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"L'école numérique" n'est pas, par elle-même, porteuse de progrès (ouvrage)

Paru dans Scolaire le samedi 20 août 2016.

Les auteurs le reconnaissent, leur titre, "Le Désastre de l'école numérique", est "quelque peu racoleur", leur dossier est constitué d'informations "mises bout à bout", ce qui les rend "édifiantes", au risque de la caricature. Mais leur essai vaut mieux que les apparences qu'ils se sont cru obligés de lui donner. L'un, Philippe Bihouix, ingénieur, connaît les procédés de construction des matériels informatiques et il plaide pour "une civilisation techniquement soutenable". L'autre, Karine Mauvilly, journaliste, a une petite expérience d'enseignante en collège. S'ils ne prétendent pas s'inscrire dans un débat pédagogique dont ils ne maîtrisent pas tous les termes, ils ont mené l'enquête, accumulé tous les éléments "à charge" qu'ils ont trouvés, et ils les exposent avec honnêteté, donnant leurs sources et distinguant clairement ce qui est établi, ce qui est une simple hypothèse, comme le caractère cancérogène des électrofréquences, et ce qui est de l'ordre du conflit d'opinions.

Les auteurs ont leurs têtes de turc, Jean-Michel Fourgous, rapporteur en 2010 d'une mission parlementaire "sur la modernisation de l'école par le numérique" dont ils dénoncent la naïveté, et Microsoft, qui "s'est lancée dans une politique offensive de création de forums enseignants de par le monde", et notamment en France, avec le "forum des enseignants innovants" que la multinationale finance sans que les participants en soient toujours bien informés.

"Rien de nouveau sous le soleil" ?

Mais ils ont le mérite de situer "la fascination (actuelle) pour les innovations technologiques" dans une histoire longue. Dès 1658, Comenius inclut un imagier dans un manuel de latin ! Il n'y a pour eux, finalement, "rien de nouveau sous le soleil", et à chaque fois il s'avère que les résultats ne sont pas "à la hauteur des espérances", que les promoteurs de ces nouveautés ont des intérêts matériels et que "c'est toujours la voie de l'équipement en matériel qui a été privilégiée, sans réelle réflexion préalable".

Et surtout, ils posent un certain nombre de questions que les promoteurs de "l'école numérique" posent aussi, mais qui sont masquées dans le débat public par des arguments simplistes. C'est ainsi qu'il semble évident que "le numérique aurait la capacité de rendre l'enseignement ludique". A supposer que cela soit souhaitable, il n'est pas évident qu'il y parvienne. Il n'est pas non plus évident qu'il soit efficace, et les auteurs passent en revue les formes pédagogiques innovantes qui n'ont pas recours au numérique et qui constituent autant de voies intéressantes. Nul ne peut chiffrer le coût financier de "l'école numérique", mais il est clair qu'elle a un coût écologique, en accélérant la multiplication des équipements, et un impact "anthropologique" en contribuant à la mondialisation et donc "aux chocs que nos sociétés ne cessent d'encaisser".

"Le désastre de l'école numérique", Philippe Bihouix et Karine Mauvilly, Le Seuil, 239 p. 17 €

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