"Deux petits pas en 25 ans !". Le président de la FADBEN s’interroge sur le rôle des professeurs-documentalistes.
Paru dans Scolaire le mardi 06 octobre 2015.
La Fadben, qui rassemble les enseignants documentalistes, réunit son congrès du 9 au 11 octobre à Limoges sur le thème "Enseigner-apprendre l’information-documentation". Entretien avec son président, Florian Reynaud
ToutEduc : Pensez-vous que les outils numériques ont changé l’approche des élèves vis-à-vis de l’information et de la documentation ?
Florian Reynaud : Oui. Aujourd’hui le premier réflexe des élèves c’est de chercher sur internet. Notre rôle, c’est de présenter les deux, la documentation numérique et le papier, de leur montrer qu’il y a une documentation faite pour eux, ce qui n’est pas toujours le cas d’internet. Même si c’est différent suivant les établissements, les CDI fonctionnent plutôt bien. La venue des élèves dépend de leur culture familiale et nous devons intéresser par un apprentissage systématique ceux qui, a priori, ne viendraient pas.
ToutEduc : Votre métier a changé ?
Florian Reynaud : C’est une profession qui a considérablement évolué, justement à cause du numérique mais malheureusement, on ne dispose pas toujours du matériel nécessaire. Et surtout, de sa maintenance. Les équipements sont très variables d’un établissement à un autre même si on constate une volonté réelle des collectivités locales en la matière. Cela dit, il ne suffit pas d’installer des tableaux interactifs ou de donner des tablettes à tous les élèves. Il faudrait éviter les effets d’annonce.
ToutEduc : Selon vous, quelle devrait être la place du professeur-documentaliste dans un établissement ?
Florian Reynaud : Bien souvent, les chefs d’établissement n’ont aucune connaissance de notre métier. On nous prend trop souvent pour des gestionnaires de lieu ou de matériel. Nous avons des missions spécifiques, un rôle pédagogique à jouer avec les enseignants pour utiliser les outils de recherche d’information et de documentation. Nous contribuons à l’ouverture culturelle et à la mise en avant de la lecture. Nous avons tout un panel de missions qui n’est pas toujours reconnu. On est un peu oublié dans les discours officiels…
ToutEduc : Vous vous dites "déçus" par les nouveaux programmes, pourquoi ?
Florian Reynaud : On était très intéressé. On a eu des contacts très riches avec le Conseil supérieur des programmes mais aboutir seulement à un référentiel de compétences, c’est insuffisant. On nous dit, c’est un premier pas, c’est déjà une bonne chose… En fait, on a plutôt l’impression qu’on a fait deux petits pas en 25 ans !
ToutEduc : Comment expliquez-vous votre manque de reconnaissance ?
Florian Reynaud : Le vivier des professeurs documentalistes est très varié, 15% sont des contractuels, alors qu’ils ne sont que 5% chez les enseignants. Beaucoup d’entre nous sont en reconversion, parfois sans une préparation aussi exigeante que celle du CAPES, avec des motivations et implications variées. Nous avons un problème d’image et je pense que l’administration entretient ce manque de reconnaissance. Par exemple nous avons largement participé en juin à la consultation sur les programmes mais nous n’apparaissons pas du tout dans la synthèse.
ToutEduc : Pensez-vous que la création des enseignements pratiques interdisciplinaires renforcera votre rôle ?
Florian Reynaud : On va peut-être avoir davantage de problèmes. Nous n’avons pas obtenu le programme et la progression dans les apprentissages que nous avions proposés. Les enseignements disciplinaires passeront avant nous. Et, en plus, les EPI se feront dans la contrainte des emplois du temps ; ce qui pouvait se faire dans la souplesse va se rigidifier. Franchement, on ne voit pas ce qui va changer.
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