Tutorat des futurs enseignants : un rapport d'inspection souligne le manque de liens entre "le terrain" et les ESPE
Paru dans Scolaire le samedi 24 octobre 2015.
Le premier bilan du fonctionnement du tutorat des enseignants stagiaires "est contrasté". En termes mesurés, l'IGAENR (l'une des deux inspections générales de l'Education nationale) rend compte de la mission qu'elle a menée entre novembre 2014 et janvier 2015, et dans le rapport que vient de publier le ministère, elle évoque à plusieurs reprises la mobilisation des acteurs pour la réussite de ce système dont elle rappelle qu'il n'est pas nouveau : "il a d’abord été développé dans le cadre des instituts universitaires de formation des maîtres, confirmé lors de la mastérisation, puis renforcé dans le nouveau cadre des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE)."
Toutefois, il a changé de nature puisqu'il "est assuré conjointement par deux tuteurs, un enseignant d’une école ou d’un établissement public local d’enseignement nommé par le recteur d’académie et un personnel désigné par l’ESPE". D'ailleurs "l’utilisation indifférenciée du mot de tuteur peut être source d’incertitude sur les fonctions réelles des personnels désignés tuteurs". De plus, les difficultés rencontrées "sont le fruit d’un manque d’anticipation" : "en raison de l’afflux des stagiaires (environ 20 000 lauréats des concours rénovés), les académies et les ESPE ont dû faire appel à toutes les ressources disponibles pour désigner les 'tuteurs de terrain' et les 'tuteurs ESPE' (...)"
Mais "c’est dans la complexité de l’organisation du nouveau modèle de formation que se trouvent les difficultés" et la recherche de lieux de stages (ou "berceaux") et la réflexion sur les contenus de la formation "l’ont emporté sur la construction concertée des modalités d’action du tutorat". Les difficultés "sont également liées aux emplois du temps des tuteurs terrain et ESPE qui peinent à trouver des moments nécessaires à leurs rencontres" et ils travaillent "en parallèle plutôt qu’ensemble". Alors que le mémoire (que doivent rendre les stagiaires dans le cadre du master) "suppose une réflexion associant pratique et mise en perspective théorique". Or il "ne fait pas l’objet d’une réflexion commune entre les deux tuteurs" et "le double enjeu de la réussite au master et de la titularisation crée parfois des tensions (...) Chacun regarde ce qui le concerne, alors que le tutorat mixte doit permettre la confrontation des points de vue." Quand aux chefs d’établissement, ils regrettent de n'avoir pas de liens avec l’ESPE : "ils pensent être peu ou pas du tout informés, alors qu’ils auront en fin d’année un avis à porter sur la titularisation des fonctionnaires stagiaires. Ils ne sont plus invités à des réunions collectives, comme le faisait chaque année l’IUFM."
L'IGAENR fait dix préconisations concrètes, notamment "mettre en place un vivier de tuteurs", "maintenir, si possible, des berceaux sur une période pluriannuelle", "informer et former les chefs d’établissement", "rendre effective l’animation des réseaux de tuteurs par les formateurs académiques".
Le rapport "Tutorat des futurs enseignants et conseillers principaux d’éducation" est téléchargeable sur le site du ministère, ici