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Décrochage : un nouveau regard (la Cour des comptes)

Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 20 janvier 2016.

La Cour des comptes évalue à "autour de 100 000 par an en France métropolitaine" le nombre de jeunes qui sortent sans qualification du système scolaire chaque année, soit 9 %, et à "environ" 480 000, celui des jeunes de 18 à 24 ans sans qualification. Elle publie ce 20 janvier un rapport sur "les dispositifs et les crédits mobilisés en faveur des jeunes sortis sans qualification du système scolaire". La Cour constate que, "contrairement à une idée largement partagée", ces deux chiffres sont en régression, mais que la situation de ces jeunes "justifie la poursuite de politiques actives" en leur faveur. Elle met pourtant en évidence "qu’il n’existe pas de politique unifiée de formation et d’insertion" pour ces jeunes puisque se juxtaposent quatre intervenants, l'Education nationale, l'Emploi, les Régions et les partenaires sociaux.

Autre constat de la Cour, l’engagement financier public en faveur des jeunes sans qualification représente 1,4 Md€ au titre des dispositifs d’insertion et de formation et 0,5 Md€ au titre des emplois aidés, non compris le coût des retours à l'école. "L’État assure 50 % de ces financements, les régions 25 %, les partenaires sociaux et Pôle emploi 15 % à eux deux."

Les plateformes de l'Education nationale

La Cour ajoute que l'Education nationale "a répondu au problème en cherchant à agir au plus vite auprès des jeunes sortant du système éducatif sans qualification" avec la création d’instances partenariales, "les plateformes de suivi et d’appui aux décrocheurs", dispositif qui "porte ses fruits", mais le repérage n'est pas exhaustif : "une moitié seulement des jeunes identifiés comme décrocheurs sont utilement contactés". De plus, "la coordination au sein de ces instances est inégale", "les autres parties prenantes ont pu dans certaines régions se désinvestir", d'autant que les solutions alternatives au retour en formation scolaire "sont peu développées".

A côté de "la garantie européenne pour la jeunesse" et du "droit au retour" en formation, les jeunes "peuvent bénéficier de plusieurs dispositifs spécifiques", le CIVIS (contrat d’insertion dans la vie sociale), mis en oeuvre par les missions locales, les écoles de la deuxième chance et les EPIDe qui "produisent des résultats tangibles" mais dont les coûts (9 000 € par jeune pour les écoles de la 2ème chance et 24 000 € par jeune pour l’EPIDe) "ne permettent pas d’envisager de les étendre à un grand nombre de jeunes non qualifiés". La question du coût se pose aussi pour les emplois d’avenir : 24 000 € par jeune en moyenne. La Cour se demande si l'extension de "la garantie jeunes" ne provoquera pas "une rationalisation de l’offre existante susceptibles de remettre en cause le CIVIS". Quant aux formations mises en place par les régions, elles représentent "près de 80 000 entrées annuelles", mais "cette offre est généralement mal reliée aux actions d’accompagnement des missions locales".

La dispersion des dispositifs

"L'architecture d’ensemble de ce système et la dispersion des dispositifs ne permettent pas d’atteindre les objectifs affichés (...), la prise en charge des jeunes sans qualification est éparpillée entre de nombreuses institutions (missions locales, SIAE, écoles de la 2ème chance, Pôle emploi, EPIDe, etc.) dans le cadre d’une offre globale peu lisible (...) Un diagnostic partagé de la situation de chaque jeune n’est pas effectué de façon systématique (...) Le principe de l’accompagnement global du jeune, qui est affirmé depuis le rapport Schwartz de 1982 et qui fonde en théorie l’action des missions locales, est battu en brèche par la segmentation des dispositifs (...) Ce système subit également les inconvénients d’une gouvernance éclatée entre l’État, les régions, les partenaires sociaux et les réseaux d’accompagnement ou d’insertion (...)".

La Cour demande à l'Education nationale d'augmenter "le nombre de places disponibles notamment dans les structures de retour à l'école". Elle recommande "de faire converger les politiques de l’État, des régions et des partenaires sociaux", de "mettre en place une instance opérationnelle de pilotage (...) à l’échelle d'un bassin territorial d’emploi", de "diversifier les solutions proposées par les plateformes de suivi et d’appui aux décrocheurs", et, avant toute orientation d’un jeune, de "prévoir un bilan approfondi dans le cadre d’un référentiel d’évaluation commun à l’ensemble des parties prenantes".

Quatre ensembles de dispositifs

Elle propose aussi de supprimer le CIVIS et de réorganiser les dispositifs d’insertion des jeunes en quatre ensembles selon le niveau des difficultés auxquelles le jeune est confronté, "un dispositif d'accompagnement léger (...) orienté directement vers l'emploi, pour les jeunes les plus proches du marché du travail", "un dispositif inspiré de la garantie jeunes, pour les jeunes nécessitant un accompagnement plus intense", "un dispositif géré par les régions, adapté aux décrocheurs les plus jeunes n'ayant pas vocation à réintégrer le système scolaire", "les dispositifs de deuxième chance (...) pour les jeunes les plus en difficulté".

Le rapport (une centaine de pages hors annexes, 191pages en tout) est téléchargeable sur le site de la Cour des comptes, ici

 

 

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