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Les forces et faiblesses de Vitruve (conférence de G. Delbet)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le vendredi 17 juin 2016.

Le "groupe expérimental du XXème arrondissement, ses idées, ses pratiques" ont été mis en évidence par Gérard Delbet lors d'une conférence sur l’école Vitruve et son quartier, hier 16 juin. C’est qu’en effet, de Robert Gloton, président du GFEN (groupe français de l’éducation nouvelle) et inspecteur, promoteur du projet de lutte contre l’échec scolaire autour de l’école de la rue de Vitruve, à toutes les équipes qui se sont constituées par la suite, une chaîne scolaire et humaine semble perdurer et un esprit d’équipe flotte dans l’air lors de cette réunion qui n'est pas seulement de célébration mais aussi militante et de continuation.

En 1962, l'expérimentation a été lancée pour répondre à une situation dégradée. L’entrée en 6è ne concernait que 25% des élèves alors que la moyenne était à 60% dans la capitale. Pour Gérard Delbet, si des expériences pédagogiques concernent l’orthographe, la grammaire, le calcul, "Vitruve, c’est surtout le regroupement des élèves par cycle, l’abandon des classements, de la compétition, le travail sur le climat scolaire, sur les tutoiements et échanges entre enseignants et élèves et surtout la critique du ‘chacun se referme sur sa classe’."

Les finalités avant les moyens

Cette critique de "l’isolement mécanique des techniques de classe" amène Robert Gloton à se pencher plus sur les buts que les moyens. "En réaction contre l’isolement des classes, tout est mis en œuvre pour que l’unité pédagogique ne soit pas la classe mais l’école." Il recherche "un statut pour l’enfant et la transformation de la vie de l’écolier". Ainsi une nouvelle démarche d’ouverture s’initie, une mère commande une table et les élèves la fabriquent, à côté de leur enseignement traditionnel, "avec des outils d’adulte". C'est "un projet global en lien avec l’extérieur, et qui déstructure l’école", dira alors Jean Foucambert, spécialiste de l’apprentissage de la lecture qui vient souvent à Vitruve.

Les équipes inventent les classes vertes, l’école (et ses élèves) fait restaurant les samedis sur la place de la Réunion, des brocantes sont organisées, un voyage chez les Lip de Besançon est mis en place et l’on y discute de "coordination, coopératives et coopérations, autogestion…".

Remise en cause

"La fin de la récréation" pour les 80 écoles expérimentales, dont Vitruve avait refusé de faire partie, est sifflée par le ministre Beullac en 1980. L’expérimentation pédagogique est remise en cause et Vitruve court alors le risque alors de l’isolement. Mais l'équipe tient bon et publie en 1985 "Entreprendre pour apprendre", en réponse au livre de J-P Chevènement "Apprendre pour entreprendre". En 1988, l'école garde sa direction collégiale alors que le maître directeur entrait partout en fonction.

Depuis, l'Ecole a vécu d’autres aventures avant de se voir reconnaître le droit à l’expérimentation avec Jack Lang et la signature en 2010 d'un contrat de 5 ans sur "l’organisation collégiale et la pratique collective" avec l’académie de Paris. Les études sur le devenir de 2000 enfants sortis de Vitruve des années 60 aux années 90 font apparaître que 95 % d'entre eux sont passés en 6è à l’âge normal contre 65% des parisiens.

Une école qui est à elle-même sa propre ressource

Mais Vitruve connaît ensuite une période de relatif isolement. Si les liens avec le mouvement Freinet perdurent, c’est davantage via des liens personnels; Freinet "a une difficulté de passer au niveau de l’école et reste dans la classe". Car, pour Gérard Delbet, l’école a vécu "sans théoricien", "étant à elle-même sa propre ressource (...), plus elle faisait autrement, plus elle se constituait comme école", partie prenante "de l’histoire de son quartier", au risque de l'isolement au sein de l'Education nationale.

Pour Nicole, aujourd’hui retraitée et mère de trois enfants qui ont été scolarisés dans l’école, il n’y a aucun doute et il convient même de le faire savoir : "mes enfants étaient heureux d’être scolarisés à Vitruve", dit-elle à ToutEduc avant d'aller féliciter chaleureusement l’orateur, ancien instituteur de Vitruve.

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