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N'est-on pas en train de "désintellectualiser le métier de professeur" ? (Pierre Statius, revue Skhole)

Paru dans Scolaire, Culture le mercredi 24 février 2016.

"Sur le plan institutionnel, les ESPE sont dans l’université mais elles fonctionnent comme des écoles professionnelles pilotées par l’État employeur. Il fallait, nous disait-on, inscrire véritablement les ESPE dans l’université, contrairement aux IUFM qui restèrent à la périphérie. Il ne semble pas que cet objectif ait été atteint", estime Pierre Statius, enseignant-chercheur spécialiste de la philosophie politique de l'éducation, dans un article publié dans la revue Skhole le 8 février. À noter, l'auteur a été directeur de l’IUFM de Franche-Comté de 2009 à 2013 et vice-président de la conférence des directeurs d’IUFM de 2010 à 2013.

Après avoir retracé l'histoire des écoles normales puis des IUFM, Pierre Statius analyse les causes de leur "déclin" : "La formation des maîtres devient un champ idéologique d’affrontement ; aucune synthèse n’est esquissée, aucun travail de dépassement des oppositions n’est tenté. C’est de là que date, nous semble-t-il, la crise profonde de la formation des maîtres : nous avons été, collectivement, incapables d’échapper à l’anomie et à l’idéologie, nous avons été incapables de revenir vers une interrogation anthropologique et politique".

N'est-on pas en train de "désintellectualiser le métier de professeur" ?

Sur la situation actuelle, il juge que "fonctionnellement, la place du concours installe une formation consécutive qu’on voulait à tout prix éviter. Le quotidien des étudiants puis des stagiaires est infernal, prisonniers qu’ils sont des évaluations du master, des visites pédagogiques, des différents projets et travaux à mener au sein de l’ESPE". Quant à la recherche, l'auteur constate un appauvrissement "par rapport à ce qui se menait dans les IUFM dernière période".

Mais à ses yeux, la question centrale reste qu'"on ne sait pas très bien quel maître on forme" : "N’est-on pas en train, sans le dire et en souhaitant en finir avec les idéologies, en professant un pragmatisme du bon sens, de désintellectualiser le métier de professeur et de faire de lui un exécutant d’une doxa pédagogique et didactique qui serait le résultat d’un travail d’experts ?" interroge-t-il.

"Un naufrage de l’école"

Au final, Pierre Statius déplore "notre incapacité à définir nettement la figure idéale du sujet que nous voulons produire à l’école, de notre incapacité vertigineuse à définir l’éducation commune et l’éducation spéciale de manière explicite". Son verdict est sans appel : "Dans ce creux ou dans ce vide s’installe sans vergogne l’idéologie managériale qui, on le sait, vise à produire un sujet toujours disponible, c’est-à-dire vide et insignifiant. Ce qu’on peut appeler un naufrage de l’école."

Dans ce contexte, il interpelle : "Serons-nous capables d’inverser la tendance, serons- nous capables d’élaborer un concept substantiel de l’éducation démocratique ? En tout cas, il faut reprendre les questions, les réviser de fond en comble tant il est vrai que l’avenir de nos démocraties modernes en dépend."

L'article est consultable ici

Diane Galbaud

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