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Rythmes scolaires : "pas de retour en arrière possible" (F. Cartron)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le vendredi 20 mai 2016.

Pour Françoise Cartron, les parents sont satisfaits de la réforme des rythmes scolaires et les élus n'envisagent pas de revenir en arrière après "un tel travail", "on ne va pas tout rechambouler" ont-ils dit à la sénatrice, chargée par le Premier ministre "d'identifier les voies et moyens pour que les services de l'Etat soient, plus encore qu'aujourd'hui, à même de diffuser les réussites des uns et d'apporter un éventail de solutions aux autres", notamment dans les petites communes rurales. Après avoir rencontré quelque 150 maires dans une douzaine de départements et traité un bon millier de réponses d'élus à un questionnaire qui leur a été adressé par leurs sénateurs, elle est convaincue que les activités proposées en milieu rural ne sont pas moins intéressantes que celles que peuvent être proposées dans de grandes villes, ne serait-ce que pour une raison simple, "l'enfant apprend tout le temps", dès lors qu'il est stimulé, "heureux et actif". Il faut "déconstruire" les représentations, estime F. Cartron pour qui on est parti d'un idéal d'actvivités qui seraient d'autant plus intéressantes qu'elles seraient originales.

Souvent, raconte-t-elle quand elle présente à la presse son rapport, les maires de petites communes lui ont dit "vous nous avez fait du bien". Ils étaient convaincus de n'avoir "pas grand chose" à présenter, les enfants faisant "des jeux de société". C'est sans compter qu'ils apprennent ainsi à respecter des règles, à attendre leur tour, à accepter de perdre et qu'ils acquièrent des compétences qui seront utiles aux apprentissages scolaires. Les ludothécaires le savent bien d'ailleurs. Et 97 % des élus estiment que "les enfants sont heureux de participer" aux activités créées par la réforme.

Ils ont au moins deux autres raisons de ne pas envisager de retour en arrière. La réforme leur a permis de passer des emplois communaux à temps partiel en temps complets, et elle leur donne des arguments pour convaincre des parents qui travaillent dans une grande ville voisine de rester, et donc de conserver l'école, l'élément essentiel pour la survie du village. De plus, les activités proposées peuvent s'adresser à tous les habitants, l'activité "jeu d'échec" pouvant se conclure par un tournoi adultes-enfants, et la pièce de théâtre du village ayant donné lieu à des ateliers couture et décors... "Les gens arrivent avec leurs talents", même s'ils ont besoin d'un animateur pour les aider à gérer le groupe. Dans certains villages, on use des ressources locales, comme dans la Drôme où le parc naturel propose un jeu qui met en valeur la faune et la flore.

Construire des PEDT

Autre évolution, cette réforme "a fait prendre conscience de l'intérêt des intercommunalités" car c'est dans ce cadre que les collectivités peuvent améliorer leur offre, gérer le recrutement et la formation d'animateurs qui peuvent ainsi faire des plein-temps quand leurs formations et leurs diplômes leur permettent de travailler aussi dans un EHPAD avec les personnes âgées ou un CCAS. Elles ont aussi les moyens de remplir les dossiers des CAF pour le financement des PEDT, auquel la moitié des communes rurales renoncent. Il leur a d'ailleurs fallu dans un premier temps élaborer ce "projet éducatifs de territoire", penser l'articulation des temps scolaires, périscolaires, hors scolaires, l'utilisation des installations sportives et des ressources culturelles disponibles sur un territoire nécessairement élargi à plusieurs communes...

La vice-présidente du Sénat répond aussi à un certain nombre d'objections. Les coûts allégués par les opposants à la réforme ne distinguent pas ceux qui sont dus à la réforme et ceux du périscolaire en général, avec les accueils du matin, du soir, du mercredi, du samedi, des petites vacances... En réalité, ils ne dépassent pas 1 % du budget de fonctionnement des communes. Pour ce qui est de la fatigue des enfants, F. Cartron fait remarquer que la concentration sur 4 jours était également accusée de l'avoir augmentée. Et si l'absence de coupure le mercredi est en cause, il suffit de changer pour le samedi matin. 

Des ressources méconnues

Et surtout, trop d'élus ignorent de quelles ressources ils disposent. Seuls 20 % des maires ruraux savent qu'ils peuvent s'adresser aux GAD (groupes d'appui départementaux), les 3/4 ne connaissent pas le réseau Canopé qui a mis en ligne 350 fiches pour aider à la construction d'ateliers, pour un coût minime. Ils ignorent aussi que l'INRIA (institut de recherche en informatique) leur propose des robots pour apprendre à coder (150 € pour 3 enfants), que CAP sciences à Bordeaux propose de former leurs animateurs et de leur fournir une mallette pédagogique, tout comme le musée du Quai Branly, une démarche que veut amplifier la RMN (réunion des musées nationaux).

Le renouvellement de l'offre permettra en effet de prévenir l'un des risques que connaît la réforme, son essouflement. Reste aussi à multiplier les formations conjointes entre enseignants et animateurs, "pour que les regards changent". Pour l'instant, F. Cartron constate une certaine indifférence des premiers, qui se sont parfois senti dépossédés, à l'égard des seconds, et des dysfonctionnements, notamment du fait des APC, les activités pédagogiques complémentaires, qu'il faudrait "repenser", car trop souvent les professeurs les gèrent sans égards pour le TAP... Et pour la sénatrice, il faut maintenant envisager "un saut qualitatif", "ouvrir le chantier" de l'harmonisation entre le temps scolaire et ce temps d'activités périscolaires.

Ceux qui en ont le plus besoin

Car pour elle, le bilan est évidemment positif. Sa mission ne l'invitait pas à mesurer les progrès des élèves sur le plan des acquis scolaires mais plusieurs enseignants lui ont dit faire au mois de février ce qu'ils faisaient habituellement au mois d'avril. Et surtout, cette réforme "profitent à ceux qui en ont le plus besoin", dans les quartiers difficiles.

F. Cartron n'en fait pas moins 25 recommandations dont voici l'essentiel

- "Valoriser les apprentissages informels auprès des enseignants et des parents"

- "Alléger les procédures d'attribution des aides de la CAF"

- "Alléger les conditions d'obtention du BPJEPS (le brevet professionnel Jeunesse et Sports, ndlr) et favoriser la polyvalence dans la formation"

- "Reconnaître l'implication des étudiants qui encadrent des NAP"

- "Créer une plateforme de partage des ressources à l'échelle nationale (...), à l'échelle départementale" et conceptualiser des 'malles de parcours d'activités"

Mobiliser "l'expertise des professionnels de la petite enfance et celle des PMI"

- "Poursuivre l'approche spécifique en maternelle (...) en privilégiant des temps d'activités calmes et de repos sur la pause méridienne" et en mobilisant "l'expertise des professionnels de la petite enfance et celle des PMI"

- "Faciliter la participation des enfants en situation de handicap au TAP"

- "Revoir le fonctionnement des conseils d'école en associant davantage les élus"

- "Stabiliser et reenforcer les contrats de travail" des animateurs en lien avec des CCAS, des EHPAD, des espaces services...

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