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Fumer dans un lycée : pourquoi le tribunal administratif a condamné un lycée

Paru dans Scolaire le vendredi 22 avril 2016.

Après que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu, en référé, hier 21 avril, la décision du proviseur du LEGT Paul Lapie de Courbevoie d'autoriser les élèves à fumer dans l'enceinte de l'établissement, le SNPDEN "demande une nouvelle fois aux autorités d'assumer leurs responsabilités". Pour le syndicat UNSA des personnels de direction, l'État doit faire appel de ce jugement, ou engager "une modification législative ou réglementaire qui interdirait la sortie des élèves", mais cela supposerait qu'il augmente les moyens de surveillance. Faute de quoi, "la situation antérieure redevient la norme : les élèves s'attrouperont à nouveau devant le lycée" pour fumer, alors qu'une circulaire conjointe des ministres de l’Éducation et de l’Intérieur, publiée après les attentats du 13 novembre a autorisé les établissements à créer des "zones spécifiques" où les élèves puissent se retrouver sans sortir des murs (mais sans écrire explicitement qu'ils y ont le droit de fumer). Il s'agissait d'éviter que ne se forme à chaque récréation des rassemblements devant les établissements qui constitueraient des cibles pour des terroristes.

ToutEduc a obtenu du tribunal administratif le texte de sa décision (n° 1602883). Il a été saisi par le "Comité national contre le tabagisme" et par l’association "Les Droits des Non-Fumeurs" qui lui demandaient "d’ordonner la suspension de l’exécution de la décision du 18 janvier 2016 par laquelle le proviseur (...) a autorisé les élèves à fumer dans la cour du lycée". Pour sa part, l’académie de Versailles faisait valoir que la condition de l’urgence (qui justifie que le juge des référés soit saisi) n’était pas remplie, dès lors que "la mesure est édictée dans des circonstances exceptionnelles tenant à l’état d’urgence" et que "le caractère temporaire de la mesure édictée ne remet pas en cause les politiques de santé publique existantes en matière de lutte contre le tabagisme", mais qu'elle "permet d’assurer la sécurité immédiate des élèves".

Le rectorat faisait aussi valoir que la "zone spécifique" est de "75 m² dans une cour de 3 100 m²" et qu'elle est "occupée en pratique par 15 à 30 élèves sur un total de 1 390 élèves". La constitution de cette zone "est la seule mesure que peut prendre le proviseur du Lycée pour répondre à l’objectif de sécurisation des abords immédiats des établissements scolaires".

"Il a été décidé d'autoriser les élèves à fumer"

Le tribunal considère que le proviseur a indiqué aux élèves et à leurs parents qu’ "afin de renforcer la sécurité des élèves aux abords de l’établissement en limitant leurs regroupements extérieurs lors des récréations, il a été décidé d’autoriser les élèves à fumer dans la cour du lycée". Or l’article L. 3511-7 du code de la santé publique prévoit qu'il "est interdit de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, notamment scolaire", et l’article R. 3511-1 prévoit que cette interdiction de fumer vaut aussi pour "les espaces non couverts des écoles, collèges et lycées" où des emplacements mis à la disposition des fumeurs "ne peuvent être aménagés". 

Le juge considère que la condition liée à l’urgence "doit être regardée comme remplie" car "le tabagisme reste un problème majeur de santé publique en France" : "la diminution du tabagisme chez les jeunes est un objectif prioritaire." Il incombe donc aux autorités administratives "de veiller au respect des dispositions fixant les conditions d’application de l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif réservés à l’enseignement" et la circulaire "relative aux mesure de sécurité dans les écoles et les établissements scolaires (...) ne peut avoir pour objet le non respect de la violation de l’interdiction de fumer, édictée par voie législative et d’inciter les usagers des collèges et lycées, en l’espèce les élèves, à modifier leur comportement conduisant à ce qu’ils puissent fumer en toute illégalité".

A noter que, contrairement à la circulaire ministérielle, le courrier du proviseur fait explicitement référence au droit de fumer dans l'établissement, et que le SNPDEN souligne, implicitement, dans son communiqué, que la décision ne s'applique qu'à ce lycée : "les élèves s'attrouperont à nouveau devant le lycée comme devant tous ceux où une décision similaire sera désormais probablement prise".

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