Le festival du film d'éducation : se poser des questions sur les représentations de l'autre
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le vendredi 04 décembre 2015.
Le festival du film d'éducation d'Evreux remplit systématiquement, à chaque séance, les deux salles qui lui sont dédiées, a pu constater ToutEduc. Hier 3 décembre, les jeunes et les adultes qui les accompagnent étaient invités à s'interroger sur les conditions du "mieux vivre ensemble". Trois conférences-débats rythment en effet des journées surtout consacrées aux projections. Martine Pretceille (Paris-VIII) a ainsi invité les festivaliers à "penser un humanisme du divers", à "sortir du discours de la différence pour travailler sur la diversité", à saisir l'autre dans sa singularité et son universalité avant de penser aux spécificités culturelles. Michel Sauquet (écrivain) évoque pour sa part l'intelligence interculturelle qui permet "de faire crédit à l'autre d'être intelligible" et de se demander si soi-même on n'est pas impossible à décrypter pour autrui.
Et c'est aussi l'expérience à laquelle sont confrontés les jeunes élèves d'un lycée professionnel de Seine-maritime, qui visionnent des films mais sont également en position de journalistes, et qui, pour nourrir le blog du festival, ont interviewé une actrice et une réalisatrice. "Ca fait bizarre", "c'est la première fois que j'ai une actrice auprès de moi", et, ajoute Antony, "j'ai de la chance d'aller à l'école, Tata Milouda (artiste de slam marocaine, ndlr) n'y est pas allée". Il l'a rencontrée après la projection de Patience, patience, t'iras au paradis, dont elle est l'héroïne.
Des partenariats de projet
Ces élèves sont hébergés pendant 5 jours par le festival. Interrogé sur le financement, Christian Gautellier qui le dirige évoque l'évolution des partenariats, qui ne sont pas seulement pécuniaires mais aussi "de projet". Le Département par exemple ne va pas contribuer à une manifestation culturelle, ce qui n'est d'ailleurs pas de sa compétence, même si celle-ci a un rayonnement national et européen, voire davantage. En revanche, il est concerné par un projet qui implique des collégiens et qui contribue à la formation des travailleurs sociaux. De même pour la Région avec les lycéens ...
Tous ces partenaires (voir ToutEduc ici) sont aussi sensibles au caractère "positif" des films d'éducation. Ils sont très différents les uns des autres. Je suis le peuple permet de suivre un paysan égyptien et un village qui s'éveille à la démocratie tandis que se soulève la place Tahrir, et donc de comprendre les processus d'émancipation; Parole de king! montre des "drags kings", des femmes travesties en hommes, et comment se construisent, et se déconstruisent les stéréotypes de genre, une invitation à réfléchir sur les codes sociaux; c'est vrai aussi, quoique différemment, pour Trop noire pour être française ?; Le Rebond est à la fois un discours scientifique et une présentation sensible, chorégraphique, des phénomènes de résilience, alors que les éducateurs sont souvent confrontés à des jeunes qui ne savent comment rebondir après un échec; Mia Madre évoque les relations d'une mère et de sa fille; Démarche suit un éducateur qui emmène une jeune délinquante sur les chemins de Saint-Jacques..."Ce sont des films qui parlent de ruptures, de ceux qui sont laissés à la marge, mais qui laissent une chance à la vie."
Le site du festival, ici