargeables sur le site du ministère, ici

 

 

 

 

 

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